Les protestants à Nimes au temps de l'édit de Nantes. Boulenger Jacques
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СКАЧАТЬ afin de les réunir en «assemblée mixte des trois corps» avec les deux consistoires «vieux» et «nouveau245». Au temps de l’édit de Nantes, on convoque aussi ces assemblées, ou «consistoires extraordinaires246», pour décider l’imposition des deniers du ministère247. Le consistoire ne trouve sans doute pas inutile de s’adjoindre les notables de la ville pour sanctionner une décision aussi désagréable aux habitants que celle-là248. D’ailleurs, il réunit des assemblées mixtes au sujet du «logement des pouvres249», du collège et «rectorat d’icelluy250», et de tous les événements importants.

      D’autres personnes que les consuls, les magistrats et les anciens vieux et nouveaux y prennent part: des «docteurs et advocatz251» généralement, mais aussi des «bourgeois et marchans252». Le nombre des assistants varie beaucoup. L’assemblée la plus nombreuse que j’aie trouvé comprend le juge criminel Daniel de Calvière, quatre conseillers, le lieutenant particulier de viguier, le lieutenant de juge ordinaire, les quatre consuls, deux ministres, huit avocats, dont quelques-uns membres du consistoire, un noble, et six bourgeois, anciens ou non253. Elle se tient au temple, comme presque tous les consistoires extraordinaires254; j’en note un, cependant, qui a lieu «en la maison de M. le Juge Criminel255». C’est ce magistrat qui préside toujours quand il est présent256; en son absence, c’est l’un des pasteurs257.

      Les délibérations des assemblées mixtes ne devaient pas être inscrites dans le livre du consistoire, ou tout au moins n’avaient pas la valeur officielle d’«actes consistoriaux». C’est ce que montre un intéressant jugement du synode provincial de Nîmes par députés, en 1599, rendu au sujet d’un incident grave survenu entre le célèbre jurisconsulte Julius Pacius de Beriga et un professeur de logique du collège de Nîmes, Robert de Vismes258. Pacius avait fait extraire du registre du consistoire, avec le consentement des anciens, puis imprimer et publier, le procès-verbal d’une assemblée mixte tenue en avril 1598. Cette affaire fut portée au synode qui censura «griefvement» le consistoire de Nîmes «d’avoir faict coucher» dans son livre «la conclusion d’une assemblée mixte259», et envoya même deux ministres inscrire en marge du procès-verbal en question la note suivante: «Déclairons ce présent acte… estre d’une assemblée mixte et non consistoriale, et pourtant n’en pouvoir estre despêché aucun extraict portant tiltre des actes consistoriaulx260». Ainsi s’établit bien nettement la différence entre les assemblées régulières, faites suivant la Discipline, et ces assemblées mixtes qui sont parfaitement autorisées, mais non reconnues officiellement. A Nîmes, on continue d’ailleurs, après l’incident soulevé par Pacius, à inscrire dans le registre les procès-verbaux d’assemblées mixtes261, comme on l’a toujours fait, mais, sans doute, on ne leur donne plus la valeur d’actes consistoriaux.

      Le «Livre» du consistoire devait, selon la Discipline, conserver la mémoire des fautes qui, «étant conjointes avec rebellion, auroient esté censurées de la suspension de la Cène ou excommunication»; et les autres devaient théoriquement en être effacées262. En outre, on y inscrivait les «décharges» des receveurs des deniers lorsque leurs comptes avaient été arrêtés263, les «accords» faits par l’église avec les pasteurs264, etc. C’était donc un témoin officiel pour l’église, comme les registres de baptêmes et de décès. On pouvait en certains cas délivrer copie d’actes consistoriaux265 pour servir de témoignages, d’attestations. Ceci explique pourquoi le synode prov. de Nîmes tenait à maintenir bien nette la différence entre un acte consistorial, procès-verbal d’une séance tenue selon les prescriptions de la Discipline, et une simple relation authentique d’assemblée mixte.

      Il était utile d’exposer en détail la composition et le fonctionnement du consistoire, car il faut bien connaître cette assemblée, pour saisir comment elle remplit les deux fonctions si importantes qui lui reviennent et qu’elle partagea à l’origine entre ses diacres et ses anciens: 1o obtenir des subsides, 2o diriger la vie «de ceux qui sont du corps de l’église266».

      C’est par le consistoire, en effet, que le protestantisme officiel communique avec la foule des fidèles. Les Nîmois entendent bien parler du synode, mais cette assemblée est pour eux solennelle et lointaine, au lieu qu’ils voient, qu’ils connaissent leurs anciens. Or, la popularité des consistoires est nécessaire à la force du parti: si leur influence périclite, les assemblées supérieures vont se trouver «en l’air», si je puis dire. Je montrerai plus loin qu’à Nîmes, il n’en est rien, et que le pouvoir du consistoire sur les fidèles fait de ceux-ci des soldats disciplinés, et tout prêts à suivre les instructions que les chefs du parti leur donneront.

      III

      LES FINANCES DU CONSISTOIRE

      Les comptes du «receveur des deniers de l’église» et du «receveur des deniers des pauvres».

      Deniers des pauvres: Recettes. Qui on assiste. Secours en nature. Tableau des secours délivrés par le consistoire de Nîmes entre janvier et mars 1596. Visites de charité. Surveillance de l’hôpital des pauvres.

      Deniers de l’église: Dépenses. Recettes: les imposés; la levée des rôles. Églises «ingrates». Pension payée à l’église par la ville.

      Il reste maintenant à étudier les finances du consistoire de Nîmes et à montrer quels étaient ses revenus. Il lui en fallait d’importants pour subvenir aux dépenses qui lui étaient imposées: entretien des pasteurs et des proposants, gages de l’avertisseur et des autres fonctionnaires, aumônes, pensions aux nouveaux convertis, enfin dépenses des synodes et colloques, car chaque église doit solder les frais de ses députations aux assemblées ecclésiastiques. En matière de finances, comme en tout le reste, ce sont les consistoires qui forment la base de l’édifice protestant: sans leur argent, pas d’assemblées, et toute la hiérarchie du parti se trouve désagrégée.

      A Nîmes, le budget de l’église se divise en deux parts distinctes: les «deniers de l’église» et les «deniers des pauvres».

      Chacune a son «receveur», son banquier, choisi chaque année parmi les membres du consistoire, le plus souvent un ancien267. Une délibération du 31 janvier 1601 montre que le receveur des deniers du ministère touchait à cette époque des gages de 100 l.; mais c’est le seul renseignement que j’aie trouvé sur ce point268.

      Les receveurs ne devaient délivrer aucune somme que sur la présentation de «mandements», tirés sur eux par les anciens269. Et à l’expiration de leur charge, chaque année, il fallait qu’ils rendissent compte de leur gestion devant une commission nommée par le consistoire270.

      Le СКАЧАТЬ



<p>245</p>

Borrel, Hist. de l’église réformée de Nîmes, p. 61.

<p>246</p>

«…En consistoyre y assemblé extraordinairement» (Délib. du 5 mars 1600, fo 331). Etc.

<p>247</p>

V. délib. du 16 octobre 1596 (fo 131); du 18 octobre 1596 (fo 132); du 13 janvier 1599 (fo 259); etc.

<p>248</p>

Voyez ci-dessous, au chap. III, combien difficilement se faisait la levée des rôles d’imposition.

<p>249</p>

Délib. du 11 décembre 1596 (fo 144).

<p>250</p>

Délib. du 18 octobre 1596 (fo 132).

<p>251</p>

Ainsi, le 11 novembre 1599, le consist. extraordinaire se compose de 2 magistrats, 2 consuls, 5 avocats, et sans doute les anciens et pasteurs qu’on ne mentionne pas (fo 309.) – «…On fera assamblée demain judy à midy, par MM. les magistratz, consulz, advocatz et consistoire vieux et nouveau…» (Délib. du 4 juin 1597, fo 182).

<p>252</p>

«Du vendredy 25esme jour du moys de décembre, le consistoire vieulx et nouveau assemblé par devant MM. de Calvière, juge criminel, Des Martins, conseiller, de Rozel, Martin et Lombard, consulz de la ville de Nismes, MM. Challas, A. Davin, Mazaudier et plusieurs autres bourgeois et marchans» (fo 255).

<p>253</p>

A la date du dimanche 5 mars 1600 (fo 331). Elle nomme une députation extraordinaire au syn. prov. d’Uzès «pour requérir… de pasteur».

<p>254</p>

Par exemple, celui que je cite note 1. «La compagnie que sera convoquée et assamblée au présant temple sur l’imposition» des deniers du ministère (Délib. du 16 octobre 1596, fo 131). V. encore à la date du 10 mai 1601 (fo 411).

<p>255</p>

Le 8 avril 1601 (fo 404).

<p>256</p>

V. par exemple, consist. extraordinaire du 11 avril 1598 (fo 220).

<p>257</p>

Par exemple, le consist. extraordinaire du 11 novembre 1599, auquel assistent, pourtant, le lieutenant particulier, le garde-sceaux conseiller, 2 consuls, etc., est présidé par le ministre Falguerolles (fo 309).

<p>258</p>

Julius Pacius de Beriga, né le 3 avril 1550 à Vicence, fut principal du collège et recteur de l’Académie de Nîmes, et mourut à Valence en 1635. – Voy. Berriat Saint-Prix, Notice sur Julius Pacius a Beriga. – Ch. Revillout, Le jurisconsulte Julius Pacius de Beriga avant son établissement à Montpellier (1550-1602), à compléter par le compte rendu détaillé de M. Tamizey de Laroque dans la Revue des Questions historiques, octobre 1883. – Ménard, Hist. de Nîmes, t. V, p. 291 et suiv., et surtout Preuves, p. 215 et suiv. – Voy. aussi la Revue des Pyrénées et de la France méridionale, année 1890, p. 324, et H. Omont, Les mss. de Pacius dans Annales du Midi, t. III, 1891, p. 1 et suiv. – Le consist. et les arch. de Nîmes fourniraient encore un grand nombre de renseignements inédits. – Vismes, pour éviter de remplir une promesse de mariage avec Camille Venturin, de Genève, belle-sœur de Pacius, avait couvert de calomnies le jurisconsulte et sa parente. Puis, Pacius l’ayant poursuivi en justice, il avait reconnu en consistoire extraordinaire ses calomnies, et le jurisconsulte avait publié les actes de ce consistoire. D’où l’intervention du synode (V. syn. prov. extraordinaire de Nîmes, séance du 6 août 1599, B. P. F., copie Auzière, et Pièce no 5).

<p>259</p>

Syn. prov. de Nîmes cité.

<p>260</p>

Pièce no 5.

<p>261</p>

Par exemple, dès le 1er septembre 1599, on réunit un consist. extraordinaire dont on couche au registre la délibération (fo 300).

<p>262</p>

Discipline, chap. V, art. 28. – Cette seconde partie de l’article n’était que très rarement exécutée; on voit pourtant quelques délibérations biffées.

<p>263</p>

Par exemple, le 19 décembre 1599, le consist. de Nîmes «donne décharge» à Jehan Gril, receveur des deniers du ministère en 1598 (fo 322).

<p>264</p>

Le syn. prov. de Sauve (1597) engage les églises à ne pas faire de contrats formels avec les pasteurs, mais à «enregistrer seulement leur promesse au livre du consistoire» (B. P. F., copie Auzière).

<p>265</p>

Le fait est reconnu par la Discipline du Bas-Languedoc dont un article, donné au syn. d’Alais en 1575, recommande aux greffiers de ne prendre «point d’argent des extraicts qu’ils dépêcheront des actes du consistoire» (Frossard, Recueil de règlements, art. 64).

<p>266</p>

La forme de dresser un consistoire, dans Arnaud, Documents protestants inédits, p. 75.

<p>267</p>

En 1596, le receveur des deniers de l’église est M. Fontfroide, ancien, et le receveur des deniers des pauvres est Mre Antoine Sabatier, ancien. En 1597, 1598, 1599, 1601, 1602, ce sont, de même, des anciens (Pièce no 1).

<p>268</p>

Arch. du consist., B, 90, t. VII, fo 392.

<p>269</p>

«Sera depesché mandement au sire Cheyron, recepveur des deniers des pouvres, de la somme de 56 soulz tournois» (Délib. du consist. du 9 juillet 1597; ibid., fo 186). – «Sera despéché mandement au sire Janin, recepveur, de 11 livres, 7 souls, 8 deniers» (Délib. du 16 juillet 1597, fo 187).

<p>270</p>

«M. Dumolin, le sire Fournier, Martin et Janin et Veyras» sont députés «pour ouyr, clore et arrester les comptes» de sire Farel, receveur des deniers des pauvres, et de M. Fontfroide, receveur des deniers du ministère, «à ces fins que, doresnavant, les recepveurs ne recepvront aulcune chose sans conterollage et fere receu dans un livre à ce désingné.» C’est le «livre des quitances». (Délib. du 12 février 1597, fos 164-5). – V. aussi délib. des 22 avril 1598, 5 janvier 1599, etc. (Fos 222, 257, etc.).