Journal du corsaire Jean Doublet de Honfleur, lieutenant de frégate sous Louis XIV. Doublet Jean
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СКАЧАТЬ que reconnut mon chirurgien par une esquille qu'il en retira, et je ne m'aperceut de ma blessure qu'après le combat et que j'étois remply de sang, j'eus quatre de mes hommes tuez, deux estropiez, l'un d'un bras et l'autre de la cuisse cassée et six moyennement blessés, dont j'étois le 7e. Je courois après mes prises qui avoient déjà dépassé une lieue d'Ostende, où je craignois le plus, il se trouva une corvete de quatre canons sortye de Nieuport qui enleva la plus petite de mes prises avant que je les eût pu joindre et auroit enlevé l'autre sy je m'étois trouvé à tems de l'en empescher; je la conduit au port où il falut que j'entras avec ma frégate pour la raccomoder des coups de canons qu'elle avoit reçeus et pour me faire guérir et mes blessés.

      Pendant mon absence dans ce petit voyage il y eut une lettre de Holande à mon adresse à la poste; elle fut portée à M. l'Intendant de la marine, et comme étant un peu rétably de ma playe je le fus saluer. Après quoy il me demanda quelle habitude et relation j'avois en Hollande et avec quy, étant en guerre. Je luy dits que j'avois paine à savoir de quelle part elle me venoit, excepté M. de Ruiter avec lequel j'avois lié amittié en Angleterre. Il la demanda à son secrétaire et me la rendit cachetée dizant: «Voyons ce que l'on vous écrit.» Je lui redonnai sans l'ouvrir, et il me dit: «Ouvrez et la lisez haut.» Je la leut et luy donnai à voir si je n'avois rien déguizé. Elle contenoit de ce que j'avois esté longtemps sans luy écrire et bien des honnestetés et ammittiez et m'ofroit de l'aller trouver, il me procureroit ma fortune en me marquant entre autre que si je n'étois pas pourvu, que j'eus à l'aller trouver et qu'il étoit dans l'état de m'avancer et me donner le commandement d'un vaisseau des Etats. Sur quoy M. l'Intendant me dit: «Voudriez-vous prendre les armes contre le Roy et estre traitre à l'Etat.» Je protestay que non: et il me dits: «Je vous défends d'avoir plus de commerce de lettre avec ce M.» Je lui demanday seulement la permission que je peuts répondre cette fois à ces honnestetez et le prier de ne me plus écrire que la guerre ne futs finie et que cela me feroit préjudice et que je donnerois ma lettre à son secrétaire pour lui communiquer avant de l'envoyer, ce qu'il trouva bon.

      Après estre bien guéry et ma frégate bien redoublée et renforcé mon équipage, je sorty du port le 26 de mars et fut droit à l'entrée de la Tamise, entrée de Londres, et le surlandemain je fus bien chassé par deux gardes costes d'Angleterre lesquels nous penssèrent faire périr à force de porter les voilles d'un tens de neige et très rude, et nous avions déjà trois pieds d'eau dans nottre calle quand j'arivé à la rade de Dunkerque où ils m'abandonnèrent, et deux jours après je repris la mer et fut croiser, sur le banc des Dogres où j'en prits un qui avait quarante-deux barils de morue blanche salée; je l'envoyai au hazard par dix de mes gens et arivèrent heureusement. Six jours après je pris un flûton d'environ 90 thonneaux venant de Portugal avec du sel, 28 pipes d'huille d'olive, 6 balles de laine lavée, et de plusieurs caissons d'orange et de citrons, et je la conduits heureusement à Dunkerque. Nostre biscuit se trouva gasté dans la soute par la grande eau que nous eusmes lorsque les Anglois m'avoient chassé cy-devant, il me fallut rentrer et désarmer la frégatte. Je ne pus réquiper ny sortir avec ma frégatte qu'au 10 octobre parcequ'il nous fut fait deffense à tous les particuliers d'engager aucun matelots que M. Bart n'eut acomply les équipages de son escadre, et après quoy je fits en peu de temps la mienne, ainsy que deux autres frégates de mes confrères, et sortismes de compagnie et douze jours après nous fusmes très mal traités des tempestes, qui nous séparèrent. Je couru vers les costes d'Ecosse en vue de trouver quelque abry au risque d'estre prisonnier de guerre plutots que de périr, mais le vent cessa après neuf jours de tourmente; j'aperceu un moyen navire sur le soir et je fits semblant d'aler une autre route que luy. Et aussi tots qu'il fit bien nuit nous redonnasmes après luy à petite voilure; et au clair de la lune, sur les 4 heures du matin, nous en eusmes connoissance, et ne l'aprochasmes pas plus près, et le jour venant nous fusmes après iceluy, que nous prismes sur les neuf heures, et c'étoit une grande barque que les Flessinguois avoient prises sur notre nation venant de l'ille Madère, chargée de grosse écorce de citrons confits et du vin; je la conduisois jusqu'au travers de la Meuze où je futs rencontré par deux frégates de Zélande, l'une de 24 canons et l'autre dix-huit, qui coururent droit à ma prize et s'en empara et celle de 24 me batoit en ruine et m'aborda et ne sauta que 3 de ses hommes dans nous, et nous décrocha ayant son mât de beaupré rompu à l'uny de son étrave, je luy donnay la décharge de nos canons et de mousqueteries, et celle de 18 canons étoit trop soubz le vent pour nous ratraper, j'eus huit hommes tuez et 15 à 16 blessés, sans estre estropiés, et il nous falut rentrer au port bien batus, et sans prise; nous y aprismes qu'un de ceux qui avoit sorty avec nous avoient péry corps et biens, et que l'autre étoit revenu sans rien faire à sa course, ayant penssé aussy périr par la tempeste que nous eusmes.

      En mars, 1677, je ressorty avec ma mesme frégatte; je fits plusieurs moyennes prises que j'envoyois par mes gens, n'étant de valeur, et elles furent toutes reprises; je parcouru aux costes de Norvègues sans y rien trouver, et m'en revenant pour désarmer je rencontré plusieurs navires marchands holandois, lesquels avoient trop de force pour que je les peus ataquer, étant affoibly de mon équipage par les petites prises dont j'ay parlé; cela me dégousta de retourner avec un navire d'aussy peu de force, me ressouvenant des hazards que j'y avois encourus, et lors que je l'eus désarmée, je remerciay MM. les inthéressés par l'advis de mon ancien capitaine qui me promit la place de second capitaine avec luy sur la frégate de 30 canons, dans l'escadre de M. Pannetier qui comandoit l'Etroitte de 40 canons.

      Nous sortismes six frégates sur la fin de may, nous fusmes cinq mois à croiser sans avoir encontré ny fait rien de remarquable, et après quoy l'on nous désarma tous à notre retour.

      En juillet 1678 la cour ordonna à Mrs Le Pannetier et Bart de r'armer et de se diviser en mer leur escadre, je retournay avec mon premier capitaine. Nous fusmes aux iles Orcades entre Fulo et Faril y atendre les Indiens dont on avoit advis de leur retour pour Hollande, mais Mrs les Etats toujours bien advisés, avoient envoyé audevant plusieurs galiotes bonnes voilières avec des pilotes costiers pour les bancs et des rafreschissements et vivres, nous donasmes plusieurs chasses sur ces galiotes sans en pouvoir atrader; cela nous tira du bon parage où nous étions. Et y ayant retourné nous aprismes par un bateau pescheur de ces illes que la flotte de dix de ces vaisseaux avoient passé il y avoit trois jours, et que par les maladies ils avoient bien perdu de leurs équipages; nous courusmes après jusqu'à l'ouvert du Texel sur le Bree Vertin sans rien trouver, cela nous unis tous en consternation. Les vivres aloient nous manquer et prêts à nous en retourner, lorsque sur le banc des Dogres, nous aperçusmes deux gros navires, nous creusmes estre quelque Indiens, nous les atrapasmes en peu de tems à portée de nos canons et ils furent bientots rendus. C'étoit deux pinasses de 7 à 800 thonneaux, avec un 36 canons et l'autre 30, lesquels venoient de Suirinan et Curassao chargés de bonnes marchandises comme sucre, indigo, cuirs, rocou et bois du Brésil et Campesche. Nous les escortasmes soigneusement jusqu'à Dunquerque, où nous désarmasmes tous, et on parloit de la paix, et à la fin du déchargement de la grande prise on trouva 26,000 piastres.

      Mr Bart avoit rentré au port huit jours avant nous, et y avoit amené 20 buschs avec du haran et en avoit fait brusler 32 et enleva aussy leurs convois qui étoit le Mars de 40 canons, et le Prince Peerts de 24. Le Roy ne faisoit ces armements qu'en vüe de faire crier les peuples d'Hollande en détruisant leurs flotes des marchands et de la pesche de leurs poissons qui est d'un profit considérable pour la Hollande, et par ces pertes les provoquer à demander la paix.

      1679. L'on eut la nouvelle de la paix avec la Hollande et Angleterre. Les deux dernières prises que nous avions amenées étoient d'un trop grand port pour nos marchands de France, le conseil ordonna de les envoyer à Lisbonne en Portugal pour les y vendre, étant très-propres pour les voyages du Brésil; Mr de Latre eut cette comission de les conduire et de les vendre, et un parent de Mr Bart nommé Corneille Bart comandoit l'autre soubs les ordres du dit sieur de Latre qui me prit pour son segond, et nous partismes de Dunkerque vers la fin de février n'ayant que du lest et un simple équipage seulement pour amariner, et nous arrivasmes devant Lisbonne le 21 mars et peu à peu nos capitaines congédioient nos équipages, pour en épargner la dépence. СКАЧАТЬ