Les protestants à Nimes au temps de l'édit de Nantes. Boulenger Jacques
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СКАЧАТЬ 2o le «livre des quitances des paiements de nos pasteurs…», comprenant les quittances des pasteurs, proposants et autres salariés du consistoire, qui était en quelque sorte la mise au net des pièces précédentes, dont il ne comprenait pas le détail272; 3o un registre contenant les noms des imposés pour l’entretien des ministres, avec le chiffre de leurs taxes, et une liasse renfermant toutes les pièces relatives au recouvrement de ces impositions273.

      Le receveur des deniers des pauvres avait des comptes moins compliqués: il ne présentait que les mandements tirés sur lui et les quittances de ses paiements avec leur bordereau274. La commission déléguée par le consistoire vérifiait tous ces comptes et en donnait aux deux receveurs une «décharge» qu’elle inscrivait sur un autre registre spécial275, et qu’on mentionnait souvent dans le livre du consistoire276. Puis les comptes étaient renfermés dans un coffre et formaient les archives de l’église277.

      J’ai dit que les deniers des pauvres étaient tout à fait distincts des deniers de l’église. Il arrive, en effet, qu’on fasse procès aux «povres de l’église278», dont les revenus provenaient soit de legs testamentaires, soit de quêtes faites par les diacres.

      Les legs étaient assez fréquents et variaient beaucoup; je n’en ai pas trouvé, néanmoins, de considérables: en 1598, un conseiller au présidial, Antoine de Malmont, lègue 20 l., et le baile de Saint-Jean de Valeriscle 25 l. aux pauvres de Nîmes279. En revanche, il y en a un grand nombre de peu d’importance: voici, par exemple, à Congeniès, un laboureur qui laisse 30 sols280; l’hôte du logis des Arènes à Nîmes, Armand Gaubin, ne destine aux indigents que 10 sols281, et, même, un certain Jacques Malafosse, de Congeniès, ne leur en donne pas plus de 5282. Ce ne sont pas d’ailleurs ces «légatz pies» qui forment la plus grosse part du revenu des pauvres, et heureusement, car ils ne doivent pas être fort exactement payés, s’il arrive fréquemment, comme en 1597, que les magistrats se permettent d’en disposer283. Au reste, une partie des legs est consacrée à l’entretien des pasteurs, et ainsi les pauvres n’ont pas le bénéfice de toute la charité des testateurs284.

      Les quêtes faites par les anciens et les diacres formaient leur principale ressource. Il n’y a que fort peu de renseignements sur ce point. On faisait la quête au temple dans un «bassin285». En outre, on plaçait des troncs «aux» boutiques des marchands, et on les visitait, ce semble, au commencement de chaque année286. Enfin, tous les ans, on réunissait les objets perdus dans le temple et non réclamés, on les vendait, et l’on en versait le produit au bassin: en 1596, on retire ainsi 2 l. 14 sols, et en 1601, 2 l. 16 sols287.

      Ces quêtes étaient les vraies ressources des pauvres. Elles devaient fournir parfois des sommes importantes. Le synode national de Montauban, en 1594, décide que, lorsqu’il se trouvera une somme notable des deniers des pauvres «que l’urgente nécessité n’obligera pas d’emploier pour leur subvention, les diacres, par l’avis du consistoire, pourront en faire quelque prêt à des gens solvables pour faire valoir cet argent à la plus grande utilité des pauvres… à la charge qu’on le puisse retirer promptement en cas de nécessité288». C’était là une permission assez dangereuse, mais ces spéculations paraissaient si séduisantes que, le synode national de Saumur les ayant interdites en 1596289, celui de Montpellier les autorisa de nouveau en 1598290. Il est peu probable que le consistoire de Nîmes ait pu user de la permission à l’époque qui nous occupe, car il avait grand mal à entretenir ses très nombreux indigents291 et, l’«urgente nécessité» ne devait pas lui permettre d’amasser un capital pour le placer.

      Il secourait non seulement les pauvres de la ville, mais encore ceux des autres provinces. Ainsi, en 1597, l’église de Grenoble ayant fait parvenir aux Nîmois une lettre réclamant secours, le consistoire décide que «tout ce qui sera levé au bassin» lui sera envoyé, et que l’on communiquera la lettre aux autres églises du colloque292. On faisait également l’aumône aux pauvres étrangers à la cité qui se présentaient avec des attestations de leur église d’origine. Cette coutume, nommée la «passade293», prêtait à de nombreux abus.

      Des vagabonds exploitaient les églises en exhibant de fausses lettres de leurs prétendus consistoires. C’est en vain que, pour y remédier, le synode national de Montpellier (1598) décide que l’on ne devra accorder aucune attestation avant d’avoir examiné en consistoire si les raisons données par l’intéressé pour partir au loin sont plausibles; que ses «âge, poil, stature» devront être spécifiés; et que les ministres auxquels il s’adressera en chemin devront garder ou détruire l’attestation qu’il présentera et lui en donner une autre, s’il y a lieu, «pour la prochaine église294». L’abus subsiste, et le consistoire de Nîmes se voit forcé d’ordonner que, dorénavant, les pasteurs comme les anciens ne pourront délivrer à ceux qui «demandent la passade… aucungz bilhetz de 5 solz… qui n’aye esté délibéré au consistoire, ou à l’yssue du presche, et signé par quatre pour le moingz295».

      Il ne leur enlevait point, ce semble, le droit de distribuer des «bilhetz» de moins de 5 sols, payables par le receveur des deniers des pauvres. Celui-ci, comme nous l’avons vu, conservait précieusement tous ces mandements comme pièces justificatives de ses dépenses. Ils pouvaient monter à des sommes variables. Par exemple, du 1er janvier au 27 mai 1601, sire Dalbiac, à Nîmes, a reçu des billets pour 52 l. 19 sols296, ce qui donne environ une moyenne de 125 l. d’aumônes par an. Cela ne me paraît pas très considérable, si l’on songe que chaque pasteur reçoit 600 l. de traitement annuel297.

      D’ailleurs, ces sommes, pour minimes qu’elles soient, semblent distribuées avec équité. Marque d’une tolérance rare à cette époque, on fait la charité même à des catholiques, et sans leur demander la plus petite abjuration en retour. «Jane Varlède, papiste, sera assistée de 10 souls pour une fois, atandu sa pouvretté298», décide le consistoire. «La femme de Pierre Michel… estant en extrême pouvreté… bien que soit papiste, luy sera assisté de 10 sols sans conséquance299

      Les nouveaux convertis sont entretenus pendant un certain temps, quand ils sont incapables de gagner leur vie, comme il arrive aux défroqués. On paye leur apprentissage: Pierre, fustier, réclame au consistoire la dépense «que le novisse moyne a faict à sa maison à raison de 5 sols chascung jour300». Si l’église ne peut placer son converti, elle écrit à ses voisines et le leur adresse301. Le synode provincial et le colloque en prennent «soing» et cherchent «si quelque église le voudra entretenirСКАЧАТЬ



<p>272</p>

Ce registre, qui ne contient rien pour les années 1596 à 1602 incluse, commence à 1580 et s’arrête à 1647 (Arch. du consist., H, 61).

<p>273</p>

Il se trouve plusieurs de ces registres dans les arch. non classées du consist.

<p>274</p>

Arch. non classées du consist. «Par M. de Mazaudier et Verquière les bilhetz des pouvres estant entre les mains de sire Dalbiac, recepveur des deniers des pouvres, seront vériffiés et le compte d’iceux arresté» (Délib. du 21 mars 1601; arch. du consist., B, 90, t. VII, fo 401).

<p>275</p>

Arch. du consist., H, 55.

<p>276</p>

V. notamment délib. du consist. du 2 juin 1599 (loc. cit., fos 286-7).

<p>277</p>

«Les recepveurs ne recepvront aulcune chose sans… fere receu dans un livre… que demeurera dans le coffre» (Ibid., fos 164-5). – Sire Janin, receveur, «a remis devers les archifz de l’esglize le compte faict de son administration et les pièces justificatives» (fos 286-87).

<p>278</p>

Délib. du 5 janvier 1599 (fo 257).

<p>279</p>

21 février et 30 octobre 1598 (Arch. du Gard, E, 629); notariat de Jean Corniaret.

<p>280</p>

7 décembre 1597 (Arch. nat., TT, 2422). – Congeniès, Gard, arr. Nîmes, con Sommières.

<p>281</p>

21 novembre 1598 (Arch. du Gard, E, 563); notariat de Marcelin Bruguier.

<p>282</p>

14 octobre 1597 (Arch. nat., TT, 2422).

<p>283</p>

«M. Darbouses, greffier commissionnel, appellé en consistoire pour remettre à la bourse des pouvres de la présante esglise certains légatz pies qu’il a entre ses mains… ce qu’il a confessé, mais qu’il a baillié lui mesmes argent au geolier et autres, du mandement du sieur juge criminel et de M. l’advocat du roy» (Délib. du consist. du 19 mars 1597, fo 172). – Le syn. prov. de Montpellier (1581) ordonne que «ceux qui ne payent les légats faicts aux povres» doivent être «appelés au consistoire et poursuivis comme sacrilèges par autres voyes du magistrat» (Frossard, Recueil de règlements, art. 51).

<p>284</p>

P. de Felice, Protestants d’autrefois, 3e série, p. 128.

<p>285</p>

«Tout ce qui sera levé au bassin…» (Délib. du consist. du 24 septembre 1597, fo 194). – M. P. de Felice, Protestants d’autrefois, 3e série, p. 126, dit que la collecte se faisait ordinairement à la porte du temple dans des «bourses, boîtes, bassins, plats, coupes ou tasses».

<p>286</p>

Voici les deux délib. du consistoire que j’ai recueillies à ce sujet: «Par sire Radel et sire Sigalon, antien, seront retirés les deniers des boîtes pour les povres qui sont aux botiques des merchans» (3 janvier 1599, fo 259). – «Pour l’argent des boytes des pauvres que sont aux botiques des marchands de l’année dernière…» (12 janvier 1600, fo 319).

<p>287</p>

«Inquand des choses trouvées au temple et non demandées, et l’argent mis au bassin» (En tête des délib. du consist. de l’année 1596, fo 26). – «Inventaire des choses perdues au temple et non demandées» (Délib. du 24 février 1601, fo 394).

<p>288</p>

Aymon, Synodes nat., t. I, p. 180.

<p>289</p>

Aymon, t. I, p. 200.

<p>290</p>

Aymon, t. I, p. 232.

<p>291</p>

V. ci-dessous la décision que dut prendre le consist. de Nîmes relative aux «billets» délivrés par les anciens.

<p>292</p>

Délib. du 24 septembre 1597, par exemple (loc. cit., fo 194).

<p>293</p>

Délib. du 1er août 1601 (fo 424).

<p>294</p>

Aymon, Syn. nat., t. I, p. 216.

<p>295</p>

Délib. du 1er août 1601 (fo 424).

<p>296</p>

Délib. du 30 mai 1601 (fo 415).

<p>297</p>

V. ci-dessus, p. 8.

<p>298</p>

Délib. du 8 mai 1596 (fo 53).

<p>299</p>

Délib. du 23 octobre 1596 (fo 133).

<p>300</p>

Délib. du 10 mars 1599 (fo 270).

<p>301</p>

V. délib. du 4 juin 1597 (fo 182). – «Le sieur de Falgueroles adressera aux esglises circonvoysines le capuchin converty pour avoir assistance pour le fere mettre de mestier» (Délib. du 11 juin 1597, fo 183).