Vies des dames galantes. Pierre de Bourdeille Brantôme
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Название: Vies des dames galantes

Автор: Pierre de Bourdeille Brantôme

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/39220

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СКАЧАТЬ et endormy dans le lict, vint voir son amy avant se coucher; et ainsi qu'il luy eut demandè où estoit son mary, elle luy respondit: «Il garde le lict et le nid du cocu, de peur qu'un autre n'y vienne pondre; mais ce n'est pas à son lict, ny à ses linceuls, ny à son nid que vous en voulez, c'est à moy qui vous suis venue voir, et l'ay laissé là en sentinelle, encore qu'il soit bien endormy.»

      – A propos de sentinelle, j'ay ouy faire un conte d'un gentilhomme de valeur, que j'ai cogneu, lequel un jour venant en question avec une fort honneste dame que j'ay aussi cogneue, il luy demanda, par manière d'injure, si elle avoit jamais fait de voyage à Saint-Mathurin25. «Ouy, dit-elle; mais je ne pus jamais entrer dans l'église, car elle estoit si pleine et si bien gardée de cocus, qu'ils ne m'y laissèrent jamais entrer: et vous qui estiés des principaux, vous estiez au clocher pour faire la sentinelle et advertir les autres.»

      J'en conterois mille autres risées, mais je n'aurois jamais fait: si espère-je d'en dire pourtant en quelque coin de ce livre.

      – Il y a des cocus qui sont debonnaires, qui d'eux-mesmes se convient à cette feste de cocuage; comme j'en ai cogneu aucuns qui disoient à leurs femmes: «Un tel est amoureux de vous, je le cognois bien, il nous vient souvent visiter, mais c'est pour l'amour de vous, mamie. Faites-luy bonne chere; il nous peut faire beaucoup de plaisir; son accointance nous peut beaucoup servir.»

      D'autres disent à aucuns: «Ma femme est amoureuse de vous, elle vous ayme; venez la voir, vous lui ferez plaisir; vous causerez et deviserez ensemble, et passerez le temps.» Ainsi convient-ils les gens à leurs despens.

      Comme fit l'empereur Adrian, lequel estant un jour en Angleterre (ce dit sa vie) menant la guerre, eut plusieurs advis comme sa femme, l'imperatrice Sabine, faisoit l'amour, à toutes restes à Rome, avec force gallants gentilshommes romains. De cas de fortune, elle ayant escrit une lettre de Rome en hors à un gentilhomme romain qui estoit avec l'empereur en Angleterre, se complaignant qu'il l'avoit oubliée et qu'il ne faisoit plus compte d'elle, et qu'il n'estoit pas possible qu'il n'eust quelques amourettes par de-là, et que quelque mignone affettée ne l'eust espris dans les lacs de sa beauté; celle lettre d'avanture tomba entre les mains d'Adrian, et comme ce gentilhomme, quelques jours après, demanda congé à l'Empereur sous couleur de vouloir aller jusques à Rome promptement pour les affaires de sa maison, Adrian luy dit en se jouant: «Eh bien, jeune homme, allez-y hardiment, car l'impératrice ma femme vous y attend en bonne dévotion.» Quoy voyant le Romain, et que l'Empereur avoit descouvert le secret et luy en pourroit fort mauvais tour, sans dire adieu ny gare, partit la nuit après et s'enfuit en Irlande.

      Il ne devoit pas avoir grand peur pour cela, comme l'Empereur luy-mesme disoit souvent, estant abreuvé à toute heure des amours desbordés de sa femme: «Certainement si je n'estois empereur, je me serois bientost défait de ma femme, mais je ne veux monstrer mauvais exemple.» Comme voulant dire que n'importe aux grands qu'ils soient-là logés, aussi qu'ils ne se divulguent. Quelle sentence pourtant pour les grands! laquelle aucuns d'eux ont pratiquée, mais non pour ces raisons. Voilà comme ce bon empereur assistoit joliment à se faire cocu.

      – Le bon Marc Aurele, ayant sa femme Faustine une bonne vesse, et luy estant conseillé de la chasser, il respondit: «Si nous la quittons, il faut aussi quitter son douaire, qui est l'empire; et qui ne voudroit estre cocu de mesme pour un tel morceau, voire moindre?»

      Son fils Antoninus Verus, dit Commodus, encore qu'il devint fort cruel, en dit de mesme à ceux qui luy conseilloient de faire mourir ladite Faustine sa mère, qui fut tant amoureuse et chaude après un gladiateur, qu'on ne la put jamais guérir de ce chaud mal, jusques à ce qu'on s'advisast de faire mourir ce maraut gladiateur et luy faire boire son sang.

      – Force marys ont fait et font de mesme que ce bon Marc Aurele, qui craignent de faire mourir leurs femmes putains, de peur d en perdre les grands biens qui en procedent, et ayment mieux estre riches cocus à si bon marché qu'estre coquins.

      – Mon Dieu! que j'ay cogneu plusieurs cocus qui ne cessoient jamais de convier leurs parents, leurs amys, leurs compagnons, de venir voir leurs femmes, jusques à leur faire festins pour mieux les y attirer; et y estant, les laisser seuls avec elles dans leurs chambres, leurs cabinets, et puis s'en aller et leur dire: «Je vous laisse ma femme en garde.»

      – J'en ay cogneu un de par le monde, que vous eussiés dit que toute sa félicité et contentement gisoit à estre cocu, et s'estudioit d'en trouver les occasions, et surtout n'oublioit ce premier mot: «Ma femme est amoureuse de vous; l'aymez-vous autant qu'elle vous aime?» Et quand il voyoit sa femme avec son serviteur, bien souvent il emmenoit la compagnie hors de la chambre pour s'aller pourmener, les laissant tous deux ensemble, leur donnant beau loisir de traitter leurs amours; et si par cas il avoit à faire à tourner prestement en la chambre, dès le bas du degré il crioit haut, il demandoit quelqu'un, il crachoit ou il toussoit, afin qu'il ne trouvast les amants sur le fait; car volontiers, encore qu'on le sçache et qu'on s'en doute, ces vues et surprises ne sont guières agréables ny aux uns ny aux autres.

      Aussi ce seigneur faisant un jour bastir un beau logis, et le maistre masson luy ayant demandé s'il ne le vouloit pas illustrer de corniches, il respondit: «Je ne sçay que c'est que corniches; demandez-le à ma femme, qui le sçait et qui sçait l'art de géométrie; et ce qu'elle dira faites-le.»

      – Bien fit pis un que je sçay, qui, vendant un jour une de ses terres à un autre pour cinquante mille escus, il en prit quarante-cinq mille en or et argent, et pour les cinq restants il prit une corne de licorne; grande risée pour ceux qui le sceurent. «Comme, disoient-ils, s'il n'avoit assez de cornes chez soy sans y adjouster celle-là.»

      – J'ay cogneu un très-grand seigneur, brave et vaillant, lequel vint à dire à un honneste gentilhomme qui estoit fort son serviteur, en riant pourtant: «Monsieur un tel, je ne sçay ce que vous avez fait à ma femme, mais elle est si amoureuse de vous que jour et nuict elle ne me fait que parler de vous, et sans cesse me dit vos louanges. Pour toute response je luy dis que je vous connois plustost qu'elle, et sçay vos valeurs et vos mérites, qui sont grands.» Qui fut estonné, ce fut ce gentilhomme, car il ne venoit que de mener cette dame sous le bras à vespres, où la Reyne alloit. Toutes-fois le gentilhomme s'asseura tout d'un coup et luy dit: «Monsieur, je suis très-humble serviteur de madame vostre femme, et fort redevable de la bonne opinion qu'elle a de moi, et l'honore beaucoup; mais je ne luy fais pas l'amour (disoit-il en bouffonnant), mais je luy fais bien la cour par vostre bon advis que vous me donnastes dernierement; d'autant qu'elle peut beaucoup à l'endroit de ma maistresse, que je puis espouser par son moyen, et par ainsi j'espère qu'elle m'y sera aidante.»

      Ce prince n'en fit plus autre semblant, si-non que de rire et admonester le gentilhomme de courtiser sa femme plus que jamais, ce qu'il fit, estant bien-aise sous ce prétexte de servir une si belle dame de prince, laquelle luy faisoit bien oublier son autre maistresse qu'il vouloit espouser, et ne s'en soucier guières, si-non que ce masque bouchoit et déguisoit tout.

      Si ne put-il faire tant qu'il n'entrast un jour en jalousie, que voyant ce gentilhomme dans la chambre de la Reyne porter au bras un ruban incarnadin d'Espagne, qu'on avoit apporté par belle nouveauté à la Cour, et l'ayant tasté et manié en causant avec luy, alla trouver sa femme, qui estoit près du lict de la Reyne, qui en avoit un tout pareil, lequel il mania et toucha tout de mesme, et trouva qu'il estoit tout semblable et de la mesme pièce que l'autre: si n'en sonna-il pourtant jamais mot, et n'en fut autre chose. Et de telles amours il en faut couvrir si bien les feux par telles cendres de discrétion et de bons advis, qu'elles ne se puissent descouvrir; car bien souvent l'escandale ainsi descouvert dépite plus les marys contre leurs femmes, que quand le tout se fait à cachettes, pratiquant en cela le proverbe: Si non caste, tamen caute26.

      – Que j'ay veu en mon temps de grands escandales et de grands inconvénients pour les indiscrétions СКАЧАТЬ



<p>25</p>

C'est-à-dire, fait folie de son corps, comme on parle, parce qu'on va en pèlerinage à l'église de ce saint pour être guéri de la folie.

<p>26</p>

C'est-à-dire, sinon chastement, du moins finement.