Chronique de 1831 à 1862, Tome 3 (de 4). Dorothée Dino
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Название: Chronique de 1831 à 1862, Tome 3 (de 4)

Автор: Dorothée Dino

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ son exécuteur testamentaire, ayant, dit-elle, l'intuition de mourir à Paris. En attendant, elle paraît s'y porter à merveille.

      M. Royer-Collard me mande ceci, en me parlant du discours académique de M. de Sainte-Aulaire: «Il faut bien que je vous dise un mot de la réception de Sainte-Aulaire. Les journaux le flattent; l'auditoire était fort brillant, le discours du Récipiendaire pâle et froid; celui de M. Roger a mieux réussi qu'il ne le méritait, tant pis pour le public.» M. Royer-Collard me dit aussi qu'après avoir été avec sa fille visiter Versailles, il a eu un retour de cette fièvre qui a failli l'emporter, il y a quelques années, à Châteauvieux. Il est bien évident que toute son organisation a reçu alors un choc dont il ne se remettra plus.

      Günthersdorf, 27 juillet 1841.– Je suis partie de Hohlstein avant-hier matin et suis arrivée à deux heures à Sagan. Après le dîner, j'ai été au Château indiquer quelques portraits de famille que je veux faire copier pour Rochecotte; ensuite à l'église, pour y fixer le lieu et la forme du petit monument qu'il est temps enfin d'élever à mon père, dont les restes, au bout de quarante ans, sont enterrés dans cette église, sans que l'on sache, autrement que par la tradition, le lieu où ils sont placés. Hier, j'ai été, de bonne heure, à la petite église pittoresquement située au bout du parc de Sagan, dans le caveau de laquelle les restes de feu ma sœur sont déposés. J'y ai fait dire une messe, à laquelle j'ai assisté, pour le repos de son âme. Elle était toute remplie de belles fleurs et de plantes rares, que le jardinier du Château y avait portées; il y était venu aussi beaucoup de monde. Je suis ensuite partie pour Deutsch-Wartenberg, qui m'appartient, après quoi, je suis venue ici, le soir, avec M. de Wolff, qui reste deux ou trois jours, pour se rencontrer avec M. de Gersdorf que j'attends. A eux deux, ils verront à aplanir la question litigieuse entre mes fils et ma sœur Hohenzollern, relativement aux prétentions allodiales de celle-ci sur la majeure partie de Sagan.

      J'ai trouvé ici quelques améliorations; le jardin est bien tenu et le tout fort propre.

      J'ai reçu plusieurs lettres: une, de Mme de Lieven, en date du 15, me dit que la Reine Victoria fait une tournée de châteaux chez les ministres Whigs, qu'on trouve fort déplacée dans les circonstances actuelles, et qu'on ne serait pas étonné d'un coup d'État de sa part, plutôt que de subir les Tories; qu'il serait possible aussi que, pour éviter sir Robert Peel, elle fît appeler lord Liverpool, ce qui n'aurait aucun succès. On dit que le fils aîné de lady Jersey va épouser la fille de sir Robert Peel; que lady Palmerston est la plus révolutionnaire et la plus enragée d'avoir à quitter le Ministère. Tous ces on-dit sont assez vides et vagues.

      La duchesse de Montmorency dit le mariage de Mlle Vandermarck, fille de l'agent de change, avec le comte de Panis, propriétaire du beau château Borelli, près de Marseille.

      Günthersdorf, 31 juillet 1841.– M. Bresson m'écrit de Berlin, qu'il y attend, du 15 au 20 août, le général de Rumigny que le Roi de Prusse a fait inviter aux manœuvres de Silésie et de Berlin. C'est à la même époque, me dit-il, que M. et Mme Thiers doivent arriver à Berlin.

      Le duc de Noailles m'écrit que lady Clanricarde passera l'hiver prochain à Paris, et qu'on croit lord Cowley appelé à la succession de lord Granville. Il ajoute que la petite Rachel venait d'arriver à Paris; qu'il n'y avait que le maréchal Soult dont le triomphe en Angleterre pût être comparé au sien; qu'il avait reçu de ses lettres, de Londres, dans lesquelles elle montrait tout le ravissement de ses succès, sans que (nouveau prodige!) ils lui tournassent la tête. Je crois celle du Duc moins ferme dans cette circonstance.

      Günthersdorf, 1er août 1841.– Mme de Perponcher me mande que le Roi de Hanovre est au dernier degré du désespoir de la mort de sa femme qu'il paraît avoir admirablement soignée. Il s'était longtemps fait illusion sur son état: quand les médecins lui ont annoncé qu'elle était désespérée, il est resté comme atterré. Cependant, aussitôt qu'il a eu repris ses spirits, il est entré chez la Reine et lui a parlé de ses devoirs religieux, comme un catholique aurait pu le faire. La Reine a reçu cette terrible annonce avec la plus grande fermeté; elle a communié avec le Roi, sa fille, la duchesse d'Anhalt et le pauvre prince Georges. Le désespoir de celui-ci a été déchirant: ne pouvant voir sa mère, il ne pouvait se persuader qu'elle fût morte, et a demandé qu'on lui fit toucher ses restes; dans le moment où le père a mis la main glacée de la mère dans celle du fils, le pauvre aveugle a été saisi comme d'un accès de folie; on l'a, depuis, fait partir pour les bains de mer. Ces détails sont cruels et vraiment très attendrissants.

      Günthersdorf, 6 août 1841.– Mes sœurs sont ici depuis le 1er de ce mois et paraissent s'y plaire assez, malgré le temps détestable que nous avons.

      J'ai reçu hier une lettre de M. Bresson qui me dit: «Rien de positif de Paris; M. de Flahaut a refusé Turin et il évite de se prononcer sur l'offre de Madrid; il s'en tient, dit-il, à la promesse qui lui a été faite de Vienne, ce que M. Guizot n'admet pas. Faite ou non, il se donne tout le mouvement possible pour qu'elle s'accomplisse, et Mme de Flahaut guette, d'Ems, l'arrivée de M. et de Mme de Metternich au Johannisberg. Pour moi, je conserve mon attitude expectante, fort décidé à ne quitter Berlin que pour Vienne ou Londres.

      «M. de Werther a donné sa démission de ministre des Affaires étrangères. Il sera remplacé par le comte Maltzan, mais on ne sait pas encore qui remplacera celui-ci à Vienne. Le Roi a accordé à Werther l'Aigle noir et a rendu héréditaire dans sa famille le titre de Baron, qui jusqu'à présent n'avait été que personnel. Arnim, de Paris, est nommé Comte.

      «Les affaires de Toulouse36 m'inquiètent plus; aucune autre ville de France n'a imité ce triste exemple: Les journées de Juillet ont été célébrées avec ordre. L'emprunt ne sera pas nécessaire en totalité; les brèches financières se réparent, et il nous restera la France retrempée et sa force militaire réorganisée. Que tout cela ne profite qu'à la paix, je le désire ardemment.»

      Voilà la prose, ou si on aime mieux, la poésie de M. Bresson.

      Günthersdorf, 7 août 1841.– J'ai reçu une lettre de M. Molé, qui se plaint de sa santé, traite les troubles de Toulouse et tout l'état de la France avec autant de tristesse que M. Bresson en parlait avec satisfaction dans la lettre citée hier.

      La duchesse de Montmorency m'écrit que Mgr Affre, ayant défendu à M. Genoude de prêcher, celui-ci est venu lui demander le motif de cette interdiction. Monseigneur a répondu que c'était à cause de ses opinions anti-gouvernementales. M. Genoude s'est fâché et a répliqué que, si Monseigneur persistait dans cette défense, il ferait imprimer tout ce que Mgr Affre a écrit, il y a quelques années, contre la Monarchie de Juillet, et dont il a en mains les pièces originales et signées. Sur ce, l'Archevêque s'est radouci, et M. Genoude prêchera. Voilà, ce me semble, une attitude épiscopale bien digne! Cela me fait faire des comparaisons avec le passé, et me confirme dans ma conviction que Mgr de Quélen a été le dernier véritable Archevêque de Paris. Le temps actuel ne semble plus comporter aucune grande et noble existence en aucun genre. Tout se réduit, tout s'avilit et s'aplatit.

      Günthersdorf 16 août 1841.– En mettant cette date à ce papier, je ne puis m'empêcher d'être saisie au cœur par un souvenir qui me sera toujours cher et sacré: c'est aujourd'hui la Saint-Hyacinthe, la fête de feu Mgr de Quélen! Je suis sûre qu'au Sacré-Cœur on entend la messe à son intention. Pendant bien des années, on lui portait, ce jour-là, un arbuste de ma part. Il y a deux ans, encore malade, à Conflans, il fit entrer mon domestique qui lui portait un oranger, et me fit écrire, par Mme de Gramont, que de tous les bouquets qu'il venait de recevoir le mien lui avait fait le plus de plaisir. Je ne puis, maintenant, que lui adresser des prières dans le Ciel. Je me figure souvent qu'il y est réuni à Celui pour lequel il a tant prié lui-même, et que tous deux demandent pour moi, à Dieu, la СКАЧАТЬ



<p>36</p>

La question du recensement avait agité les habitants de Toulouse, dans les journées des 9 et 10 juillet. Ces troubles paraissaient apaisés, quand tout à coup éclata le 12 une émeute sérieuse: de nombreux rassemblements parcoururent les rues, des barricades furent formées, et la journée du 13 fut très menaçante. La ville fut sauvée par la sagesse du maire par intérim, M. Arzac, qui sut habilement ramener le calme et la tranquillité.