Chronique de 1831 à 1862, Tome 3 (de 4). Dorothée Dino
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Название: Chronique de 1831 à 1862, Tome 3 (de 4)

Автор: Dorothée Dino

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ six semaines chez lui, en Auvergne, puis restera l'hiver ici, et ne retournera qu'au printemps à Saint-Pétersbourg. Sainte-Aulaire est parti, il y a quarante huit heures, pour son nouveau poste à Londres. Sa femme ne le rejoindra qu'au mois de février, et Mme de Flahaut n'ira à Vienne qu'après avoir marié sa fille Émilie, pour laquelle il ne se présente pas encore d'épouseur.

      Voilà Bertin l'aîné mort, et Bertin de Veaux avec une nouvelle attaque!

      Paris, 21 septembre 1841.– Mme de Lieven m'a relancée hier de très bonne heure. Elle venait pour questionner, et ne m'a rien raconté. Elle pourra répéter à l'Europe ce que je lui ai dit du coin que je connais! J'ai pris le parti de dire du bien de tout le monde, ce qui l'a impatientée! J'ai fini par lui dire que, partout, on croyait et disait que c'était elle qui faisait et défaisait les ambassadeurs, ce qui l'a embarrassée! Du reste, ce que je disais là était vrai; on le croit partout, et je crois qu'on a raison de le croire. Elle m'a invitée à dîner jeudi à Beauséjour.

      Humboldt est venu à son tour. Je lui ai conté la Silésie. Enfin, M. de Salvandy est arrivé, ravi d'être ambassadeur à Madrid, et se réservant de revenir pour la session de la Chambre des Députés, et d'y garder sa vice-présidence. Mon fils Valençay est venu dîner avec moi, et m'a appris la mort du vieux Hottinger, qui me fait de la peine; c'était un homme très honorable, attaché à feu M. de Talleyrand, et ami de Labouchère. Il y a là bien des souvenirs d'un passé qui s'efface extérieurement avec une effrayante rapidité.

      Il y a une petite émotion permanente dans les quartiers éloignés de Paris. On n'en comprend pas même le but; mais il me semble que ce soit comme l'état normal de Paris. Revenir aux grands éclats de 1831! C'est se rajeunir sans se fortifier, quand il faudrait se vieillir pour se grandir. Heureusement que les troupes sont excellentes partout; mais aussi, il en faut partout. On est fort décidé et même désireux à s'en servir vigoureusement; c'est très bien, mais qu'il est heureux de le pouvoir, et de n'avoir pas une guerre extérieure à côté des plaies du dedans!

      Mes lettres d'Auvergne ne sont pas satisfaisantes41. Décidément, Pauline passera son hiver dans le midi, à Rome si je ne vais pas à Nice. Elle désire si vivement me revoir, que je me décide pour Nice, où j'irai au mois de décembre pour en revenir au mois de mars. J'espère que ce sera bon aussi pour ma nièce Fanny. Pour moi, personnellement, c'est un grand sacrifice; j'aurais besoin d'un long repos, et de me caser pour longtemps à Rochecotte; mais Pauline est réellement malade, elle me désire beaucoup, et me l'exprime si tendrement; son mari se joint à elle avec tant d'insistance, qu'il n'y a pas à hésiter.

      Paris, 22 septembre 1841.– J'ai été, hier soir, avec mon fils Valençay à Saint-Cloud, où j'ai pu, tout d'une fois, voir la Famille Royale réunie, même les Majestés belges. Tous partent pour Compiègne. La Reine avait des nouvelles du prince de Joinville, de Terre-Neuve. Il se dirigeait vers Halifax.

      Paris, 23 septembre 1841.– J'ai vu hier l'abbé Dupanloup, qui m'a dit avoir en sa possession une correspondance de M. de Talleyrand avec le cardinal Fesch, du plus grand intérêt, et aussi celle de M. de Talleyrand avec le Chapitre d'Autun, aux époques les plus délicates et les plus difficiles; il est d'autant plus heureux de ces découvertes, qu'elles confirment son système sur M. de Talleyrand, et font, en général, beaucoup d'honneur à celui-ci.

      J'ai été dîner hier à Beauséjour, chez Mme de Lieven, et j'y ai mené Barante, qui était prié. Les autres convives étaient le duc de Noailles, M. Guizot et M. Bulwer. La conversation a été assez animée et variée, et celle de Barante de beaucoup la plus naturelle et la plus agréable. Quant à des nouvelles, on n'en disait pas.

      Paris, 26 septembre 1841.– J'ai été hier, à Champlâtreux avec le baron de Humboldt. Le temps nous a été fort contraire, et a gâté cette course. Je connaissais Champlâtreux d'ancienne date. Les années ne lui ont pas nui, au contraire, car M. Molé l'a noblement arrangé, c'est-à-dire, que ce qui est arrangé est bien, mais il faudrait continuer, et surtout enlever aux grands appartements les tout petits carreaux des croisées, qui nuisent à l'effet général. A tout prendre, c'est une noble demeure, point du tout féodale, mais grave, parlementaire, telle qu'elle convient au descendant de Mathieu Molé, dont, avec raison, le souvenir est partout. Ce qui est très bien, c'est que le portrait de la grand'mère, fille de Samuel Bernard, est dans le grand appartement. C'est avec sa dot que le grand-père de M. Molé a bâti le château actuel. Le parc est beau et largement dessiné. M. et Mme Molé sont de fort gracieux et aimables maîtres de maison.

      C'est de Paris à Saint-Denis que les fortifications sont le plus avancées. Cela est, pour le moment, tout simplement affreux, et représente le chaos!

      L'événement d'hier (car, dans ce pays, chaque jour a le sien) a été l'acquittement vraiment scandaleux du National42. Il faut convenir que nous avons ici de bien mauvais visages.

      Paris, 1er octobre 1841.– J'ai vu hier, chez moi, M. Guizot, auquel je voulais parler en faveur de Charles de Talleyrand, qui, j'espère, ira bientôt rejoindre M. de Sainte-Aulaire à Londres. M. Guizot m'a appris que c'était décidément lord Cowley qui serait ambassadeur à Paris. C'était le choix désiré ici. Sir Robert Peel a refusé à lord Wilton et au duc de Beaufort des charges de Cour, disant qu'il fallait, auprès d'une jeune Reine, des personnes plus sérieuses, et d'une moralité moins douteuse. Le duc de Beaufort a refusé l'ambassade de Saint-Pétersbourg, et le marquis de Londonderry celle de Vienne. Tous deux voulaient Paris; ils ont beaucoup d'humeur de ne pas l'obtenir, et forment déjà un petit centre d'opposition.

      M. Guizot explique comme ceci les deux nominations, assez singulières, de M. de Flahaut, comme ambassadeur à Vienne, et de M. de Salvandy à Madrid. C'est qu'il a trouvé de bonne politique d'enlever l'un à M. Thiers et l'autre à M. Molé. C'est une admirable explication, et très utile aux intérêts du pays!

      Courtalin, 3 octobre 1841.– Je suis arrivée hier soir ici, après avoir dîné et couché à Jeurs, chez Mme Mollien. Me voici au milieu de toute la famille Montmorency, dont une grande partie se trouve ici en ce moment.

      Rochecotte, 7 octobre 1841.– Me voici enfin rentrée dans mon petit Palazzo où je suis arrivée hier dans la matinée, enchantée de m'y retrouver, et de voir tous les arrangements et embellissements qui y ont été faits pendant mon absence.

      Rochecotte, 12 octobre 1841.– J'ai employé tous les derniers jours à l'arrangement de ma nouvelle bibliothèque et au placement des livres. Cela m'a un peu fatiguée, mais fort amusée. Mon fils et ma belle-fille Dino sont arrivés, ainsi que ma nièce Fanny et sa gouvernante qui ont passé quelques jours à Paris, après mon départ.

      J'ai eu hier la visite de la Supérieure des Filles de la Croix, de Chinon, cette sainte fille qui, au printemps dernier, venait d'être administrée quand je fus la voir; cette bonne sœur prétend que c'est depuis ma visite qu'elle a commencé à aller mieux. Elle m'a apporté des chapelets, et a désiré prier dans ma chapelle; elle a enlevé ma lithographie d'une chambre où elle l'a trouvée, et n'a pas eu beaucoup de peine à me décider à fonder une place d'orpheline dans l'établissement qu'elle dirige. J'ai donc acquis le droit d'envoyer une orpheline du village de Saint-Patrice, dont Rochecotte fait partie, recevoir une éducation chrétienne chez ces excellentes dames, et je vais procéder aujourd'hui au choix.

       Rochecotte, 14 octobre 1841.– On est fort occupé à Paris de la nouvelle face des affaires d'Espagne. La guerre civile y est vraiment rallumée; tout cela fait horreur, et tournera, en définitive, au massacre de l'innocente Isabelle43. La Reine Christine n'a aucune envie de quitter Paris, où elle s'amuse. Elle a la terreur de rentrer en Espagne, dont elle parle avec СКАЧАТЬ



<p>41</p>

Le marquis et la marquise de Castellane y étaient établis, dans leur terre d'Aubijou.

<p>42</p>

Le National ayant publié, au sujet des troubles de Clermont, une correspondance remplie de faussetés et d'invectives contre la Monarchie, fut accusé d'avoir porté atteinte à l'inviolabilité du Roi, et soumis à un jugement. Le 24 septembre 1841, il était déclaré, par le jury de la Seine, non coupable des délits qui lui étaient imputés, et il fut acquitté.

<p>43</p>

Le 7 octobre 1841, à 8 heures du soir, les généraux Léon et Concho, profitant de l'arrivée à Madrid d'un régiment que ce dernier avait commandé, et qui lui était dévoué, voulurent tenter un coup de main pour enlever la Reine et l'Infante: ils se rendirent au Palais à la tête d'un escadron de la garde royale et, tandis qu'un régiment entourait le Palais, ils montèrent aux appartements de la Reine, heureusement bien gardés par les hallebardiers, qui opposèrent une vive résistance, les reçurent à coups de fusil et les repoussèrent à plusieurs reprises. – Espartero déjoua ce complot militaire et fit fusiller, le 15 octobre, le général Diégo Léon.