Un diplomate luxembourgeois hors pair. Paul Schmit
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Название: Un diplomate luxembourgeois hors pair

Автор: Paul Schmit

Издательство: Автор

Жанр: Биографии и Мемуары

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isbn: 9782919792009

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СКАЧАТЬ de se frayer un chemin rien qu’à eux avec au moins la satisfaction de tout devoir conquérir à partir de leur propre énergie et enthousiasme. Comme la tribu du fer luxembourgeois des Metz et les Le Gallais, les Velluti et plus encore les Nani Mocenigo avaient à leur disposition des demeures formidables. Madame Le Gallais et sa sœur, la comtesse Marino Nani Mocenigo, étaient en 1947 copropriétaires d’un immeuble désigné sous le nom « Palais Bellaviti » situé au Campo San Maurizio. Le bâtiment était occupé depuis la fin de la guerre par une organisation rattachée au gouvernement italien et désignée sous le nom « Ente Nazionale post-Bellica », qui n’avait plus payé de loyer depuis trois ans. En décembre 1947, le couple Le Gallais souhaitait occuper un des deux appartements du palazzo et entreprit des démarches assidues impliquant même le ministre des Affaires étrangères luxembourgeois, Joseph Bech, et son homologue italien, Carlo Sforza. Le chef du protocole italien Taliani, l’ambassadeur d’Italie à Washington Tarchiani, le préfet de Venise Gargiulo, le gouverneur de la province de Venise et le consul luxembourgeois à Venise Bartolomé Bellati sont également intervenus dans ce dossier. Les Le Gallais comptaient désormais y faire des séjours prolongés chaque année. Le palais à Venise a finalement été restitué à la famille le 1er décembre 1950. En fait, les deux sœurs Velluti ont souhaité récupérer le Palazzo San Maurizio pour permettre aux Le Gallais de le vendre et d’acheter avec leur part le palais en face du Ca’ del Duca sur lequel nous allons revenir plus loin. Les deux couples et surtout les deux sœurs vivaient en bonne intelligence et l’unité régnait dans cette famille.

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      En attendant, pour la plus jeune des sœurs Velluti la vie à deux allait commencer loin de sa ville natale avec un quasi inconnu duquel elle ne connaissait pas grand-chose. Aimant être entourés et plutôt sociables, les Le Gallais constituaient un couple vivant en osmose et uni par une affection solide. Ils menaient une vie de famille paisible mais jamais monotone. De nombreuses photos témoignent de souvenirs passés, presque oubliés aujourd’hui, et toujours préservés soigneusement dans de nombreux albums photos à Venise. Hugues était apparemment formel et un peu exigeant voire dur à l’égard de sa femme, celle-ci le soutenant là où elle pouvait. C’était Pisana qui écrivait les invitations et les menus pour les grands dîners. Un mutuel sens de la division des tâches prévalait. Elle avait un caractère latin qu’on qualifierait de « fiery », alors que lui restait souvent silencieux, semblant avoir du mal à exprimer ses sentiments. Fort exigeant en matière d’étiquette et de protocole, Hugues semble avoir été susceptible s’il devait faire face à des critiques un tant soit peu injustes. Avec doigté et distinction, sans se perdre dans un verbiage inutile, il savait imposer sa vision des choses. Il s’exprimait toujours de manière réfléchie et se qualifiait de tolérant et de vaillant.

      De sa jeunesse, Hugues semble n’avoir gardé que peu d’amis qui l’ont accompagné tout au long de son parcours. Les liens familiaux dominaient quasiment toujours et conditionnaient, la plupart du temps, les connaissances et amitiés d’Hugues Le Gallais. Une relation amicale semble avoir duré, celle avec Georges Brasseur, qui a travaillé pendant un certain temps à Marrakech. Des liens divers unissaient Hugues à ce Brasseur né en 1894 et décédé deux ans plus tard qu’Hugues en 1966. Il s’agit du fils du député Xavier Brasseur et de son épouse Jeanne de Saint-Hubert. Ce couple avait divorcé en 1910, la mère de Georges épousant par la suite le cousin germain de son père. La mère de Georges Brasseur était la fille de l’industriel Xavier de Saint-Hubert-Mongenast et la sœur d’Aline Mayrisch-de Saint-Hubert. Georges Brasseur s’est marié en 1922 avec Annette Mayrisch, petite-fille d’une Metz et donc parente d’Hugues. Ingénieur, l’ami Brasseur a été directeur et administrateur de la Compagnie des Mines et Métaux et attaché à la direction générale de l’Arbed.56 Cet ami d’Hugues Le Gallais a fait l’objet d’un courrier du ministre de la Justice Victor Bodson57 du 28 mai 1941. Georges Brasseur était venu en mai 1941 aux Etats-Unis « muni de papiers délivrés par les autorités allemandes qui lui ont fait défense de voir la Grande-Duchesse ou un membre du Gouvernement mais que sur requête spéciale de Brasseur il a été autorisé à vous [Hugues Le Gallais] voir comme ancien ami d’études… la visite intéresse quant aux questions exposées par le gouvernement… » Contacts plutôt confidentiels donc au beau milieu de la guerre. Brasseur était de retour à Washington en janvier 1942 où il rencontra Dupong et se rendit pour affaires en Ohio en mars. Lors de cette visite, il fut arrêté et Le Gallais dut intervenir auprès du Federal Bureau of Investigation (FBI). Une importante caution fut versée afin de mettre fin aux soupçons à l’encontre de Brasseur qui avait été considéré comme militaire et était porteur de lettres en allemand, le rendant suspect d’après Heisbourg.58 L’ami Brasseur était encore à Washington en janvier 1944 et a remis une note sur la sidérurgie expliquant les difficultés d’un sabotage dans un petit pays, ce qui allait encore avoir son importance plus tard pour expliquer l’attitude de l’Arbed et d’Aloyse Meyer durant la guerre. Au cours de la guerre, Brasseur a rejoint l’effort allié dans le rang des forces américaines, pas au front mais dans la fonction G2 (sécurité et intelligence) du Département de la Guerre.59 À Luxembourg, un autre couple figurait parmi les connaissances des Le Gallais. C’était le couple des Alexandre, la fille desquels, Madeleine, allait épouser Robert Flesch60 qui avait épousé en premières noces une Leclère, décédée jeune en 1915, nièce d’Emile Mayrisch et cousine des Le Gallais du côté des Metz. Ce n’est qu’à Washington que les Le Gallais allaient se faire de vrais amis, comme les époux Maurice Frère ou certains collègues ambassadeurs avec lesquels ils allaient rester en contact même au-delà de leur retraite. À Venise, Pisana n’avait plus trop de liens en dehors de sa famille, et après leur retour de Washington en 1958, les vraies amitiés s’y faisaient de plus en plus rares pour Hugues qui ne maîtrisait pas assez bien la langue italienne. Des résidents vénitiens en vue, comme Élie Ludovic Henri Christian Decazes,61 5e duc Decazes, propriétaire du Palais Contarini Polignac, ou l’héritière et collectionneur d’art moderne, Peggy Guggenheim,62 étaient presque des voisins, mais il est difficile de savoir s’ils étaient également devenus des amis. Ainsi va la vie des diplomates qui, la plupart du temps, perdent beaucoup d’attaches et d’amitiés en cours de route. Il y avait aussi le couple Curtis, issu d’une vieille famille de Boston, qui avait acheté le beau Palais Barbaro sur le Grand Canal, en face du Palais Polignac, qui menait une vie culturelle et artistique intéressante. Dans la mesure du possible, on restait entre soi, soignant des liens d’amitié nombreux et divers mais toujours choisis avec soin.

      Les deux rejetons de familles bourgeoises voire aristocratiques étaient liés non seulement par tous les talents de la jeunesse alliée à l’ambition, mais encore et surtout par le fait qu’ils voulaient échapper à des situations familiales compliquées, notamment en raison du remariage de leurs pères respectifs. L’entente avec les belles-mères de l’un et de l’autre n’était guère optimale et ni Luxembourg ni Venise ne retenaient suffisamment les deux audacieux qui, sans trop hésiter, ont pris le grand large. Hugues connaissait le grand monde et le grand jeu de la vie, et Pisana allait combler son indicible enthousiasme pour les contrées exotiques et son ambition de poursuivre une carrière somme toute prometteuse. Pisana est décrite par d’aucuns comme très gentille mais ne sachant pas faire le ménage.

      Et les voilà partis pour le Japon. Pour les déplacements des jeunes Le Gallais, l’avion, cette fabuleuse conquête de l’air par l’homme, ne semble pas avoir été à portée de mains. Pisana n’a d’ailleurs utilisé ce moyen de déplacement qu’une seule fois de sa vie pour se rendre à Cuba, Hugues peut-être aussi pour se rendre au Mexique, mais pas si souvent que cela leur aurait été possible avec une aviation qui n’en était plus à ses débuts mais toujours considérée comme dangereuse. L’automobile était inexistante et impossible à utiliser à Venise, de sorte que la quasi-exclusivité de leurs déplacements ont été entrepris en train et en bateau. En tout cas, au seuil de leur vie nouvelle, une page aventureuse allait s’ouvrir pour Pisana et Hugues. Le couple allait mener une vie de rêve en faisant habilement СКАЧАТЬ