Vie de Christophe Colomb. Baron de Pierre-Marie-Joseph Bonnefoux
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Название: Vie de Christophe Colomb

Автор: Baron de Pierre-Marie-Joseph Bonnefoux

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/30922

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СКАЧАТЬ qu'une fois arrivé à un certain point, on devait immanquablement tomber dans le vide.

      Aussi, un premier ordre de la cour pour armer les caravelles demeura-t-il sans effet; la terreur était si profonde qu'un second ordre plus impératif, autorisant Colomb à agir avec rigueur, fut également méconnu quoiqu'on eût infligé une amende de 200 maravédis par jour de retard. Colomb aurait pu sévir; mais, avec sa sagesse habituelle, il voulut laisser agir le temps; il temporisa donc jusqu'à l'arrivée de Martin-Alonzo Pinzon, qui l'avait si bien compris lors de sa première arrivée à Palos et qu'il attendait prochainement. Alonzo devait, en effet, commander la Pinta, et ce fut avec joie que Colomb le vit se rendre auprès de lui. Les choses commencèrent alors à prendre une tournure plus favorable; les esprits ne revinrent pas entièrement à la vérité, mais ils ne purent être que très-émus en voyant Alonzo, se montrant franc, loyal et résolu comme un vrai marin, fournir à Colomb les fonds nécessaires pour payer, ainsi qu'il s'y était engagé, la huitième partie des frais de l'expédition, accepter le commandement de la Pinta, prendre son frère Francisco-Martin pour second, et solliciter de Colomb le commandement de la Niña pour un autre de ses frères nommé Vincent-Yanez Pinzon.

      Sur l'invitation de Jean Perez de Marchena, Colomb, lors de son retour à Palos, s'était établi au couvent de la Rabida où il reçut l'accueil le plus cordial; Jean Perez ne se borna pas à lui prodiguer les soins de l'hospitalité; il présida, en quelque sorte, aux détails de l'expédition: prenant un intérêt excessif à en voir les voiles se déployer vers un monde inconnu qu'il apercevait déjà des yeux de la foi, comme Colomb l'apercevait de ceux du génie, il s'appliqua, par ses exhortations, à changer les dispositions des esprits parmi les matelots destinés à faire partie des équipages, à calmer les terreurs de leurs familles, à dissiper les préjugés sous l'influence desquels ils étaient; et sa parole persuasive secondant les actes dévoués d'Alonzo Pinzon, on put bientôt remarquer qu'un sentiment favorable commençait à se manifester. D'ailleurs, quand ceux qui étaient le plus opposés au voyage se trouvaient en présence de Colomb, le calme, l'énergie, l'enthousiasme de cet homme extraordinaire qui entraînaient ses amis, faisaient toujours une impression involontaire sur leur cœur.

      C'était le 12 mai qu'il avait quitté la cour avec de pleins pouvoirs pour commander les deux caravelles de Palos qui devaient être prêtes à prendre la mer dans dix jours, pour lever les marins nécessaires à l'armement, pour fréter ou équiper une troisième caravelle; et la seule restriction qui eut lieu, fut qu'il s'abstiendrait d'aborder, soit à la côte de Guinée, soit à toute autre possession des Portugais récemment découverte. Cependant, ce fut à peine si ses navires purent être prêts avant la fin de juillet, tant il eut d'obstacles à surmonter pour déjouer le mauvais vouloir et les sourdes menées qui venaient à l'encontre de ses opérations! Parmi ceux qui se montrèrent le plus récalcitrants, furent Gomez Rascon et Christophe Quintero, propriétaires de la Niña et de la Pinta; mais en opposition à ces noms, l'histoire a enregistré ceux de Sancho Ruiz, de Pedro Alonzo Niño et de Barthélemy Roldan, habiles pilotes qui furent des plus empressés à se rallier à Colomb.

      L'histoire n'a pas oublié, non plus, de recommander aux éloges de la postérité Garcia Fernandez, médecin de Palos, ce même ami de Jean Perez de Marchena qui, consulté par lui sur la validité des théories de Colomb, fut le premier, en Espagne, qui en reconnut la portée, et qui resta inébranlable dans ses opinions, au point de solliciter la faveur de partir avec le grand homme, en sa qualité de médecin.

      Lorsque les apprêts du voyage furent à peu près terminés, Colomb, entouré de ses marins, se rendit au couvent pour y recevoir la bénédiction du père supérieur, et pour se mettre, lui, son équipage et ses bâtiments, sous la protection du Ciel. Au moment de franchir le seuil de l'église, ses matelots se rangèrent avec déférence pour le laisser passer le premier: «Entrez, mes amis, entrez, leur dit-il, il n'y a ici ni premier ni dernier; celui qui y est le plus agréable à Dieu, est celui qui y prie avec le plus de ferveur.»

      Tous communièrent, tous furent bénis; le village entier s'était rendu à cette cérémonie imposante dans laquelle régna le plus auguste recueillement; quant à Colomb, son air de calme et d'attention prouvait que ses pensées avaient toutes pour objet la bonté de Dieu et la fragilité des choses humaines. Un peu avant que les assistants quittassent l'église, le père supérieur leur fit une allocution qui toucha vivement leurs cœurs, et qui se termina ainsi:

      «Mes enfants, lorsque le grand-amiral, que je vois ici confondu dans vos rangs, vint, pour la première fois, frapper à la porte du couvent, Dieu m'inspira la pensée de l'interroger: sa science, son élocution eurent bientôt frappé mon esprit; mais s'il gagna mon âme, ce fut par sa piété que je n'ai jamais vue surpassée chez aucun mortel: ses plus zélés partisans en Espagne sont également ceux qui ont été le plus convaincus de ses sentiments religieux, et qui ont reconnu en lui l'homme qui se regarde comme l'instrument dont la Providence veut se servir pour porter sa parole chez les peuples inconnus qu'elle a révélés à son imagination. Ayez donc en lui, mes enfants, la même confiance qu'il a en Dieu: vous accomplirez ainsi les décrets du Ciel, vous reviendrez comblés de gloire, et vous serez éternellement honorés, comme le sont toujours des hommes de foi, de courage et de résolution!»

      Cette cérémonie, dans la petite église d'un couvent jusqu'alors presque ignoré, sans pompe, sans éclat, mais remarquable par une componction sincère, et servant de prélude à l'un des plus grands événements de ce monde, eut un effet moral considérable dans le village ainsi que sur les navires de l'expédition; et réellement, on y trouve un cachet de grandeur et de majesté qui efface, par sa simplicité, tout ce que le faste aurait pu imaginer.

      Enfin, les navires étant complètement armés, le départ fut fixé au 3 du mois d'août 1492; ce même jour, Colomb, après avoir écrit une dernière dépêche à la cour, sortit du couvent avec Jean Perez qui voulut l'accompagner jusqu'au canot sur lequel il devait définitivement se rendre à bord de la Santa-Maria.

      La route fut d'abord silencieuse car les deux amis étaient absorbés. Le digne ecclésiastique, convaincu par Colomb, croyait certainement ou à l'existence de terres transatlantiques, ou à la possibilité d'atteindre les côtes de l'Asie en cinglant vers l'Ouest; mais au moment de se séparer d'un hôte qu'il affectionnait si tendrement, il ne pouvait penser sans terreur à la longueur du voyage, aux dangers de mers inexplorées qui pouvaient être semées d'écueils et où les navires de l'expédition ne trouveraient ni ports, ni abris connus pour se réfugier; il comparait enfin la faiblesse des moyens avec l'immensité de l'Océan, avec les difficultés incalculables de l'entreprise, et il frémissait intérieurement de la témérité d'un projet qui semblait braver les lois de la nature. De son côté, Colomb se recueillait pour mieux se préparer à remplir ses devoirs; son esprit goûtait un ravissement dont sa sagesse contenait la vivacité, et il paraissait, il était d'autant plus tranquille, que l'heure de l'embarquement s'approchait. Ce fut lui qui rompit le silence, et qui commença ce dernier entretien par ces mots:

      «Mon père, je n'oublierai jamais que, sans ressources, sans nourriture, voyageant à pied, je vins, exténué de fatigue, implorer pour mon fils et pour moi la charité du couvent que vous m'y accordâtes avec tant de libéralité! Les temps sont bien changés, et ma position s'est considérablement améliorée; mais le passé reste ineffaçablement gravé dans mon cœur. Vous avez été pour moi l'ami le plus généreux et le plus utile; je vous dois la protection de notre auguste reine et c'est vous qui m'avez fait ce que je suis: lorsque l'obscur Génois n'était rien, c'est vous qui avez commencé à modifier l'opinion des hommes à mon égard. L'avenir est dans les mains de Dieu, et je pars avec la connaissance des dangers de la mer; mais j'espère en Dieu: espérez comme moi et modérez votre affliction, car je sens que le succès de mon entreprise est dans les desseins de la Providence. Aussi, quoi qu'il arrive, Colomb restera inébranlable, et rien ne le fera dévier de son but!»

      «Mon fils, lui répondit le père supérieur avec émotion, ta confiance est digne de ton СКАЧАТЬ