Chronique de 1831 à 1862, Tome 2 (de 4). Dorothée Dino
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Название: Chronique de 1831 à 1862, Tome 2 (de 4)

Автор: Dorothée Dino

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ à la vérité, il a un excellent architecte, puis, c'est le baron de Montmorency qui a arrangé la cour, et il y a eu quelques conseils de ma façon dans la réunion des salons, car ce n'est pas la première fois que je viens ici; bref, c'est charmant, et quoiqu'il y ait des choses beaucoup mieux à Rochecotte, il y en a de fort supérieures ici. Ce sont deux endroits qui, par leurs dimensions et leurs proportions, peuvent se comparer.

      Valençay, 2 août 1836.– Me voici rentrée au gîte, et charmée d'être loin du brouhaha de Paris, mais il me faudrait le temps de bien me reposer, au lieu que voici M. de Talleyrand également arrivé, et du monde qui doit nous envahir, dès aujourd'hui! Si je devais prendre des armes parlantes, je choisirais un cerf aux abois avec un hallali autour!

      Il est impossible d'être plus hospitalier que ne l'a été M. de Laval, et je me fais scrupule de la petite ingratitude que je vais commettre, en racontant une des plus grandes ridiculités que je connaisse. Adrien a l'ordre du Saint-Esprit et on ne le porte plus; il en avait plusieurs plaques: qu'a-t-il imaginé d'en faire? Il les a fait coudre au beau milieu des courtepointes en velours qui couvrent les principaux lits de son château! Je n'ai jamais été plus surprise qu'en voyant à mon réveil un large Saint-Esprit en travers sur ma personne!

      Valençay, 6 août 1836.– J'ai une lettre de M. de Sainte-Aulaire, du 22 juillet, de Vienne, qui débute ainsi: «Je vous écris de provision, pour un courrier qui partira dans deux jours, et qui dira au Ministère, je ne sais quoi en vérité. L'attentat d'Alibaud a provoqué ici des manifestations non suspectes d'intérêt pour le Roi, et des vœux également sincères, pour l'accomplissement du grand œuvre que lui a confié la Providence; mais il ne faudrait pas s'étonner aussi qu'il eût rendu beaucoup plus vives les terreurs qu'on éprouve ou qu'on cherche à inspirer sur l'état de Paris. «Tout vient à point à qui sait attendre.» A cette condition, j'aurais bien répondu du succès, mais il est des cas où l'on ne veut pas attendre, et l'on peut avoir raison.» La lettre de M. de Sainte-Aulaire ayant dû partir par le courrier porteur de l'importante réponse sur la proposition de mariage entre M. le duc d'Orléans et l'archiduchesse Thérèse, cette réponse doit être arrivée à Paris, et je crois d'autant plus qu'elle y est parvenue, que Madame Adélaïde mande à M. de Talleyrand que son neveu doit, lui-même, nous écrire ce qui le touche. Ce n'est pas par curiosité, mais par le plus vif désir de voir le sort du jeune Prince heureusement fixé, que j'attends ses lettres avec impatience. Je voudrais bien aussi que le Roi de Naples fît, d'une de nos Princesses, une Reine de Naples.

      Valençay, 7 août 1836.– Comme suite à la citation que je faisais hier d'une lettre de M. de Sainte-Aulaire, je dirai que les réponses sont arrivées, et qu'elles sont défavorables. J'en suis fâchée, pour nous, mais je crois que si c'est un inconvénient pour notre Prince Royal, c'est peut-être une faute politique de la part de ceux qui ont dit non. On pourrait bien ne pas tarder à s'en repentir, car cela peut changer la face du monde et remettre en présence les deux principes qui étaient prêts à se confondre.

      Valençay, 9 août 1836.– Nous avons vu arriver hier, à l'heure du déjeuner, nos cousins, le prince de Chalais et son frère44. Le premier a, à mon gré, la plus charmante figure d'homme que je connaisse, une belle taille, de nobles manières; j'ai beaucoup causé avec lui, car il n'est reparti qu'après le dîner. Il a un bon jugement, l'âme simple, le cœur droit, la curiosité des choses utiles, un intérêt sensé et raisonnable pour tout ce qui peut affermir la bonne position de grand propriétaire.

      On m'écrit que l'ordonnance qui disperse les prisonniers de Ham est signée; cela me fait un vrai plaisir, car j'y ai beaucoup contribué. Ce n'est pas encore la liberté entière qu'on leur accorde, mais c'est un changement de domicile avec adoucissement qui prépare à une plus grande latitude et qui déjà permettra aux santés délabrées de se rétablir plus aisément et sous de meilleures conditions.

      On est fort content du Roi de Naples à Neuilly. On y tourmente beaucoup notre Roi, pour l'entraîner, malgré lui, vers une intervention au delà des Pyrénées, mais il y résiste puissamment, jusqu'à présent: cette tourmente intérieure, jointe aux précautions auxquelles on veut l'assujettir, pour sa sûreté, empoisonne sa vie.

      Valençay, 11 août 1836.– On mande à M. de Talleyrand que les questions d'Espagne, qui s'enveniment de plus en plus, jettent, à Paris, une grande aigreur là où il ne faudrait pas qu'il y en eût, c'est-à-dire entre le Roi et son Ministre des Affaires étrangères45, qui est soutenu par le Prince Royal, ceux-ci voulant l'intervention. On se demande qui sortira vainqueur de cette lutte intestine!

      Valençay, 22 août 1836.– Je comprends très bien les réflexions qu'on fait sur la grande-duchesse Stéphanie de Bade: son manque de tact tient à sa première éducation. Élevée dans une pension prétentieuse46, elle a pu acquérir beaucoup, excepté ce sentiment exquis des convenances, qui se transmet, qui s'inocule dans l'enfance, mais qui ne s'enseigne pas. Aussi invite-t-elle M. Berryer à un bal chez elle, sans qu'il lui ait été présenté, ni qu'il ait même demandé à l'être! Puis, elle parle trop, en général, et cherche à faire de l'effet, par une conversation brillante qui n'est pas toujours suffisamment mesurée et adaptée à sa situation. Les Princesses ne sont pas tenues à être aimables; ce qu'on exige d'elles, c'est d'être obligeantes et dignes, mais pour comprendre la mesure et ne pas la dépasser, il faut avoir pris de certaines habitudes, dès l'enfance, qui ont manqué à la grande-duchesse Stéphanie, et que Mme Campan ne pouvait pas lui donner. Je la crois, au fond, bonne personne; il y a, dans sa vie, du dévouement, du courage, des malheurs qu'elle a traversés très honorablement. Je crois que Mme de Lieven, qui la critique si sévèrement, ne se serait pas tirée aussi purement qu'elle des crises que lui créait sa situation délicate avec son mari. La Grande-Duchesse avait de la gentillesse de manières, et une jolie mine, éveillée et gracieuse; elle avait besoin de la jeunesse; en la perdant, ce qui lui manque devient plus évident. Hélas! c'est le cas de chacun; voilà pourquoi il est si faux de dire qu'on est trop vieux pour se corriger; c'est, au contraire, quand les agréments passent, qu'il est si essentiel de les remplacer par des qualités: les charmes de la jeunesse disposent à une indulgence, font admettre des excuses, qui disparaissent avec ces charmes et ces grâces, et font place à une sévérité qu'il est nécessaire de devancer, par plus de maintien, plus d'abnégation et plus de respect de soi-même.

      Voilà des nouvelles officielles: le refus de Vienne est poliment exprimé, sans être motivé. On ne songe point du tout, comme on l'a dit, à la princesse Sophie de Würtemberg. Notre Prince Royal est parti pour le camp, maigri, changé, mais franchement convalescent.

      De Madrid, on sait qu'Isturitz a donné sa démission. C'est M. Calatrava qui le remplace comme Président du Conseil. Tout cela va au plus mal.

      Le Roi de Naples part le 24 pour Toulon. Il part, comme il était venu, sans mariage.

      Les ex-ministres prisonniers sont encore à Ham, par suite d'une difficulté qui s'est élevée entre les Ministres actuels: celui de l'intérieur veut conserver les prisonniers sous sa surveillance; le Président du Conseil veut qu'ils restent dans des forteresses, avec le régime le plus doux, mais enfin dans des places de guerre; dès lors, le ministre de la Guerre réclame la surveillance! Il est bien temps que ce traitement finisse, car les malheureux sont malades.

      Mme Murat a obtenu la permission de passer un mois à Paris; elle y arrive dans huit jours; on dit qu'elle est hors des intrigues de ses frères.

      J'ai eu, hier, une lettre de Mme de Lieven, qui m'annonce son retour à Paris comme positif. J'ai peur qu'elle ne fasse une grande faute. J'ai lu hier une lettre de Pétersbourg, dans laquelle il est dit qu'elle est fort mal en cour. En revanche, M. de Lœve-Weimar y est très bien traité et y fait l'aristocrate. Horace Vernet aussi y est gâté et choyé d'une façon inimaginable. Comprend-on, СКАЧАТЬ



<p>44</p>

Le comte Paul de Périgord.

<p>45</p>

M. Thiers.

<p>46</p>

L'institution de la célèbre Mme Campan, aujourd'hui école d'Écouen.