Les Tourelles: Histoire des châteaux de France, volume II. Gozlan Léon
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СКАЧАТЬ malheureux; suivez-moi, embrassons les genoux de Louis, et redemandons-lui Oronte! Et La Fontaine se présente au parlement avec tous ses sylvains pour qu’on délivre Oronte; il intercède auprès de mademoiselle de La Vallière au nom des hamadryades éplorées. Partout rebuté, il s’enferme avec mademoiselle de Scudéry et madame de Sévigné, et ces trois femmes pleurent.

      Ne cherchez pas ailleurs la mémoire de Fouquet: elle est toute dans le cœur des femmes; j’ai dit le cœur des poètes.

      Mazarin, c’est vrai, eut une grande chose dans sa vie: c’est le traité de paix de Westphalie.

      Mais Fouquet eut aussi une ravissante chose dans sa vie: c’est la fête de Vaux.

      Qu’est-il resté du traité de Westphalie? rien. Voyez où est remontée la maison d’Autriche.

      Qu’est-il resté de la fête de Vaux?

      Les Fâcheux de Molière, une élégie de La Fontaine, douze lettres de madame de Sévigné.

      Ceci durera plus que la maison d’Autriche.

IV

      Tandis que le roi et sa mère reçoivent dans les salons de Fouquet les hommages dont ils sont ordinairement entourés à Fontainebleau, l'étiquette n’ayant jamais abandonné Louis XIV, même en voyage, le surintendant, dont l’absence est justifiée par la nécessité où il est, dans un tel jour, de se trouver partout, a réuni les deux amis sur la fidélité desquels il peut compter, et s’entretient avec eux dans les allées du parc.

      – Le moment venu, j’hésite, balbutia Fouquet le premier.

      Et Pélisson, saisissant le bras de Fouquet: – Serait-il bien vrai? Et pour quel motif, sur quel soupçon, nous alarmez-vous ainsi? Vous êtes pâle, en effet, monseigneur.

      – Franchement, ces mousquetaires à cheval m’ont donné à réfléchir. Avouez que leur présence a droit d'étonner.

      – Ma foi, non, reprit Gourville. Cette suite bruyante est dans les goûts d’un jeune roi. C’est du faste. D’ailleurs, pour peu que nos soupçons devinssent plus graves, je me chargerais de d’Artagnan et de ses mousquetaires. Les caves du château sont profondes, et ils ne boiront pas tout.

      – Vous ne savez donc pas, Gourville, que le roi leur a défendu de quitter l'étrier?

      – C’est possible, monseigneur; mais il ne leur a pas défendu de boire, office dont on s’acquitte très-bien à cheval. Seulement on tombe de plus haut. Sont-ce là toutes vos craintes, monseigneur?

      – Les douze portes du parc sont-elles bien gardées, Gourville?

      – Par les meilleurs complices qu’on puisse choisir.

      – Par qui donc, Gourville?

      – Par personne.

      – Comment cela?

      – Où est la nécessité de veiller à douze portes si l’on ne doit sortir que par une?

      – Mais cette porte?

      – A celle-là j’ai posté quelqu’un qui ne m’a jamais trahi en ces sortes d'équipées: invisible et muet.

      – Et c’est?..

      – Personne.

      – Vous me désespérez, Gourville; j’ai peur que vous n’ayez pas votre tête, tout votre sang-froid.

      – Pardon, monseigneur, bien que je sois venu avec le maréchal de Clairembault. Par cette porte si fidèlement gardée nous passerons, vous, monseigneur, la personne que vous savez, M. de Pélisson et moi. Elle est assez large.

      Fouquet serra affectueusement la main à ses deux amis.

      – Merci, Gourville; mais pourquoi cette légèreté dans vos dispositions?

      – Imiterons-nous les Romains? crierons-nous jusque sur les toits que nous conspirons?

      – Mais encore…

      – Je le tiens de M. de Retz: dans un coup décisif il est important d'être sûr de tout le monde et de n’employer que quelques-uns. Ayez beaucoup d’hommes, ils comptent les uns sur les autres; peu, ils agissent. M. le coadjuteur s’y connaissait.

      Perdant par degré la teinte de tristesse répandue sur son visage, le surintendant se tourna vers son poète-secrétaire: – Vous, monsieur Pélisson?

      – Monsieur le vicomte, je partage les assurances de M. Gourville.

      – Vous ne saisissez pas ma demande: ce n’est pas là-dessus que je souhaite vous entendre. Avez-vous déposé sur la cheminée de chaque chambre de gentilhomme mille pistoles pour faire face aux dettes du jeu? Avez-vous ordonné qu’on traitât les gens de lettres dans cette journée avec les nombreux égards dont j’aime à les voir entourés? Ils dîneront dans la salle des Muses: je crois avoir exprimé ce désir.

      – Vos ordres ont été suivis. Ils seront confondus avec les gens de qualité. Des guirlandes de fleurs se balanceront sur leur front au bruit de harpes cachées: Lambert jouera du téorbe. Comme les anciens poètes, ils boiront dans des coupes de vermeil.

      – Et comme les anciens poètes, monsieur de Pélisson, ils emporteront leur coupe. Nous vous devons la gloire qui suit la vie. Vous et La Fontaine me ferez immortel.

      – Auparavant, interrompit Gourville, il faut que vos ennemis soient dans la poussière, que le roi, notre maître, vous reconnaisse pour le premier gentilhomme de l'état après lui.

      – Quel moment heureux ou fatal! Gourville, Pélisson, qu’en pensera l’Europe? Et ce coup qui retentira long-temps, – au milieu d’une fête!.. Des poignards cachés sous des fleurs. N’est-ce pas que mon château ne fut jamais plus splendide? On dirait qu’il sait qu’un roi de France l’habite. Pélisson, avez-vous prié M. le chevalier Lully de presser sa cantate? Quel Orphée que ce Lully! quel génie! Il écrit dans ma chambre la musique qu’il exécutera dans trois heures devant la cour. Offrez-lui de ma part cette tabatière en diamans. Elle vient de Mazarin. Divin Lully!

      – Silence, recommanda Pélisson, on vient de ce côté. C’est messire Pierre Séguier, chancelier de France. Je le savais ici, je l’ai vu descendre de sa haquenée blanche peu après l’arrivée de M. Colbert. En hommes prudens, ils ont voulu ne pas avoir l’air d'être venus ensemble; mais nos gens placés sur la route ont remarqué leur séparation à la Patte d’Oie de Voisenon.

      Gourville courut au-devant du chancelier, le chapeau bas, et l’accosta avec le respect mêlé à la joie la plus vive.

      – Monseigneur, que je suis aise de vous joindre ici, et dans un tel moment! Vous déciderez entre nous.

      Le chancelier remercia d’un sourire.

      – Dites-nous, monsieur de Séguier, vous qui avez laissé la justice à Paris, mais non pas le bon goût, si Le Nôtre n’a pas commis une faute grave dans la distribution générale de ce terrain.

      – J’avoue, répondit le chancelier, que je suis peu apte à résoudre la question. Si vous voulez qu’il y ait ici trop de statues, de canaux, de fontaines de marbre pour…

      Fouquet СКАЧАТЬ