Название: Toutes les Oeuvres Majeures de Cicéron
Автор: Ciceron
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066373825
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XLII. La réfutation détruit, ou du moins affaiblit par des arguments les assertions de l’adversaire. Elle puise aux mêmes sources que la confirmation ; car les mêmes lieux qui servent à confirmer une chose peuvent servir aussi à l’infirmer. Il ne faut doue encore ici considérer que les choses et les personnes ; et l’on peut appliquer à cette partie de l’éloquence les préceptes que nous avons tracés sur la manière de trouver et d’établir des arguments. Néanmoins, pour donner une théorie sur ce sujet, nous développerons les différentes espèces de réfutations : suivez ces principes, et vous détruirez, ou vous affaiblirez du moins sans peine toutes les objections de vos adversaires.
On réfute un raisonnement en n’accordant pas une ou plusieurs des choses que renferment les prémisses ; ou, si l’on accorde les prémisses, en niant la conclusion qu’on en tire, ou en montrant que le genre même du raisonnement est vicieux ; ou en opposant à une raison solide une objection aussi forte, ou même plus solide encore. Voulez-vous ne pas accorder à votre adversaire ce qu’il avance d’abord, niez que ce qu’il établit comme probable ait la moindre vraisemblance ; niez que ses comparaisons offrent le moindre rapport avec te sujet ; donnez un autre sens aux jugements qu’il cite, ou condamnez-les absolument ; rejetez ce qu’il regarde comme des indices ; attaquez sa conséquence sous un ou plusieurs rapports ; démontrez que son énumération est fausse, ou, s’il emploie une simple conclusion, prouvez qu’elle manque de justesse ; car ce sont là, comme nous l’avons enseigné ci-dessus, les lieux où l’on puise tout ce qui peut rendre un fait probable ou nécessaire.
XLIII. On réfute une chose donnée pour probable, soit quand elle est d’une fausseté évidente, comme : « Il n’est personne qui ne préfère l’argent à la sagesse ; » soit quand le contraire est aussi probable : « Pour qui le devoir n’est-il pas plus sacré que l’intérêt ? » soit lorsqu’elle est tout à fait incroyable ; par exemple « Qu’un homme d’une avarice reconnue a, sans motifs importants, négligé un gain considérable ; » ou bien si l’on généralise ce qui n’est vrai que de certains individus ou de certaines choses ; comme : « Tous les pauvres préfèrent l’intérêt au devoir.— Ce lieu est désert ; c’est là qu’on a dû commettre le meurtre. — Comment un homme a-t-il pu être tué dans un lieu fréquenté ? ou si l’on regarde comme impossible ce qui n’arrive que rarement, comme Curion, dans son discours pour Fulvius : « La vue seule d’un objet, un coup d’œil, ne suffisent pas pour inspirer de l’amour. »
Pour les indices, les mêmes lieux qui servent à les établir, serviront à les attaquer. lI faut d’abord en démontrer la vérité ; puis, qu’ils sont propres à la chose dont il s’agit, comme, k sang est l’indice d’un meurtre ; ensuite prouver qu’oit a fait ce qu’on ne devait pas faire, ou qu’on n’a pas fait ce qu’on devait faire ; que l’accusé était sur ce point parfaitement instruit de la loi et de la coutume ; car tout cela appartient aux indices. Nous en parlerons avec plus d’étendue quand nous traiterons particulièrement de la question de conjecture. Il faut donc, dans la réfutation, démontrer que chacun de ces indices ne prouve rien ; qu’il est peu important, qu’il fait plus pour nous que pour nos adversaires, qu’il est absolument faux, ou même qu’il pourrait conduire à d’autres soupçons.
XLIV. Votre adversaire a-t-il établi une comparaison, il cherche entre deux faits ou deux causes des rapports que vous devez détruire pour le réfuter. Vous y réussirez en montrant des différences frappantes dans le genre et la nature, la force et la grandeur, le temps et le lieu, les personnes et l’opinion ; en appréciant, en remettant chacune à sa place des choses qu’on vous présente comme semblables. Faites ensuite ressortir les différences, et concluez que l’on doit juger bien différemment ces deux faits ou ces deux causes. Vous trouverez surtout l’occasion d’employer ces moyens, lorsque vous aurez à détruire quelque raisonnement fondé sur l’induction.
Si l’on vous oppose quelque jugement antérieur, comme on ne manque pas de le fortifier de l’éloge de ceux qui l’ont rendu, des rapports qui se trouvent entre les deux affaires, de ce que, loin d’être contredit, il a été généralement approuvé,enfin de son importance et des difficultés qu’il présentait, bien supérieures à celles qui se rencontrent dans l’affaire dont il s’agit, on ne peut l’infirmer que par des lieux contraires, si la vérité ou du moins la vraisemblance le permettent. Ayez soin surtout de prendre garde si par hasard le jugement cité n’offre aucun rapport avec votre affaire ; évitez enfin, avec la plus grande attention, de vous appesantir sur un jugement où les mêmes juge aient commis quelque faute ; car on pourrait croire que vous voulez juger les juges eux-mêmes. N’allez pas non plus, quand un grand nombre de jugements prononcent contre vous, en choisir un seul, et qui ne tombe que sur une espèce rare, pour l’opposer à vos adversaires ; car ce serait leur donner les armes plus fortes pour infirmer l’autorité de la chose jugée. Telle est la manière de répondre aux arguments qui établissent la probabilité.
XLV. Il n’est pas difficile de réfuter un argument qui n’a que la forme d’un raisonnement rigoureux, sans en avoir la justesse ; et voici comme il faut s’y prendre. Si le dilemme, qui vous presse également des deux côtés, est vrai, n’y répondez pas. Est-il faux, on le réfute de deux manières : par la rétorsion, ou en infirmant l’une des deux propositions. Exemple de la rétorsion :
S’il a de la pudeur, pourquoi accuser un homme de bien ? S’il porte un cœur inaccessible à la honte, pourquoi accuser un homme qui s’inquiétera peu de vos reproches ?
Ainsi, qu’on le suppose vertueux ou incapable de pudeur, on conclut qu’il ne faut pas l’accuser. Vous rétorquez l’argument en disant : « C’est au contraire une raison pour l’accuser ; car s’il conserve encore quelque pudeur, accusez-le : il ne méprisera point votre accusation. A-t-il perdu toute pudeur, accusez-le, puisqu’il n’est pas vertueux. » Vous pouvez encore infirmer l’une des deux propositions : « S’il a conservé quelque pudeur, l’accusation pourra le ramener n dans le sentier de la vertu. »
Une énumération est vicieuse, quand vous pouvez répondre qu’on a passé sur quelque chose que vous voulez accorder, ou qu’on y a compris des raisons faibles, que vous pouvez tourner contre votre adversaire, ou que vous n’avez pas de motif raisonnable de ne pas accorder. Par exemple, voici une énumération qui n’est pas complète : « Puisque vous avez ce cheval, ou vous l’avez acheté, ou vous l’avez acquis par héritage, ou il vous a été donné en présent, ou il est né dans votre maison ; ou, si rien de tout cela n’est vrai, il faut que vous l’ayez dérobé. Or, vous ne l’avez ni acheté ni acquis par héritage ; il n’est point né chez vous, on ne vous l’a point donné en présent ; donc il faut que vous l’ayez dérobé. » ll est facile de réfuter ce raisonnement, si vous pouvez dire que ce cheval a été pris sur l’ennemi, et que vous l’avez reçu dans le partage du butin. Vous renversez toute l’énumération en rétablissant ce qu’elle avait omis.
XLVI. Vous pouvez encore attaquer une des parties de l’énumération, si vous êtes en mesure de le faire, et prouver, pour nous en tenir à l’exemple déjà cité, que vous avez eu ce cheval par héritage. Vous pouvez enfin convenir d’une chose qui n’a rien de honteux. Qu’un adversaire vous dise : « Ou vous méditiez une trahison, ou vous étiez guidé par la cupidité, ou vous aviez trop de complaisance pour un ami ; » pourquoi n’avoueriez-vous pas que vous avez agi par complaisance pour un ami ?
On peut réfuter une conclusion simple quand la conséquence n’est pas la suite nécessaire des antécédents. Si vous dites : « Cet homme respire, donc il vit. Le soleil brille, donc il fait jour, » le rapport de l’antécédent et du conséquent est sensible. Mais si vous dites : « Elle est mère, donc elle aime ses enfants ; — Il a commis quelques fautes, СКАЧАТЬ