Vie de Christophe Colomb. Baron de Pierre-Marie-Joseph Bonnefoux
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Название: Vie de Christophe Colomb

Автор: Baron de Pierre-Marie-Joseph Bonnefoux

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/30922

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СКАЧАТЬ du tropique, et que les caravelles avaient à traverser, un crabe fut découvert vivant et saisi par un matelot de la Santa-Maria. Le grand-amiral, à qui il fut apporté, le prit entre ses doigts, le regarda quelque temps avec un plaisir indicible; puis il fit remarquer qu'il était probable que la terre vers laquelle les caravelles se dirigeaient ne devait pas être très-éloignée, car un si petit animal n'aurait certainement pas pu survivre longtemps à l'accident qui l'en avait arraché. Quelques grands oiseaux d'espèces inconnues furent vus aussi vers ce même jour, planant au haut des airs et se dirigeant de l'Occident à l'Orient. Colomb, qui les avait aperçus le premier, en conclut qu'ils provenaient de ces mêmes contrées vers lesquelles l'expédition gouvernait, et une joie vive éclata dans les esprits.

      Mais bientôt les champs d'herbes devinrent plus étendus et les herbes elles-mêmes plus épaisses, au point que les navires éprouvaient quelque difficulté, malgré la brise assez fraîche qui soufflait, à se frayer leur route. En voyant, à perte de vue, ces mers qui ressemblaient à d'immenses prairies submergées, les équipages se crurent perdus à tout jamais, s'imaginant que bientôt ils ne pourraient ni avancer, ni reculer. Ils se rappelèrent alors tout ce qu'ils avaient entendu dire sur les limites probables de l'Atlantique qu'on ne pourrait jamais atteindre impunément, et ils pensèrent que leurs navires étaient destinés à être comme enclavés dans ces masses d'herbes et à y périr immanquablement avec eux.

      Si, ensuite, parvenant à sortir de ces sortes de liens, ils se retrouvaient dans des eaux claires, et s'il survenait un jour ou deux de calme: «Voici actuellement, disaient-ils, un Océan sans vagues; on n'a jamais vu de mer si morte; ses eaux sont si tranquilles qu'on croirait qu'elles n'obéissent pas aux lois de la nature; et Dieu a, sans doute, entouré d'une ceinture d'eau dormante ces parties de l'univers, pour défendre aux hommes d'y pénétrer.»

      Mais quand ils apercevaient, ainsi qu'il arrive parfois, des nuages épais ramassés aux extrémités de l'horizon comme s'ils planaient sur la terre, le cœur leur revenait, et ils commençaient de nouveau à espérer, jusqu'à ce qu'ils se fussent assurés que ce n'étaient que de fausses indications.

      Les poissons volants, dont on n'avait jamais entendu parler jusque-là, vinrent à leur tour vivifier la scène. Ce ne fut pas sans un sentiment de satisfaction que l'on contemplait leurs bandes sortir de l'eau par essaims, fournir une assez longue course avec leurs nageoires ailées, et s'abattre, soit à quelque distance des caravelles, soit quelquefois sur les navires eux-mêmes, et y donner l'occasion d'un excellent régal. Garcia Fernandez ne manqua pas de saisir cette occasion pour dire avec conviction qu'il était impossible qu'on fut arrivé aux limites fatales de l'univers, lorsqu'il y avait tant d'êtres vivants autour d'eux qui annonçaient plutôt la fécondité de la nature que son impuissance, ou que la destruction de tous les corps.

      Une troupe d'oiseaux venant du Nord servit une fois de prétexte à Alonzo Pinzon pour demander à gouverner dans cette direction; le grand-amiral lui répondit avec douceur, mais avec fermeté, et il continua à faire route vers l'Ouest.

      Cependant les caravelles s'avançaient toujours en parcourant un espace d'environ quarante lieues par jour; mais quoique Colomb continuât à dissimuler une partie du chemin parcouru, ainsi que celui que faisaient faire les courants et qu'il estimait à quatre lieues de plus en vingt-quatre heures, les équipages n'en voyaient pas moins avec terreur la distance qui les séparait de l'Espagne augmenter à chaque instant, et ils perdirent presque jusqu'au dernier rayon d'espoir; mais quelques oiseaux d'un volume plus petit que ceux qui avaient été observés auparavant, parurent à leurs yeux, et leur courage en fut un peu ranimé, car ils durent croire qu'ils ne pouvaient s'être élancés que de quelque point d'une terre peu éloignée.

      Cette heureuse disposition des esprits ne se soutint pas; la situation de Colomb devint plus critique, et il y avait à peine quinze jours qu'on avait cessé d'apercevoir l'île de Fer, dont on pouvait alors se trouver à quatre cents lieues environ dans l'Ouest, que l'impatience des matelots prit un commencement de caractère de révolte.

      Ils se rassemblèrent d'abord par groupes de trois ou quatre dans les endroits les plus écartés ou les moins surveillés du navire, et ils y donnèrent un libre cours à leur mécontentement. Bientôt, s'excitant les uns les autres, ces groupes devinrent plus nombreux, et, leur audace augmentant, ils poussèrent des murmures et proférèrent des menaces envers le grand-amiral. Ils le traitaient d'ambitieux, d'insensé qui, dans un accès de folie, avait conçu la résolution d'entreprendre quelque chose d'extravagant pour se faire remarquer. Quelle obligation, ajoutaient-ils, pouvait les lier envers lui et les forcer à le suivre, et jusqu'où pouvait-il exiger leur obéissance, puisqu'ils avaient pénétré sans rien trouver, bien plus avant qu'aucun homme ne l'eût déjà fait! Devaient-ils continuer jusqu'à ce que leurs bâtiments eussent péri, ou jusqu'à ce que tout espoir de retour, sur d'aussi frêles navires, fût devenu totalement impossible! Qui pourrait les blâmer, lorsqu'il serait évidemment démontré qu'en revenant sur leurs pas, ils n'auraient fait qu'agir dans l'intérêt bien motivé du salut de leurs vies? Et ils allaient jusqu'à s'écrier dans leur désespoir, que le chef qu'on leur avait donné était un étranger, n'ayant en Espagne ni amis, ni crédit; que son projet avait été condamné comme celui d'un visionnaire, par des hommes du plus haut rang, de la plus grande instruction; qu'ainsi, non-seulement personne n'entreprendrait de le justifier ou de le venger, mais encore qu'on s'en réjouirait. Il n'y avait donc plus qu'à se révolter; il fut même proposé, pour empêcher toutes plaintes ou récriminations futures de Colomb, de le jeter à la mer, se réservant de dire que c'était lui-même qui y serait tombé par accident, en observant les astres avec ses instruments nautiques.

      Le grand-amiral n'ignorait rien de ce qui se passait dans ces conciliabules et il se promettait bien d'agir avec énergie au premier acte qui se manifesterait ouvertement; mais il temporisait, espérant toujours que quelque circonstance heureuse ferait d'elle-même changer ces sentiments hostiles. Sa contenance était donc toujours aussi sereine; quand il trouvait une occasion naturelle de parler à son équipage, c'était toujours avec sa même adresse, calmant les uns par des paroles bienveillantes, excitant l'orgueil ou la cupidité de quelques autres par des espérances d'honneurs, de gloire ou de richesse, et faisant connaître à tous, que s'il éclatait quelque mutinerie, il saurait bien à qui s'adresser comme en étant les chefs ou les fauteurs; qu'enfin s'il voulait bien paraître ignorer quelques paroles dont il ne voulait pas exagérer la portée et qu'il était enclin à pardonner à cause de la nature toute particulière de sa mission, il n'en connaissait pas moins toute l'étendue des pouvoirs coercitifs que le roi et la reine avaient mis en ses mains, et qu'il saurait très-bien s'en servir envers les séditieux, si jamais on se portait à quelque fait qui lui prouvât qu'il en existait à son bord.

      Un phénomène particulier aux mers intertropicales est celui qui donne le spectacle magnifique des couchers du soleil les plus éblouissants qu'il soit possible de s'imaginer. Tantôt on croit voir, avec les couleurs les plus vives, de vastes cités dont ne sauraient approcher ni Constantinople, ses mosquées en amphithéâtre et ses minarets, ni Saint-Pétersbourg avec ses dômes, ses coupoles, ses flèches étincelantes et ses toitures peintes de couleurs les plus variées, ni Grenade et son magique Alhambra, ni Calcutta, la ville des palais, son beau ciel et l'admirable végétation qui l'entoure; tantôt on voit à l'horizon des prairies émaillées de fleurs lumineuses, des campagnes couvertes de châteaux, de verdure ou de bosquets; un autre jour, ce sont des batailles livrées par des guerriers gigantesques dont la tête paraît atteindre le firmament, couverts d'armures où resplendissent les rayons les plus ardents de l'astre qui les éclaire et qui les pare de ses reflets les plus brillants. Ces guerriers mouvants, qui selon les caprices de la marche des nuages, courent, se poursuivent, se défendent, se frappent, tombent ou se relèvent, ont une animation prodigieuse qui va jusqu'à électriser le spectateur; mais la scène dure peu, car le soleil n'y rase jamais l'horizon; il semble se précipiter au-dessous plutôt qu'y descendre, et le crépuscule y est toujours fort court.

      Un soir, c'était le 25 septembre, un semblable spectacle vint réjouir les esprits, mais l'intérêt en fut СКАЧАТЬ