Les protestants à Nimes au temps de l'édit de Nantes. Boulenger Jacques
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СКАЧАТЬ et payaient chacune leur part des frais333.

      Outre les députations aux assemblées, on prenait encore sur les deniers du ministère l’achat des objets servant au culte, l’entretien du temple334 et de la bibliothèque.

      L’église de Nîmes n’avait pas attendu les encouragements des synodes nationaux de Saumur (1596), ou de Jargeau (1601) pour «dresser» une bibliothèque propre à servir à ses ministres et à ses proposants335. En janvier 1596, elle ne s’occupait plus déjà que de la «parachever» et achetait pour 7 écus les livres qu’un libraire avait apportés à Nîmes336; peu après, le pasteur Falguerolles et l’avocat Chalas découvraient dans «la bibliothèque de feu M. de Saint-Cézary… deux volumes de Concilles et la Response et examen du concile de Trante, faictz par Rennitus», et les achetaient 3 écus pour le consistoire337. Les livres étaient alors chez Chalas338, et il y en avait un nombre suffisant pour que leur catalogue fût considéré comme un travail nécessaire et assez important339. D’ailleurs, on ne cessait d’en acheter de nouveaux. Ainsi, le 8 janvier 1597, on paye «3 l. 8 sols tournois pour huit livres de M. de Falguerolles340». Chalas partant en voyage, on le charge d’en rapporter quelques-uns341. On presse, en 1597, la rédaction de l’«inventaire et contrerollage» de la bibliothèque342, que le nouveau consistoire de 1599 fait vérifier en entrant en charge343. En octobre de cette même année, le synode ayant arrêté que «les ministres seroyent tenuz tenir en leurs cheres une bible de la nouvelle version», le consistoire se décide à vendre celle qui lui sert actuellement. «Et au mesme instant, au consistoire, a este enchérie, et, après plusieurs enchères, délivrée à M. Rostang du Vieux pour le prix de 3 escus sol344». Puis, on achète une superbe bible «de la nouvelle version… dorée, lavée, réglée», que l’on paye 4 écus et demi345. En 1601, la «Bibliotheca patrum par Marguarites de la Bigne, impression de Paris de l’an 1589, en 9 tomes» est acquise moyennant 18 écus, et sa reliure en «vert carton», plus le port, revient à 5 écus 30 sols346. Enfin, il faut ajouter à cela qu’en 1600 on avait fait faire un «cabinet» pour les livres347.

      Il est fort probable que les petites églises du colloque de Nîmes ne devaient pas avoir de bibliothèques faute d’argent, puisque une ville comme Montpellier, siège d’une académie, se voyait, en 1598, exhortée par le synode à se faire «une collection de livres en théologie348». Quoi qu’il en soit, ce ne fut pas, comme le dit M. de Felice349, le synode nat. de La Rochelle, en 1607, qui encouragea le premier les églises à se créer des bibliothèques, et Nîmes en possédait une fort importante bien longtemps auparavant.

      Les deniers du ministère devaient subvenir à toutes les dépenses que je viens d’énumérer; voyons d’où ils provenaient.

      Le roi promit aux églises, en 1598, de leur donner 45 000 écus. Cette promesse ne fut pas tenue350, si bien que le consistoire de Nîmes dut continuer à pourvoir à l’entretien des ministres par des impositions sur les habitants. A l’époque qui nous occupe, on décidait officiellement que ceux de la Religion seuls en auraient la charge351; mais, vu les difficultés de toutes sortes qu’on avait à recouvrer une subvention si nécessaire, on n’hésitait pas, en pratique, à taxer les catholiques, et ce après comme avant l’édit de Nantes352.

      Chaque année, le consistoire extraordinaire, avec le concours des magistrats et des consuls353, décidait quelle somme on prélèverait: tantôt 500 écus comme en 1596354, tantôt 800 comme en 1601355. Il déléguait ensuite quelques membres des consistoires vieux et nouveau, un des magistrats, un ou deux consuls, pour en faire la répartition sur les habitants356. Cette répartition, inscrite sur un livre long nommé «la tariffe357», était alors présentée au magistrat pour qu’il en autorisât l’exaction358. Une fois le «livre signé», on chargeait de lever l’imposition celui qui faisait «meilheure condition», après avoir pris l’avis des consuls: ainsi, en 1600, l’ancien Salveton ayant accepté «d’en fere l’exaction pour 100 l. tournois», on décide «que le bail de lever led. libvre sera passé aud. sire Salveton359». Mais on ne donnait pas toujours la levée à forfait et le consistoire la confiait souvent à des agents qu’il surveillait lui-même. Le 9 décembre 1598, en effet, nous le voyons décider que «les diacres et anciens… poursuyvront ceulx quy sont commis à la levée des rolles360»; et une autre fois, il ordonne qu’elle se fera «par survelliances et ysles… par les nommés à cest effect… suivant les rolles361».

      La levée a lieu d’ailleurs très malaisément et les petites églises comme les grandes ne mettent aucun enthousiasme à entretenir leurs pasteurs. A Nîmes, les uns se plaignent d’être trop imposés et ne veulent pas payer intégralement leur taxe; les autres «ne veullent payer rien du tout362» et il y réussissent: on décide de les «adjouster» aux rôles de l’année suivante363, mais c’est toujours un an de gagné, et pourquoi céderaient-ils davantage plus tard? Un nommé Jehan de Vidalle déclare «qu’il yroit plus tost baptizer son enfant à la messe que bailher rien à MM. les ministres364», et il est probable que l’«exhortation pour l’entretenement des pasteurs» que Chambrun fait en chaire après le prêche ne doit pas être sur lui d’un effet puissant365.

      Aussi, la levée est-elle loin de rendre ce qu’elle devrait et les pasteurs ne peuvent-ils obtenir leurs gages. En mars 1598, il est dû à Falguerolles, «oultre les arreyrages de l’année passée… ung cartier de la présante366». En mai, le consistoire est forcé d’emprunter 300 l., remboursables dans trois mois et au taux de 12 %, desquelles Chambrun prend 100 l., Falguerolles 200 et Moynier rien367. Cela ne remplit pas la bourse du ministère: en septembre, il ne s’y trouve encore «pas d’argent, mesmes pour les pasteurs servans368». On atteint ainsi l’époque369 de la levée de l’imposition, que l’on décide le 21 octobre. Naturellement, elle ne se fait pas mieux que d’habitude; en décembre, on décide de «poursuyvre» ceux qui en sont chargés370, car, sans doute, on la veut terminée pour la fin de l’année. Les pasteurs sont tellement pressés qu’à peine quelque argent se trouve-t-il entre les mains du receveur qu’ils demandent qu’on leur délivre à chacun 12 écus371. D’ailleurs, c’est СКАЧАТЬ



<p>333</p>

Les députés des consist. de Junas, Congeniès et Aubais (Gard, arr. Nîmes, con Sommières; colloque de Nîmes) étant «assemblés ensemble le 2 avril 1595», à Junas, leur ministre leur remontre «le peu d’ordre qu’il y a» en ce qui concerne la députation aux assemblées ecclésiastiques; ils décident que «fondz sera fait en chasque esglize», sur lequel on prendra l’argent nécessaire aux députations, «chacune pour son tiers». On voit dans la suite que le plus souvent un seul ancien d’une des trois églises accompagne le pasteur (Extr. des actes du consistoire de Junas allant de 1592 à 1599; Arch. nat., TT, 2422).

<p>334</p>

Ainsi on donne mandement de 100 s. «sur les deniers du ministère pour paier au menuzier le reste de sa faction du banc mis au temple» (Délib. du 8 janvier 1598, loc. cit., fo 154). – Etc.

<p>335</p>

Syn. nat. de Saumur (1596) dans Aymon, Syn. nat., t. I, p. 203. – Syn. nat de Jargeau (1601), Ibid., p. 237.

<p>336</p>

Délib. du consist. de Nîmes du 10 janvier 1596 (fo 26).

<p>337</p>

Délib. du 31 janvier 1596 (fo 30).

<p>338</p>

Délib. du 14 février 1596 (fo 32).

<p>339</p>

Délib. du 19 août 1596 (fo 118).

<p>340</p>

Délib. à cette date (fo 153).

<p>341</p>

Délib. du 9 avril 1597 (fo 174).

<p>342</p>

Id.

<p>343</p>

Délib. du 31 décembre 1598 (fo 255).

<p>344</p>

Délib. du 6 octobre 1599 (fo 304).

<p>345</p>

Délib. du 13 octobre 1599 (fo 305).

<p>346</p>

Délib. des 24 octobre, 28 novembre et 26 décembre 1601 (fos 436, 443 et 450).

<p>347</p>

Délib. du 26 janvier 1600 (fo 323).

<p>348</p>

Syn. prov. de Montpellier, séance du 27 mars 1598 (B.P.F., copie Auzière).

<p>349</p>

Protestants d’autrefois, 3e série, p. 60, note 3.

<p>350</p>

V. l’appendice sur les Deniers du roi.

<p>351</p>

Le consist. de Nîmes décide, le 18 octobre 1596, que «la somme résollue» sera départie «sus chacun de la Religion» (loc. cit., fo 132). – De même, le 8 avril 1601 (fo 404).

<p>352</p>

Requête du chapitre de Nîmes au parlement de Toulouse pour qu’il interdise aux protestants de lever aucune somme sur les rentiers des dîmes pour l’entretien des ministres; juin 1601 (Arch. du Gard, G, 177). – Pour plus de détails, v. ci-dessous, chap. VI.

<p>353</p>

V. l’assemblée du 18 octobre 1596 «convocquée sur la contribution pour l’entretenement du ministère» (Arch. du consist., B, 90, t. VII, fo 132); et celle du 11 novembre 1599 (fo 313). V. aussi délib. du conseil de ville du 19 décembre 1599 (Arch. comm. de Nîmes, LL, 15, fo 90).

<p>354</p>

Délib. du consist. extraordinaire du 18 octobre 1596, citée.

<p>355</p>

«Oultre 700 l. que se pourront retirer des restes desd. deux livres [d’imposition des années précédentes] et 1.300 l. qu’on pourra retirer d’alheurs [peut-être en imposant les rentiers des bénéfices] sera nécessaire, pour subvenir tant au paiement des arreyrages deubz esd. pasteurs que pour leur assistance de la présente année 1601 et fraix extraordinaires de l’églize, d’imposer la somme de 800 escutz sans y comprendre les leveures et fraix des livres» (Délib. du 8 avril 1601, Arch. du consist., B, 90, t. VII, fo 404).

<p>356</p>

Délib. du consist. de Nîmes du 18 octobre 1596 (Ibid., fo 132).

<p>357</p>

D’après le règlement donné à l’église en 1596; Borrel, Histoire de l’église réformée de Nîmes, p. 62.

<p>358</p>

Chargés Cheyron diacre et Salveton ancien de «fere signer le livre sur le payement des pasteurs» (Délib. du consist. extraordinaire du 19 janvier 1600, fo 321). – Le 3 février 1600, on voit que le rôle de l’imposition pour les pasteurs a été signé par le garde-sceaux (fo 325).

<p>359</p>

Délib. du 3 février 1600 (fo 325).

<p>360</p>

Fo 250.

<p>361</p>

Le 8 janvier 1597 (fo 154).

<p>362</p>

Délib. du consist. du 15 janvier 1597 (fo 157). – Délib. des 18 et 25 novembre 1597 (fos 247 et 248).

<p>363</p>

Délib. du 21 octobre 1598 (fo 244).

<p>364</p>

Délib. du 23 décembre 1598 (fo 254).

<p>365</p>

Délib. du 13 janvier 1599 (fo 259).

<p>366</p>

Il réclame en conséquence que l’église «se charge de payer et acquitter l’obligé qu’il fera» de 50 écus, qu’il a empruntés «aux apportz» pour envoyer son frère étudier en théologie à Genève (Délib. du 20 mars 1598, fo 216).

<p>367</p>

Délib. des 15, 20 et 27 mai 1598 (fos 227, 228 et 229).

<p>368</p>

Délib. du 16 septembre 1598 (fo 242).

<p>369</p>

Délib. du 21 octobre 1598 (fo 244).

<p>370</p>

Délib. du 9 décembre 1598 (fo 250).

<p>371</p>

Délib. du 16 décembre 1598 (fo 252).