Madame Putiphar, vol 1 e 2. Petrus Borel
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Название: Madame Putiphar, vol 1 e 2

Автор: Petrus Borel

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ Croyez bien que j’ai assez de force pour résister à l’impulsion d’un sentiment qui nous perdroit, et qu’une impression passagère ne détruira pas l’œuvre délibérée de ma raison.

      »Je suis toujours enfermée dans ma chambre, et ne vois point mon père, que maman espère bientôt appaiser. Il doit, assure-t-elle, m’accorder une amnistie générale pour sa fête; d’autant plus qu’il y est presque obligé pour la présentation de mon nouveau prétendu.»

      Le 12, Déborah trouva ce mot.

      «J’accuse réception de votre lettre. De grâce, noble amie, si vous avez quelques préparatifs à faire pour votre départ, faites-les dans le plus grand secret: craignez l’activité des espions de votre père, puisque vous êtes toujours en guerre ouverte. Vous savez à quel jeu nous jouons et vous connoissez notre enjeu.

      »Ma vie n’est plus qu’une palpitation continuelle; mon âme est comme une hirondelle qui se balance sur un rameau flexible, battant des ailes, essayant son vol, avant de prendre son essor pour un rivage sans hiver.

      »La face tournée vers l’Orient, je demeure debout comme un Hébreu mangeant la Pâque; les reins ceints, appuyé sur un bourdon.»

      Le 13, Déborah répondit:

      «My dear Coulin,

      »Mon esprit reste ébahi, quand je songe à ce que peut une volonté invincible; et quand je songe que l’homme ne fait aucun usage de sa volonté, qui pourroit toujours être invincible. Sans doute cela est pour le bien de la société, car, si chacun de ses enfants avoit une volonté formelle, individuelle, spontanée, demain la société seroit morte.

      »Les trompettes au son desquelles s’écroulèrent les murs de Jéricho, sont les symboles parlants de la volonté; sonnez-là, et les plus épaisses murailles tomberont.

      «Après demain, les fers qui doivent enchaîner notre vie, les murs du cachot où elle devoit pourrir crouleront au son de notre volonté, et combleront l’abyme qui nous sépare.»

      Le 14, Déborah ne put sortir qu’à la tombée du jour: entre-chien-et-loup, elle se glissa par les avenues détournées jusques au Saule-creux, et, avec l’empressement de la joie, elle s’agenouilla pour exhumer le coffret d’acier; mais son couteau entra dans la terre tout entier, sans aucun choc: – point de coffret!

      Cette déception fut d’autant plus stupéfiante que la joie pressentie avoit été vive. Ses bras s’appesantirent, sa tête s’abandonna à son propre poids, son regard immobile resta fixé sur la terre; le travail de sa pensée, comme une horloge dont la chaîne s’est brisée, s’arrêta.

      Revenue de ce premier étonnement, cette disparition s’expliqua simplement à son esprit: – Patrick, se dit-elle, n’aura pas voulu laisser enfoui ce coffret auquel il tenoit beaucoup, il n’aura pas voulu abandonner ce confident fidèle et secret, ce bijou qui pour nous exhalera toujours un doux parfum de souvenirs! Patrick sera venu le déterrer, Patrick a bien fait!

      Et, satisfaite de la bonne action de son ami, elle regagna le château.

      IX

      Qui va là? – s’écria lord Cockermouth entendant marcher dans son appartement, où, depuis le dîner, il s’occupoit avec lady de l’ordonnance du banquet du lendemain. Qui va là?

      – C’est moi, mon commodore.

      Et Chris, s’approchant par derrière, se pencha à l’oreille du comte. – Il y a du nouveau, dit-il, j’ai quelque chose à vous communiquer.

      – Madame, voulez-vous me faire la faveur de vous retirer? j’ai besoin d’être seul avec Chris.

      La comtesse, qui avoit remarqué le chuchotement mystérieux et insultant du valet, se leva avec un geste d’indignation et sortit.

      – Mon commodore, tout à l’heure, en promenant Bérébère, votre cavale, j’apperçus, rôdant sur les bords du torrent, master Pat: je descendis aussitôt de cheval, et je me glissai dans les broussailles pour l’épier; je le vis s’arrêter sous le Saule-creux, fouiller la terre, en retirer une boîte, puis la remettre en terre et s’éloigner.

      Alors, avec précaution, je me glissai au pied du saule, je creusai au même endroit, et je déterrai ce coffret d’acier que voici: le fermail est à secret, il m’a été impossible de l’ouvrir.

      Après bien des efforts, à coups de hache, ils parvinrent à effondrer le couvercle. Un billet fraîchement cacheté s’y trouvoit seul: Cockermouth s’en saisit avidement. Pendant qu’il le parcouroit du regard sa figure changea plusieurs fois d’expression; la curiosité fit place à la surprise, la surprise à la rage étouffée.

      Le soir, lorsque Chris vint pour le débotter du comte, il le trouva au milieu de sa chambre, debout, immobile comme un Hermès dans sa gaine, la tête penchée et les yeux engloutis sous ses sourcils refrognés; il fumoit.

      – Chris, tu as donc de la rancune, tu as donc une rancœur contre Pat?

      – Oui, commodore, un vieux levain de haine que je garde là, et qui n’en démarrera pas!

      – Et d’où vient cette haine?

      – D’un affront sanglant, mon commodore. Il y a bien de cela deux ans; un dimanche, j’offris à Pat, d’entrer avec moi à la taverne. En pleine place, Pat me fit un refus, prétendant qu’il avoit pour habitude de ne boire qu’à ses repas, et de l’eau. – Tu ne veux pas boire avec un vieux matelot? lui dis-je, tu fais bien le gros-bonnet, mon bouvier! – Monsieur Chris, puisque vous faites l’insolent, me répliqua-t-il, je vous déclarerai que je n’ai jamais bu et ne boirai jamais avec un Anglois, si ce n’est dans son crâne. – Là dessus, mon commodore, enflammé par ces injures, oubliant que le temps étoit loin où je brisois un François sur mon genou comme une baguette, je m’élançai sur lui et je le frappai violemment; mais lui, jeune et vigoureux, de deux ou trois coups de poing m’assomma, aux grands applaudissements de tout le village, qui crioit: Mort à l’Anglois!

      Oh! j’ai cela sur le cœur! ça m’y pèse comme un boulet, mon commodore. Chris, avaler un pareil affront! Chris, un ancien flibustier! Chris, le tigre d’abordage! Chris, l’anthropophage! comme on m’appeloit. Dieu me damne! je ne veux pas qu’on enterre ma haine! je ne partirai pas de ce monde sans avoir mis le genoux sur sa poitrine et mon couteau dans sa chienne de gorge!

      – Veux-tu associer ta haine, Chris?

      – Vous me faites trop d’honneur, commodore.

      – Veux-tu associer ta vengeance?

      – Vous me faites trop d’honneur, mon commodore.

      – Va chercher deux bouteilles de rum et ta pipe.

      – Chris revint aussitôt garni de provisions, et le comte referma sur lui les portes aux verrouils…

      Les gents du château remarquèrent de la lumière, toute la nuit, dans la chambre de leur seigneur.

      X

      Les extorsions du comte, sa haine publique pour les Irlandois, la cruauté avec laquelle il avoit traité les malheureux tombés entre ses mains, dans les soulèvements du midi de l’Irlande, ne lui avoient pas gagné СКАЧАТЬ