Название: Toutes les Oeuvres Majeures de Cicéron
Автор: Ciceron
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066373825
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XXIII. J’insiste sur cette règle, parce que la division des genres, une fois clairement établie, aide beaucoup à la justesse. En effet, l’orateur qui dit : « Je montrerai que les passions, l’audace l’avarice de mes adversaires, sont la source de tous les maux de la république, » ne s’aperçoit pas que dans sa division il confond le genre et les espèces. Passion est genre pour tous les désirs déréglés de l’âme, et l’avarice est évidemment une de ses espèces.
Évitez donc, surtout dans une division, de joindre au genre une de ses parties, comme un genre différent. Que si le genre comprend plusieurs espèces, contentez-vous de l’exposer d’abord dans la division de la cause, pour le développer à loisir, quand la marche de votre discours vous aura conduit à ce point. La justesse nous apprend encore à ne pas promettre de prouver plus qu’il ne faut ; à ne pas dire, « Je démontrerai que mes adversaires ont eu le pouvoir et la volonté de n commettre ce délit, et qu’ils l’ont commis : » il suffit de prouver qu’ils l’ont commis. La cause est-elle assez simple pour ne point admettre de division, gardez-vous de vouloir diviser ; mais ce cas est extrêmement rare.
Il est encore d’autres préceptes sur la division ; préceptes qui n’appartiennent pas proprement à l’art oratoire, mais qui s’appliquent aussi à la philosophie, à qui nous avons emprunté en ce genre tout ce qu’elle nous offrait d’utile, et que nous n’avons trouvés dans aucune autre rhétorique.
Quelque sujet que vous traitiez, souvenez-vous toujours de ces principes de la division, et suivez dans la marche du discours l’ordre qu’elle aura une fois établi. Quand chacune des parties sera développée, songez à terminer votre discours ; vous n’avez plus à ajouter que la conclusion. Voyez, dans l’Andrienne de Térence, comme Simon, quand il expose ses desseins à son affranchi, établit en peu de mots et avec clarté sa division :
Ainsi tu connaîtras la conduite de Pamphile, unes desseins, et ce que j’attends aujourd’hui de ton zèle.
Il ne s’écarte point dans son récit de l’ordre établi dans sa division ; il commence par la conduite de son fils :
Lorsqu’il sortit de l’adolescence, mon cher Sosie, je lui laissai plus de liberté.
Ensuite il expose son dessein :
Maintenant je voudrais…
Il termine par la dernière partie de sa division, ce qu’il attend de Sosie :
Ce que j’attends aujourd’hui de toi
Ainsi nous devons, à son exemple, traiter successivement, et dans l’ordre que nous nous sommes tracé, chacun des points établis dans la division, et terminer quand ils sont tous développés. Nous allons maintenant donner les règles de la confirmation, puisque notre sujet nous y conduit naturellement.
XXIV. La Confirmation persuade l’auditeur par le raisonnement, établit la vérité de la cause, et trouve les preuves qui la font triompher. Elle a pour base des principes certains, que nous classerons suivant les différents genres de causes. Toutefois il n’y aura pas, ce me semble, d’inconvénient à exposer d’abord pêle-mêle, et sans ordre, tout ce qui a rapport à ce sujet, et à montrer ensuite comment on doit tirer de cette espèce d’arsenal des raisonnements pour chaque genre de cause.
Tous les raisonnements naissent des choses ou des personnes. Nous regardons comme attachés aux personnes le nom, la nature, le genre de vie, la fortune, la manière d’être, les affections, les goûts, les desseins, la conduite, les événements et les discours. Le nom est le mot propre et distinctif assigné à chaque personnage, le terme habituel dont on se sert pour l’appeler. Quant à la nature, il est difficile de la définir : il sera plus court de faire l’énumération de celles de ses différentes parties dont nous avons besoin pour ces préceptes.
Entre ces parties, les unes embrassent les dieux, les autres, les mortels. Les hommes et les animaux composent les mortels. Dans les hommes, on considère le sexe, masculin ou féminin ; la nation, la patrie, la famille et l’âge : la nation, si l’accusé est Grec ou Barbare ; la patrie, d’Athènes ou de Sparte ; la famille, quels sont ses parents, ses aïeux ; l’âge, s’il est dans l’enfance, dans la jeunesse, dans l’âge mûr ou dans la vieillesse. Ajoutez encore tous les avantages ou les défauts que l’âme et le corps tiennent de la nature : la force, la faiblesse, la grandeur, la petitesse, la beauté, la laideur, la lenteur, la légèreté, la pénétration, la stupidité, la mémoire, la douceur, l’empressement à obliger, la pudeur, la patience, et les défauts opposés. En un mot, considérez dans la nature tout ce que, pour l’âme et le corps, nous tenons de la nature ; car tout ce que donne l’application se rapporte à 1a manière d’être, dont nous parlerons bientôt.
XXV. Dans le genre de vie, considérez comment, par qui, d’après quels principes un homme a été élevé, quels maîtres il a eus pour les arts et pour la morale, quelles sont ses liaisons, quelle est sa profession, son art, son commerce, comment il gère ses affaires, enfin quel il est dans son intérieur.
Dans la fortune, on cherche s’il est riche ou pauvre, libre ou esclave, homme privé ou puissant ; puissant, s’il doit son élévation à son mérite ou à l’intrigue ; s’il est environné de gloire, comblé des faveurs de la fortune, ou dans la honte et le malheur ; quels sont ses enfants ; enfin, s’il ne s’agit pas d’un homme vivant, on peut considérer quel a été son genre de mort.
On appelle manière d’être, quelque perfection physique ou morale,comme une vertu qui ne se dément point, une connaissance approfondie d’un art ou d’une science, ou quelque avantage corporel, que nous devons moins à la nature qu’à l’art et à l’étude.
Les affections sont les changements soudains qu’éprouvent l’âme et le corps, comme la joie, le désir, la crainte, le chagrin, la maladie, l’abattement, et tout ce qui dépend du même genre. Le goût est une volonté fortement prononcée, une application continuelle et soutenue, à la philosophie, par exemple, à la poésie, à la géométrie, aux lettres. Le dessein est un plan arrêté pour faire ou ne pas faire telle ou telle chose. Pour la conduite, les événements et le discours, ils peuvent être envisagés sous le triple apport du passé, du présent et de l’avenir. Voilà pour ce qui concerne les personnes.
XXVI. La substance même du fait, les accessoires, les circonstances et les conséquences, voilà ce qu’il faut considérer dans les choses. La substance du fait constitue le fait en lui-même ; elle en est inséparable. On caractérise d’abord le fait dans son ensemble, et l’on n’a besoin pour cela que de peu de mots qui exposent le fait même. Par exemple : il s’agit d’un parricide, d’un crime de haute trahison. On cherche ensuite la cause, les motifs et les moyens ; on reprend tout ce qui a précédé le fait jusqu’au moment de l’exécution ; on examine toutes les circonstances qui l’ont accompagné, et enfin СКАЧАТЬ