Название: Toutes les Oeuvres Majeures de Cicéron
Автор: Ciceron
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066373825
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L’accusateur justifiera, s’il le peut, celui sur qui l’accusé rejette sa faute ; sinon il affirmera qu’elle est étrangère à ce dernier, et personnelle à celui qu’il accuse. D’ailleurs, chacun doit remplir ses devoirs ; et de ce que l’un est coupable, ce n’est pas une raison pour les autres de le devenir. Ensuite, celui sur qui vous rejetez votre cause est -il coupable, accusez-le à part comme je vous accuse, et ne confondez pas votre défense et son accusation.
Quand le défenseur aura traité toutes les questions incidentes, voici la marche qu’il suivra pour le recours. D’abord, il démontrera quel est l’auteur de la faute, et, outre que ce n’est point lui, qu’il n’a pas pu, qu’il n’a pas dû agir comme le prétend l’accusateur. Il ne l’a pas pu, ce qu’il prouvera par les raisons d’intérêt qui embrassent aussi la nécessité. Il ne l’a pas dû, l’honneur s’y opposait. Nous développerons mieux ces deux points, en traitant du genre délibératif. L’accusé a fait tout ce qui était en son pouvoir, et s’il n’a pas fait ce qu’il devait, la faute tout entière retombe sur un autre. Mais, en chargeant ce dernier, n’oubliez point de faire voir tout le zèle et toute la bonne volonté de l’accusé ; prouvez-le par l’empressement qu’on lui a toujours connu pour ses devoirs, par ses discours, par ses actions passées. D’ailleurs, il était aussi utile à ses intérêts de faire ce qu’on lui reproche de n’avoir pas fait, que dommageable de ne le pas faire ; et cette conduite s’accordait bien mieux avec le reste de sa vie, que cette négligence involontaire dont il faut accuser tout antre que lui.
XXX. Si l’on rejette la faute, non sur un homme, mais sur une chose ; si, pour nous servir du même exemple,on répond « que c’est la mort du trésorier qui a empêché de remettre l’argent aux députés, » en retranchant la récrimination, on peut se servir également des autres lieux communs, et prendre dans la concession ou aveu du crime, dont nous traiterons plus bas, ce qu’elle offre de favorable. Les lieux communs sont pour l’une et l’autre à peu près les mêmes que dans les précédentes questions accessoires. Quelques-uns néanmoins sont particuliers à celle-ci comme, l’indignation pour l’accusateur ; et, pour le défendeur, l’injustice qu’il y aurait à le punir d’une faute dont un autre est coupable.
Employer le recours pour rejeter le fait lui-même, c’est nier que l’action dont on nous accuse dépendît de nous en aucune manière, et affirmer que ce n’est point à nous qu’il faut attribuer ce qu’elle peut avoir de criminel. En voici un exemple : « Autrefois, lors de la conclusion d’un traité avec les Samnites, un jeune patricien fut chargé par le général de tenir la victime. Le sénat refusa de ratifier ce traité ; on livra aux ennemis le général, et un sénateur fut d’avis qu’il fallait aussi livrer celui qui avait tenu la victime. » - « » Il faut le livrer, » dit l’accusateur. « Il ne le faut pas, » répond le défenseur. « Le faut-il ? » voilà la question. « Il n’y a point de ma faute, dit le jeune homme pour se justifier ; mon âge et ma condition privée ne me donnaient aucun pouvoir, surtout en présence du général qui, revêtu d’une magistrature et d’une autorité suprême, devait juger si le traité était honorable ou non. » On le réfute ainsi : « Puisque vous avez pris part aux cérémonies religieuses qui consacrent un traité honteux, vous devez être livré. » - Voici le point à juger. « Un particulier, sans nul caractère public, qui, par l’ordre du général, a pris part au traité, et à toutes les cérémonies dont fut accompagné cet acte religieux, doit-il ou non être livré aux ennemis ? » - Ce qui distingue ces deux genres de cause, c’est que dans le premier, l’accusé accorde qu’il aurait dû faire ce que veut l’accusateur ; mais, sans employer la concession, il attribue à quelque chose ou à quelqu’un la cause qui a enchaîné sa volonté : nous montrerons bientôt que la concession emploie (les moyens plus victorieux. Dans le second, au contraire, il ne doit pas accuser un autre, mais démontrer que le fait n’est pas ou n’était pas en sou pouvoir, et ne le regardait nullement. Alors il arrive souvent que l’accusateur intente son accusation par le recours ; comme si, par exemple, « on mettait en justice un citoyen qui, pendant sa préture, quoique les consuls fussent à Rome, aurait appelé le peuple aux armes pour quelque expédition. » En effet, de même que dans l’exemple précédent, l’accusé déclarait que le fait n’était point en sa puissance, et que son devoir ne lui prescrivait pas de l’éviter : ainsi, dans la cause présente, l’accusateur appuie son accusation, en démontrant que le fait n’était point du ressort de celui qu’il accuse, et que son devoir ne lui prescrivait point de s’en charger. Chacune des deux parties doit chercher, par tout ce que fournit l’honneur et l’intérêt, par des exemples, des indices et des raisonnements, à établir ses devoirs, ses droits, son pouvoir, et examiner si sur tous ces points chacun a exercé des fonctions qui lui appartiennent. La nature du fait indiquera s’il faut employer les lieux communs de l’indignation ou du pathétique.
XXXI. La concession ou l’aveu du crime a lieu lorsque l’accusé, sans se justifier sur le fait, supplie qu’on lui pardonne. Il emploie le défaut d’intention et la déprécation. Par le défaut d’intention, il ne cherche point à se justifier du fait, mais de l’intention ; et alors il peut alléguer pour excuse l’ignorance, le hasard ou la nécessité.
Par l’ignorance, l’accusé assure qu’il ne connaissait pas telle ou telle chose. Voici un exemple de cette espèce de justification : « Un peuple avait défendu d’immoler des veaux à Diane. Des matelots, pendant une tempête, firent vœu, s’ils pouvaient entrer dans un port qu’ils apercevaient, d’immoler un veau à la divinité qu’on y adorait. Sur le port se trouvait par hasard le temple de cette Diane, à laquelle on ne pouvait. immoler des veaux. Les matelots débarquent, et, ne connaissant pas la loi, accomplissent leur vœu ; on les accuse. » - « Vous avez immolé un veau à Diane ; ce sacrifice était défendu, » dit l’accusateur. « Oui, mais nous l’ignorions, » répondent-ils en se justifiant par la concession ou l’aveu du crime. — On les réfute en disant : « Qu’importe ? puisque vous avez fait ce qui était défendu, la loi veut que vous soyez punis. » - Il s’agit de décider « si celui qui a enfreint une loi qu’il ne connaissait pas a mérite le châtiment. »
On allègue le hasard, quand on veut prouver que des événements imprévus se sont opposés à notre volonté. « A Lacédémone, la loi condamnait à mort celui qui s’était chargé de fournir les victimes pour certains sacrifices, s’il manquait à ses engagements. A l’approche d’un jour de fête où ces sacrifices devaient été célébrés, celui qui avait pris sur lui cette charge se disposait à faire conduire les victimes à la ville, quand tout à coup l’Eurotas, fleuve qui coule près de Sparte, gonflé par des pluies extraordinaires, se déborde avec tant de violence, qu’il fut impossible de faire passer les victimes. Le fournisseur, pour prouver sa bonne volonté, range toutes les victimes sur la rive, de manière qu’on pouvait les apercevoir de l’autre bord. Chacun était convaincu que le débordement du fleuve avait seul arrêté le zèle de cet homme : néanmoins on intente contre lui une accusation « capitale. » - On l’accuse « de n’avoir pas fourni les СКАЧАТЬ