Les protestants à Nimes au temps de l'édit de Nantes. Boulenger Jacques
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СКАЧАТЬ Ailleurs, c’est un ancien moine de Tournon, nommé Denys Enard, que le consistoire de Nîmes envoie comme apprenti chez Mre Noguier, chirurgien, au prix de 8 l. par mois: «lequel apprenti s’en seroit allé sans luy rien dire» au bout de onze jours, en emportant «deux couvre chefz de valleur de 24 solz tous deux»; il faut donc payer les 24 sols et 3 l. pour les onze jours d’apprentissage, plus 4 l. 10 sols pour deux chemises que le consistoire avait fait acheter «pour bailher au susd. Denys Enard304».

      Car il remettait souvent les secours en nature. Je vois, en effet, qu’il fait délivrer pour 20 l. de «cadis à la vefve de Parant pour lui fere une robbe305»; qu’il assiste d’une «eymine de bled», valant 15 sols, Jean St-Huict, serrurier306, etc. En tout cas, pour le principe, lorsqu’il donne une somme d’argent, il spécifie presque toujours l’emploi qu’en doit faire l’assisté: si Estienne Audiballe reçoit un écu, c’est «pour achepter une robbe à la fripperye307».

      Certains pauvres étaient en quelque sorte abonnés et touchaient une certaine somme chaque semaine, tandis que d’autres étaient secourus une fois pour toutes. Parmi les premiers se trouvaient les malades, dont le consistoire prenait grand soin. Une pauvre femme, Claude Deleuse, étant tombée «malade à l’extrémité», il décide que l’ancien du quartier devra avertir ses parents tout d’abord, mais «en cas de nécessité luy adressera avec son diacre308». Souvent, il ordonne que certains pauvres recevront une somme remise à la discrétion «du diacre et surveillant de leur cartier309». Le tableau suivant renferme les noms des indigents assistés entre janvier et mars 1596, avec la mention de ce qu’on leur a donné310.

      Le consistoire avait donc, en l’espace de trois mois, fourni à 26 personnes différentes des secours variant entre 10 l. et 5 sols. Il est juste de constater que ce tableau ne comprend que les aumônes énumérées dans le livre du consistoire, et que les anciens et les pasteurs avaient le droit de distribuer des bons pour des sommes peu importantes.

      Ce qu’il faut retenir, c’est le soin avec lequel l’église s’occupe des indigents. Il ne se passe pas une séance sans qu’un des anciens propose une infortune à soulager, et sans que le consistoire fasse la charité suivant ses moyens, assez faibles à la vérité. En janvier 1602, il décide de reprendre une ancienne coutume qui lui semble propre à ranimer le zèle des dames de la ville: elle consiste à faire visiter les pauvres chaque semaine, par des «damoiselles et autres honnorables personnes311». Il fait donc dresser un rôle des demoiselles «honnorables», et, tous les mercredis, il désigne deux d’entre elles à cet effet. Ce sont les plus hautes dames de la ville: Mme d’Aubais et Mme de Rochemore312, Mlle la Criminelle et Mlle la lieutenante de Rozel313, Mlles de la Rouvière314, de la Croix315, etc. Elles sont chargées, notamment, d’aller voir les pensionnaires de l’hôpital. Le consistoire semble avoir toujours exercé une surveillance efficace sur cet hôpital. En 1597, il rappelle sévèrement à l’avocat des pauvres que c’est son devoir de s’en occuper316. Il prie les consuls de veiller à ce que «les serviteurs et servantes de l’hospital traictent bien les povres317». Il leur recommande encore d’y recevoir une malheureuse «femme boiteuse318». Enfin, il s’assemble avec les consuls et les magistrats pour pourvoir au logement des indigents319.

      Voilà comment on employait les deniers des pauvres. Ce n’était pas une grosse somme, et l’on en retenait encore un cinquième pour l’entretien des proposants320. Mais tout au moins les aumônes étaient distribuées équitablement.

      La part la plus importante des revenus du consistoire était comprise sous la dénomination: «deniers de l’église» ou encore «deniers du ministère», parce qu’elle était surtout destinée aux pasteurs.

      Le «receveur des deniers de l’église» avait bien des dépenses à couvrir: d’abord, les frais qu’entraînaient les longues négociations auxquelles il fallait se livrer pour obtenir un pasteur «perpétuel», quand l’église s’en trouvait dépourvue; puis les gages des pasteurs en exercice; en leur absence l’entretien des ministres «prêtés», et après leur mort, la pension de leurs veuves321; enfin, il payait l’avertisseur, les employés du consistoire322 et les députations aux colloques et aux synodes.

      Celles-ci devaient être, autant que possible, nombreuses, «afin de resserrer l’union des églises». Un synode national recommande aux localités qui ont plusieurs pasteurs d’en envoyer «alternativement… le plus grand nombre qu’elles pourront323». Mais de telles délégations coûtaient cher, et d’autant plus cher qu’elles étaient composées d’un plus grand nombre de personnes. Certaines églises n’étaient pas assez riches pour les supporter; aussi elles s’entendaient pour choisir le même représentant au synode national et s’unissaient pour payer son entretien324.

      Lorsqu’il s’agissait seulement d’un synode provincial, les frais de voyage et de séjour des députés étaient moins élevés. C’est pourquoi Nîmes y envoyait assez souvent, outre ses représentants réguliers, des députations extraordinaires325.

      La note présentée par Isaac Roux, ancien d’Aimargues, délégué par son église au synode de Saint-Germain de Calberte, peut nous donner une idée de ce que devaient dépenser les députés de Nîmes: «Pour la disnée à Calvisson», on lui doit 1 l. 6 sols; «pour avoir refferré la cavale à Canes», 2 sols; «pour la souppée et couchée à Enduse», 1 l. 6 sols; «pour avoir fait raccoutrer la celle de la cavale,» 5 sols; pour la ferrure «du petit bidet,» 1 sol 6 deniers; «pour une guide de Saint-Étienne jusques à Saint-Jan», 1 sol; «item 1 sol en pain [sic] pour la cavalle326», etc. On rembourse aux députés le prix de la location de leurs chevaux, et, pour aller au colloque de Montpellier, un cheval loué par le pasteur, avec sa selle et sa bride, se paye 30 sols327.

      Généralement les délégations aux synodes coûtent plus cher que les délégations aux colloques, car le voyage qu’ont à faire les envoyés est plus long. Ainsi la députation de l’église de Nîmes au synode de Sauve (1597) lui revient à 39 l. 12 s. tournois328; au lieu que le consistoire ne débourse que 4 écus, soit 12 l., pour les frais du pasteur Chambrun et de l’ancien De Vieulx au colloque d’Aiguesmortes en novembre 1598329, et un seul écu pour les dépenses de Falguerolles à celui de Vauvert, au mois d’août de la même année330. – Jusqu’en 1599, la ville où se tenait le synode était très favorisée puisque ses députés n’avaient pas à se déplacer; mais à cette date on décida qu’elle aurait à «loger les pasteurs et anciens [des autres localités], avec les montures, en maison bourgeoise» et à ses dépensСКАЧАТЬ



<p>304</p>

Délib. des 18 et 21 octobre 1598 (loc. cit., fos 243 et 244).

<p>305</p>

Délib. du 15 octobre 1597 (fo 195).

<p>306</p>

Délib. du 18 décembre 1596 (fo 144).

<p>307</p>

Délib. du 19 mars 1597 (fo 172).

<p>308</p>

Délib. du 15 janvier 1597 (fo 157).

<p>309</p>

Délib. du 13 février 1596 (fo 33).

<p>310</p>

Arch. du consist., B, 90, t. VII (registre des délibérations), fos 26-41.

<p>311</p>

Délib. du 25 janvier 1602 (Ibid., fo 460).

<p>312</p>

Délib. du 30 janvier 1602 (fo 463).

<p>313</p>

Délib. du 13 février 1602 (fo 471).

<p>314</p>

Délib. du 20 février 1602 (fo 475).

<p>315</p>

Délib. du 27 février 1602 (fo 478).

<p>316</p>

«Chargé M. Dumolin… de parler à M. l’advocat des pouvres pour luy remonstrer son debvoir quand au logement des pouvres, en y ayant plusieurs quy ne sont que titullaires et non aulcun pouvre» (Délib. du 29 janvier 1597, fo 160).

<p>317</p>

Délib. du 16 juin 1599 (fo 291).

<p>318</p>

Délib. du 2 juillet 1596 (fo 102).

<p>319</p>

«Demain sera pourveu sur le logement des pouvres…»; on convoquera le juge criminel, l’avocat du roi, et l’avocat des pauvres à la maison de ville, «ensamble les survellians avec leurs pouvres et rolles chascun de sa survelliance» (Délib. du 11 décembre 1596, fo 144). – «M. le lieutenant Albenas et M. Agulhonet, advocat des pauvres… ont propozé… que, pour la grande et extrême charté des vivres, il est expédiant de les lotger dès à présant. Conclud que on avertira Messieurs les consuls pour en prendre rézolution à demain» (Délib. du 23 octobre 1599, fo 133). – V. au sujet de l’hôpital de Nîmes, Puech, Une ville au temps jadis, pp. 562 et suiv.

<p>320</p>

Voy. ci-dessus, p. 19.

<p>321</p>

Voy. ci-dessus, p. 12.

<p>322</p>

Voy. ci-dessus, p. 38 et suiv.

<p>323</p>

Aymon, Syn. nat., t. I, p. 198.

<p>324</p>

P. de Felice, Protestants d’autrefois, 3e série, p. 80.

<p>325</p>

Par exemple, elle députe au syn. prov. d’Uzès (1600): «MM. d’Aiguillionet, consellier, de Sainct-Veran, Fontfroide, consul, Blisson, avocat, diacre, et Chalas» (Arch. du consist. de Nîmes, A, 10, fo 45, vo). Ces députations extraordinaires devaient être défrayées, en partie tout au moins, par la municipalité, de même que celles envoyées aux assemblées politiques (V. ci-dessous, chap. V )

<p>326</p>

Arch. comm. d’Aimargues, GG, 59.

<p>327</p>

Délib. du 11 septembre 1596 (loc. cit., fo 125).

<p>328</p>

Délib. du 14 mai 1597 (fo 178).

<p>329</p>

Délib. du 18 novembre 1598 (fo 247).

<p>330</p>

Délib. du 2 septembre 1598 (fo 239).