Название: Toutes les Oeuvres Majeures de Cicéron
Автор: Ciceron
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066373825
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« L’héritage est-il un ? » voilà le point à juger ; et si l’on accorde que « des causes différentes « peuvent donner des droits à un même héritage, » il faudra encore décider « si des branches différentes peuvent avoir les mêmes droits sur le même héritage. »
XXII. Ainsi vous voyez que dans une seule question il peut se rencontrer plusieurs raisons, plusieurs manières de les réfuter, et plusieurs points à juger. Voyons maintenant les règles de cette question. Les deux parties ou toutes, s’il s’en rencontre plus de deux, doivent examiner ce qui constitue le droit. Il est puisé dans la nature. L’utilité plus ou moins évidente de certaines choses les a fait passer en usage : une fois leur utilité démontrée par l’évidence ou par l’expérience, la loi les a confirmées. Il est un droit naturel qui n’est point fondé sur l’opinion, mais sur un sentiment inné, comme la religion, la piété, la reconnaissance, la vengeance, le respect ou la vérité. La crainte des dieux et les cérémonies de leur culte constituent la religion. La piété est le sentiment qui nous avertit de nos devoirs envers la patrie, nos parents, ceux qui nous appartiennent par le sang. La reconnaissance consiste dans les égards qu’inspirent le souvenir des bienfaits, des honneurs et de l’amitié, et le désir d’y répondre. La vengeance punit ou repousse la violence, ou l’affront fait à nous ou à ceux que nous devons chérir ; et c’est aussi par elle que nous punissons les crimes. On entend par le respect, les marques de déférence et de vénération que nous donnons à l’âge, à la sagesse, aux honneurs ou aux dignités. Par la vérité, nous tâchons que rien, dans le passé, le présent et l’avenir, ne démente ce que nous avons affirmé. Il est rare que, dans une cause de cette espèce, on ait recours aux droits naturels, dont le droit civil s’occupe peu, et qui ne sont point à la portée du vulgaire. Cependant on peut les employer, en plusieurs circonstances, dans la similitude ou dans l’amplification.
On appelle droit fondé sur la coutume, tout ce que le temps a consacré, du consentement universel, sans l’autorisation de la loi. La loi même contient plusieurs droits établis par le temps. Un grand nombre et même la plupart se trouvent renfermés dans les édits des préteurs. D’autres espèces de droit, au contraire, sont fondées sur la coutume, comme un contrat, l’équité, les jugements antérieurs. Un contrat est un traité entre différents individus, qu’on regarde comme si juste, qu’il est de droit de l’exécuter. L’équité donne un droit égal à tous. Un jugement antérieur est la décision déjà rendue par une ou plusieurs autorités. La loi nous fait connaître les droits légaux. 11 faut donc examiner tout ce que ces différentes parties du droit pourront vous fournir, ou dans le fait même, ou dans une affaire semblable, ou dans une plus ou moins importante, et fouiller pour ainsi dire chacune d’elles pour en tirer ce qui peut servir notre cause. Pour les lieux communs, qui forment, comme nous l’avons dit plus haut, deux espèces, dont l’une développe les choses douteuses, et l’autre les choses certaines, voyez ce qu’ils fournissent de secours à votre cause, ce que vous pouvez, ce que vous devez développer en lieu commun. On ne peut en établir qui conviennent à tous les sujets ; mais il est peu de causes dans lesquelles on ne puisse attaquer ou défendre l’autorité des jurisconsultes. Examinez surtout quels sont, outre ceux que nous avons indiqués, les lieux communs que vous offre la cause même. Passons maintenant au genre juridiciaire et à ses différentes parties.
XXIII. La question juridiciaire discute le droit ou le tort, décide si l’on mérite peine ou récompense. Elle se divise en question absolue et en question accessoire. Absolue, quand elle renferme en elle-même, non pas implicitement, comme la question matérielle, mais d’une manière évidente, l’examen du juste et de l’injuste. Prenons l’exemple suivant : « Les Thébains, vainqueurs de Sparte, avaient élevé un trophée d’airain, suivant l’usage des Grecs, qui, dans leurs guerres particulières, érigeaient un trophée sur les frontières, après la victoire, plutôt pour la constater clans le moment même, que pour perpétuer le souvenir de la guerre. » On les accuse au tribunal des Amphictyons, c’est-à-dire, devant le conseil général de la Grèce. « Ils ne le devaient point, » disent les accusateurs. — « Nous le devions, » répondent les accusés. — « Le devaient-ils ? » voilà la question. Voici la raison des Thébains : « La victoire que nous avons remportée est si glorieuse, que nous avons voulu en laisser à nos descendants un monument éternel. » On les réfute en disant « que les Grecs ne doivent point élever un monument éternel des discordes de la Grèce. » Le point à juger est de savoir, « si des Grecs qui, pour immortaliser leurs exploits, élèvent un monument éternel des discordes de la Grèce, font bien ou mal. » Nous ne donnons cette raison que pour faire bien connaître le genre de cause qui nous occupe ; car si nous répondions, comme ils le firent sans doute : « Votre guerre était impie et criminelle, » ce serait une récrimination, et nous n’en sommes point encore à ce sujet. Il est évident que ces deux questions se rencontrent dans cette cause, et que, pour celle-ci, on puise des raisonnements dans les mêmes lieux que pour une question matérielle. Quant aux lieux communs, la cause elle-même, si elle est susceptible d’exciter la pitié ou l’indignation, la nature et l’utilité du droit vous en fourniront un grand nombre de solides, que vous pourrez, que vous devrez même employer, si la dignité du sujet vous semble l’exiger.
XXIV. Examinons maintenant la question juridiciaire accessoire. La question juridiciaire est accessoire, quand les preuves ou la défense, trop faibles par elles-mêmes, s’appuient sur des motifs étrangers au fond de la cause. Elle offre quatre chefs : l’alternative, la récrimination, le recours et l’aveu du crime.
L’alternative justifie, par les motifs, un fait condamnable en lui-même. Par exemple : « Un général, enfermé par l’ennemi, et ne trouvant aucun moyen possible de s’échapper, obtient par une capitulation d’emmener ses soldats, à condition qu’il laissera ses armes et ses bagages. Le traité s’exécute. Il a perdu ses armes et ses bagages, mais il a sauvé son armée contre toute espérance. On l’accuse de lèse-majesté. »I ci s’offre une définition. Mais ne perdons point de vue l’objet qui nous occupe en ce moment.
« Il ne devait pas abandonner ses armes et ses bagages ; » voilà l’accusation. Le général répond « qu’il le devait. » La question est : « Le devait-il ? » Il donne pour raison, « que tous ses soldats auraient été égorgés. » On le réfute, ou par cette conjecture : « Ils n’auraient pas été égorgés ; » ou par cette autre « Ce n’était pas là votre motif. » Alors s’offrent ces points à juger : « Auraient-ils été égorgés ? était-ce là le motif de la conduite de l’accusé ? » ou cette alternative, dont nous nous occupons : « Fallait-il laisser périr son armée, plutôt que de livrer ses armes et ses bagages à l’ennemi ? » De là naît le point à juger : « Lorsqu’il fallait perdre son armée, ou souscrire à ce traité, valait-il mieux perdre son armée que de la sauver à ces « conditions ? »
Telle est la manière de traiter une cause de cette espèce. On peut suivre ici la méthode et les préceptes tracés pour les autres questions, et surtout réfuter, par des conjectures, l’alternative qu’établit l’accusé. Vous y parviendrez, en assurant que ce qu’il regarde comme nécessaire ne serait point arrivé s’il n’eût point agi comme il a fait, ou en démontrant que sa conduite a eu d’autres motifs que ceux qu’il avoue, et qu’elle est fondée réellement sur d’autres causes. La défense et la réfutation se prennent également dans la question de conjecture ; ou bien, si l’on qualifie le délit, comme dans cet exemple ou le général est accusé de lèse-majesté, il faut employer la définition et suivre les préceptes que nous avons donnés à ce sujet.
XXV. Il arrive souvent que, dans les causes de cette nature, on est obligé d’employer à la fois les conjectures et la définition. S’il s’y rencontre encore quelque autre genre, il faut également suivre les préceptes de ce genre. En effet, le but principal de l’accusateur СКАЧАТЬ