Название: Toutes les Oeuvres Majeures de Cicéron
Автор: Ciceron
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066373825
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Exposez ensuite cette cause d’alternative comme une cause délibérative, et suivez les règles du genre délibératif ; car, pour nous servir toujours du même exemple : « Toute l’armée devait périr, si l’on n’eût signé ce traité ; valait-il mieux la laisser périr que de le signer ? » Question qu’il faut développer suivant les règles du genre délibératif, comme une chose sur laquelle on vous demande votre avis.
XXVI. Les lieux dans lesquels l’accusateur a puisé les questions qu’il ramène à sa cause, fourniront aussi des armes au défenseur pour réfuter ces mêmes questions ; seulement il suivra une marche opposée à celle de son adversaire dans les lieux qui naîtront de l’alternative elle-même.
Les lieux communs seront, pour l’accusateur, d’exhaler son indignation contre la bassesse ou les inconvénients d’une action que l’accusé avoue honteuse ou funeste, on l’un et l’autre à la fois, en cherchant toutefois à la justifier. Le défenseur répondra qu’on ne peut juger des avantages, des inconvénients, de la bassesse ou de la gloire d’une action, sans en connaître la cause, le temps et l’intention. Ce lieu commun, bien développé, est, dans cette cause, un des plus puissants moyens de persuasion. Le développement de l’importance du service, qui se tire ordinairement de la nécessité, de l’honneur ou de l’utilité de l’action, vous offre un second lieu commun. Un troisième met sous les yeux de l’auditoire une peinture animée, qui lui persuade que, dans les mêmes circonstances, à la même époque et avec les mêmes motifs, il n’aurait pas agi autrement que vous. La récrimination a lieu lorsqu’en avouant le délit on se justifie, en montrant qu’on a été entraîné à le commettre par la faute d’un autre. Par exemple : « Horace, vainqueur des trois Curiaces, après la mort de ses deux frères rentre en triomphe dans la ville. Il voit que sa sœur, sans être affligée de la perte de ses frères, prononce de temps en temps, avec des pleurs et des sanglots, le nom d’un des Curiaces, auquel elle était fiancée. Dans le transport de son indignation,« il la tue. On le cite en justice. »
On l’accuse « d’avoir, sans aucun droit, tué sa soeur. » Il répond « qu’il en avait le droit. » C’est ce qu’il s’agit de décider. Voici son motif : « Elle pleurait la mort d’un ennemi, sans songer à celle de ses frères ; elle détestait ma victoire et celle du peuple romain. » On le réfute, en disant « que son frère ne devait pas néanmoins la tuer, sans qu’elle fût condamnée. » Voici le point à juger : « Horatia, indifférente à la mort de ses frères, pleurait celle des ennemis, et ne se réjouissait point de la victoire de son frère et du peuple romain : son frère avait-il le droit de la tuer, sans qu’elle fût condamnée ? »
XXVII. Dans ce genre de cause, on peut, ainsi que nous l’avons dit pour l’alternative, emprunter aux autres questions ce qui convient à celle que nous discutons. Il faut ensuite trouver, s’il est possible, quelque question qui puisse servir à la défense de celui sur qui l’accusé rejette le crime. On montre d’abord qu’il est moins grave que celui dont l’accusé est coupable. Ensuite, par la récrimination, on fait voir par qui, devant qui, de quelle manière, dans quel temps l’action devait être intentée, le jugement rendu ou la décision de cette affaire prononcée ; on prouve surtout qu’il ne fallait pas que la punition devançât le jugement. Puis on développe les lois et les jugements qui pouvaient punir légalement une faute dont l’accusé s’est déclaré le vengeur de sa pleine autorité. Dites ensuite qu’on doit rejeter toute accusation fondée sur un délit dont l’accusateur lui-même n’a pas voulu attendre le jugement, et regarder comme non avenu ce qui n’a pas été jugé. Insistez sur l’impudence de ceux qui accusent aujourd’hui devant les juges, celui qu’ils ont eux-mêmes condamné sans l’entendre, qui demandent un jugement contre celui qu’ils ont déjà puni. Prouvez qu’il n’y aura plus d’ordre dans les jugements, que les juges excéderont leur pouvoir, s’ils prononcent à la fois et sur l’accusé, et sur celui dont il vient devant eux se faire l’accusateur. Quels désordres ne produira point ce principe, une fois établi, de punir une faute par une autre faute, une injustice par une injustice ! Si l’auteur de l’accusation présente avait voulu suivre l’exemple de l’accusé, il n’aurait pas besoin non plus de jugement ; et si chacun agissait de même, il n’y aurait plus de tribunaux.
Voici un raisonnement que vous pouvez développer encore : Quand même Horatia, sur qui l’accusé rejette son crime, eût été légalement condamnée, était-ce à lui de la punir ? Et s’il ne l’a pas dû, quand elle eût été condamnée, combien est-il coupable de l’avoir fait, sans que personne ait jamais appelé sur elle la justice des tribunaux ! Demandez ensuite qu’il vous montre la loi qui le justifie.
Nous avons dit, en parlant (le l’alternative, que l’accusateur devait mettre tous ses soins à atténuer ce qu’on donne pour alternative. Il faut encore ici comparer la faute de celui sur qui l’on rejette l’accusation, avec le crime de celui qui prétend avoir suivi les règles de la justice. Alors vous aurez soin de démontrer que cette faute n’est point de nature à justifier le crime de l’accusé. Enfin, comme dans l’alternative, arrêtez-vous au point à juger, et développez-le, par l’amplification, suivant les règles du genre délibératif.
XXVIII. Le défenseur, de son côté, réfutera, par les lieux que nous avons indiqués, les moyens tirés des autres questions. Il soutiendra la récrimination, d’abord, en exagérant le crime et j l’audace de celui sur lequel il rejette le délit, en excitant, suivant son sujet, l’indignation ou la pitié par une peinture vive et animée, puis, comparant la faute et le châtiment, il montrera que la peine a été plus légère que ne le méritait le crime. Quant aux autres lieux que l’accusateur aura traités de manière qu’on puisse les rétorquer et les tourner contre lui, (et tels sont les trois derniers qu’il a employés,) suivez, pour les réfuter, une marche contraire à la sienne. La plus solide raison que l’accusateur ait à vous opposer, c’est le désordre général,que causerait le pouvoir de punir un homme qui n’aurait point été condamné : répondez, pour l’affaiblir, que le crime était tel qu’un homme, je ne dis pas vertueux, mais seulement un homme libre, ne devait point le souffrir ; si évident, que le coupable même n’osait essayer de le nier ; tel d’ailleurs, que c’était pour celui qui l’a puni plus que pour tout autre un devoir de le faire ; que la justice et l’honneur exigeaient plutôt qu’il fût puni comme il l’a été, et par celui qui l’a puni, que porté devant les tribunaux ; enfin qu’il a été si public qu’il n’était pas besoin de jugement. Ici vous prouverez, par des raisonnements et des comparaisons, qu’il y a plusieurs crimes si atroces et dont l’évidence est si frappante, qu’il n’est pas nécessaire, qu’il n’est pas même utile, d’attendre que les juges aient prononcé.
L’accusateur aura un lieu commun contre l’accusé qui, ne pouvant nier le délit qu’on lui impute, ose fonder quelque espérance sur le renversement de toute justice. Il démontrera l’utilité des tribunaux ; il plaindra le sort d’un malheureux qui subit le supplice sans avoir été condamné ; il exhalera son indignation contre l’audace et la cruauté de celui qui s’est fait l’exécuteur de ce supplice. Le défendeur s’indignera aussi contre l’audacieux qu’il a puni, et tachera de nous attendrir sur son propre sort. Il ne faut point juger СКАЧАТЬ