Madame Putiphar, vol 1 e 2. Petrus Borel
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Название: Madame Putiphar, vol 1 e 2

Автор: Petrus Borel

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ donc! va donc! va donc! En veux-tu encore?

      – Assez, assez, Chris! tu fais comme harlequin, tu t’amuses à tuer les morts.

      Neuf heures sonnent: ou m’attend pour le banquet. Essuye mon épée: rends-la-moi; et va changer de vêtement.

      Lord Cockermouth rentra au salon, s’excusa de son absence, et pria ses hôtes de vouloir bien passer dans la salle du festin. Immense galerie de toute la profondeur du château, aboutissant au jardin, et y communiquant par un vaste perron en éventail. La voûte en tiers-point étoit ornée entre les nervures d’un semis d’étoiles sur fond d’outremer. Les parois étoient revêtues de lambris de chêne sculptés grossièrement. Des débris d’armures et de pertuisanes rouillées couvroient les piliers alternant les grandes fenêtres à meneaux de pierre et à vitraux coloriés.

      Dans la longueur de cette galerie une table de cent cinquante couverts se trouvoit dressée avec un luxe royal. Au milieu lord comte Cockermouth étoit placé vis-à-vis de lady; à la gauche de laquelle on avoit réservé une place pour Déborah, que redemandoit sans cesse son aimable futur. Comme la comtesse s’inquiétoit fort aussi de cette absence, le comte appela Chris, et lui dit, en faisant quelques signes d’intelligence: – Allez voir si ma fille ne seroit point en son appartement, et blâmez-la de son impolitesse.

      Chris, la mine ébahie, revint presque aussitôt, en s’écriant: – Mon commodore, je n’ai point trouvé mademoiselle!

      Cockermouth fit un mouvement de surprise. Chris s’approcha de lui, et ajouta tout bas: – Pourtant les portes étoient fermées, et les bougies brûloient encore…

      A ces mots, il pâlit, et son bras, avancé pour saisir un flacon, tomba inerte sur la table.

      Toute l’assemblée remarqua le trouble étrange de son hôte.

      XI

      A peine lord Cockermouth et Chris s’étoient-ils éloignés de leur victime, que Patrick arriva au rendez-vous par le chemin creux de Killarney. En approchant de la terrasse, son cœur gros d’inquiétude, tressaillit d’ivresse: dans le silence, un léger bruit d’haleine et de soupirs venoit caresser son oreille.

      – To be!.. dit-il alors: mais nulle voix n’acheva la phrase de ralliement. To be! répéta-il avec plus de force.

      Un râlement partit à ses pieds, et une voix mourante murmura: Or not to be.

      – Qui donc m’a répondu? est-ce l’ombre d’Hamlet, ou est-ce vous, Déborah?

      Alors, il apperçut un corps étendu en travers du chemin, et s’écria, tombant à deux genoux: – Debby assassinée!

      Baignée dans son sang, elle avoit encore la face tournée contre terre. Il la releva et la fit asseoir sur l’herbe, en la soutenant dans ses bras, et cherchant par ses baisers à ranimer ses paupières closes.

      – Debby! ô ma Debby! jette un dernier regard sur Patrick. C’est moi! c’est ton bien-aimé! M’entends-tu? Parle, où sont tes blessures?

      – Patrick? Hélas! c’est toi! Va-t’en, ils te tueroient aussi les cruels!..

      – Qui?

      – Va-t’en! ne les vois-tu pas? ils vont te tuer! Fuis!.. Ils ont juré ta perte.

      – N’aie pas peur. Dis où sont tes blessures, que je les étanche!.. Dis, connois-tu tes meurtriers?

      – Tes soins seront vains, Patrick, je n’ai plus qu’à mourir… Ne me demande pas le nom de mes assassins! Il est de ces choses qu’on ne peut dévoiler: c’est un secret entre le ciel et moi. – Mon ami, avant que j’expire, pardonne-moi et bénis-moi! Pardonne-moi! Tout à l’heure, quand je suis tombée atteinte d’un coup de feu, mon esprit a conçu une horrible pensée dont le souvenir me glace de honte: oui! il faut que je te le dise!.. Je t’ai accusé de mon meurtre: oh! que je suis ingrate et coupable envers toi! et si mes égorgeurs m’eussent frappée en silence, j’aurois cru mourir par tes mains. Patrick, ne me maudis pas!

      – Abomination! moi t’égorger, Déborah! vous n’avez pas foi en moi, Debby; cette pensée est l’œuvre du doute qui règne en votre âme.

      – Non, Patrick, elle fut l’œuvre de mes esprits éperdus et de mes douleurs.

      – Ce n’est pas l’instant, ce n’est pas l’heure des reproches, Déborah, je t’aime et te pardonne. A toi mon âme! à toi mon sang! à toi ma vie!.. Dis, que faut-il que je fasse?.. nomme-moi donc tes assassins! Pour la première fois mon cœur comprend le meurtre! pour la première fois la vengeance le déborde!.. J’ai besoin d’anéantir!.. je tuerai!..

      – Vous oubliez Dieu, Patrick.

      Ces simples mots éteignirent subitement sa passion, et chassèrent son délire.

      – Votre voix est un baume qui calme, Debby, et vos paroles sont de la rosée.

      Il me semble, Debby, que vos forces reviennent? Sans doute vos blessures sont moins graves que vous ne le pensiez? vous ne pouvez rester plus long-temps sans secours: dites, où faut-il que je vous conduise.

      – En effet, je me sens mieux; la balle ne m’a frappée qu’à la jambe; l’obscurité m’a sauvée presque entièrement des coups d’épée. Aidez-moi seulement à me relever, je suis encore assez forte pour me traîner jusqu’au château. Mais, toi, mon Patrick, au nom du Ciel, je t’en supplie, va-t’en! tu n’es pas en sûreté ici: on en veut à tes jours, te dis-je! c’est toi qu’on a cru frapper en me frappant. Fuis!..

      – Fuir! Et quoi donc?.. La mort? Non, qu’elle vienne! je la recevrai avec joie. Sans toi que me peut être la vie?

      – Patrick au nom de Dieu cède à mes prières. Sur une terre étrangère, on a besoin d’or: prends cet écrin plein de joyaux que j’emportais; et pars en France, comme nous devions le faire touts deux. En cet état, je ne puis te suivre; mais crois à mon serment: sitôt que j’aurai recouvré quelque vigueur, je t’y rejoindrai.

      – Fuir sans toi! plutôt la mort!

      – Écoute mes prières: tu ne peux demeurer en ce pays plus long-temps, tu te perdrois et tu me perdrois. Si ce n’est ce soir, demain tu serois immolé! Que t’importe de me devancer en France de quelques jours. Pars; va tout préparer pour ma réception, pour la réception de ton épouse.

      – Ne peut-il pas être des obstacles qui t’empêcheront de me rejoindre en mon exil?

      – Il n’en peut plus être, Patrick; tout est changé, je ne m’enfuirai plus, je partirai devant touts, en plein jour. Je n’ai plus à trembler, maintenant c’est devant moi qu’on tremblera.

      Tu viens de trahir ton secret, Debby, je connois ton meurtrier, qui devoit être le mien: tu me l’as nommé: c’est celui devant qui tu tremblois… Celui-là même a versé son propre sang! celui-là même a assassiné sa fille! C’est ton père!..

      – Aide-moi à marcher, mon ami, et reconduis-moi jusqu’à l’entrée du clos.

      – Tu souffres affreusement, pauvre amie, ne fais pas d’efforts pour me cacher tes douleurs; laisse passer tes soupirs, laisse couler tes pleurs. Mon Dieu! jusques à quand amoncelerai-je sur sa tête malheur sur malheur! – Je te l’avois bien dit, je suis maudit СКАЧАТЬ