Vie de Christophe Colomb. Baron de Pierre-Marie-Joseph Bonnefoux
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Название: Vie de Christophe Colomb

Автор: Baron de Pierre-Marie-Joseph Bonnefoux

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/30922

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СКАЧАТЬ que le pouvoir de Dieu, ajouta Colomb, a mis mon esprit en éveil pour des objets plus importants, depuis qu'il m'a choisi pour que sa volonté soit faite, pour que sa parole soit répandue sur toute la terre, ma mémoire a cessé de s'arrêter sur mes périls passés.»

      De plus en plus enthousiasmée, Isabelle voulut lui donner une preuve plus convaincante de l'intérêt qu'il lui inspirait, et sachant, en femme d'un naturel exquis, qu'elle allait électriser son cœur paternel, en lui accordant une faveur que les enfants seuls des plus puissantes familles obtenaient, elle lui dit:

      «Segnor, vous avez un fils déjà grand, mais qui ne saurait vous suivre sur les mers; il restera donc avec nous, il sera livré à nos soins, et nous le nommons page de don Juan, héritier présomptif de la couronne.»

      Christophe Colomb crut rêver; cette bonté l'attendrit jusqu'aux larmes, et l'émotion lui ravissant presque l'usage de la parole, il s'inclina devant la reine, et il lui répondit:

      «Je suis à tout jamais le serviteur de Votre Majesté; je suis le sujet et le serviteur des souverains de l'Espagne, mon cœur, mon bras leur sont dévoués et ma vie leur appartient.»

      Les formalités légales suivirent cet entretien. Jean de Coloma, secrétaire royal, fut chargé de rédiger la convention écrite qui devait avoir lieu; il s'en entendit avec Colomb, et un traité fut souscrit par lequel il fut convenu:

      1° Que Colomb, pour lui-même, pendant sa vie, et dans l'avenir, pour ses héritiers et successeurs, devait jouir du titre de grand-amiral de toutes les mers, de toutes les terres ou continents qu'il pourrait découvrir, et avoir droit aux mêmes honneurs, aux mêmes priviléges que ceux dont le grand-amiral de Castille était en possession;

      2° Qu'il serait vice-roi et gouverneur général de toutes les susdites terres ou continents, avec le droit de nommer trois candidats pour le gouvernement de chaque île ou province où il ne siégerait pas en personne, sur lequel nombre de trois, la couronne choisirait le titulaire;

      3° Qu'il aurait droit à la dixième partie de tous les bénéfices faits sur les denrées ou les produits des pays placés sous la juridiction de son amirauté;

      4° Que lui ou son représentant serait seul juge dans les différends ou contestations qui pourraient s'élever entre le commerce de ce pays et celui de l'Espagne;

      5° Qu'il lui serait enfin permis d'entrer, pour la huitième partie, dans les frais de toutes les expéditions qui seraient dirigées vers ces mêmes pays, et qu'en conséquence il aurait droit à la huitième partie des profits faits par ces expéditions.

      Ces stipulations furent signées par Ferdinand et par Isabelle à Santa-Fé, le 17 avril 1492; et furent également revêtus de leur signature tous les documents, ordres, mandements et pièces qui firent suite aux stipulations; mais la couronne de Castille demeura isolément chargée de tous les frais de l'expédition, qui fut mise entièrement sous les ordres de Colomb.

      La convention dont nous venons de transcrire les termes ne semble avoir, au premier coup d'œil, qu'une importance légale destinée à fixer les priviléges et les droits de l'une des parties intéressées; mais en la lisant attentivement, on y trouve des mots qui ont une immense portée scientifique, et qui prouvent invinciblement que ce n'était pas en aveugle que le savant marin cherchait, par l'Atlantique, une route vers les rivages de l'Inde, mais en homme profond qui croyait très-probable qu'avant d'y arriver, il trouverait des terres interposées.

      Dans les temps contemporains, plus tard même et encore aujourd'hui, il s'est trouvé et il se trouve des esprits envieux qui ont cherché à rabaisser la gloire de l'illustre navigateur qui a découvert le Nouveau-Monde, et qui l'ont traité de rêveur ne pensant obstinément qu'au Cathai, qu'à l'île de Cipango, et ne s'étant rendu en Amérique que par l'effet du hasard ou en cherchant des contrées imaginaires.

      Ces personnes ignorent donc ou feignent d'ignorer la fameuse parole de Colomb qui, pressé d'arguments par un des docteurs de la conférence de Salamanque, lui répondit que si, dans la direction de l'Ouest, l'Atlantique avait d'autres limites que l'Inde, ces limites, il les découvrirait! Mais cette réponse, fût-elle apocryphe, il n'en saurait être de même des stipulations officielles textuellement reproduites quelques lignes plus haut, et qui furent écrites sous la dictée de Colomb par Jean de Coloma; or, on y voit, à deux reprises différentes, les mots «terres ou continents;» on y voit que Colomb s'y réserve des priviléges, des droits sur ces «terres ou continents» qu'il pourra découvrir, et c'est une preuve incontestable qu'il prévoyait parfaitement que quelque terre ou continent pouvait, devait même exister entre l'Asie et la partie occidentale de l'Europe. La découverte de l'Amérique était donc dans ses combinaisons, et l'on peut affirmer, sur le témoignage des stipulations, qu'il l'avait trouvée par ses prévisions longtemps avant qu'il l'eût vue matériellement.

      L'expédition destinée à l'entreprise si chanceuse et si hardie de cette découverte ne fut cependant pas préparée dans l'un des ports principaux de l'Espagne, mais simplement à Palos de Moguer, ce même petit port de l'Andalousie où nous avons vu Colomb aborder en Espagne et aller demander des secours au couvent de la Rabida qui l'avoisinait. Deux raisons le firent choisir: la première, c'est qu'il se trouvait situé en dehors du détroit de Gibraltar, et conséquemment, mieux en position de permettre de prendre le large sans avoir à lutter contre les contrariétés que les navires éprouvent souvent en voulant sortir de la mer Méditerranée; la seconde fut que ce port était frappé d'une condamnation judiciaire par laquelle il était obligé de fournir deux caravelles armées lorsque la couronne d'Espagne l'en requérait.

      Il a été d'usage, en Turquie, d'appeler caravelles des bâtiments d'un assez fort tonnage; mais en Espagne et en Portugal, ce nom n'est ordinairement donné qu'à de très-petits navires ne portant que des voiles latines et naviguant assez bien. Telles n'étaient pourtant pas exactement celles qui durent être armées pour le voyage. Les renseignements manquent sur leur grandeur précise, sur leur forme, sur leur grément; les versions sont même très-contradictoires sur ce point, et il est à regretter qu'aucune recherche n'ait pu l'éclaircir complètement; on en est donc réduit à des conjectures, et voici ce qu'on peut en déduire de plus vraisemblable.

      Les deux caravelles que Palos pouvait alors équiper pour la couronne étaient deux navires de la dimension de quelques-uns de nos grands caboteurs actuels; l'une s'appelait la Santa-Maria, et l'autre la Niña; une troisième leur fut bientôt adjointe, et son nom était la Pinta. La Santa-Maria seule était pontée ou recouverte en planches ou bordages de bout en bout; les deux autres n'avaient que des ponts partiels à l'arrière et à l'avant. Ces parties, dans les trois caravelles, étaient très-relevées au-dessus de l'eau.

      La Santa-Maria, qui devait être montée par Christophe Colomb, était du port de 100 tonneaux et elle était gréée pour porter des voiles carrées; la Niña et la Pinta n'avaient que des voiles latines; elles se trouvaient ainsi dans de très-mauvaises conditions pour pouvoir profiter des vents favorables qu'elles pourraient avoir dans le cours de leur navigation. Le personnel entier n'en excédait pas cent vingt hommes pour les trois navires.

      Voilà quelles furent les ressources exiguës qui furent mises à la disposition de Christophe Colomb, et avec lesquelles, aujourd'hui, on ne tenterait pas la plus mince entreprise de ce genre; voilà les éléments avec lesquels il devait exécuter le plus téméraire des voyages, et qu'il accepta sans hésitation, pensant probablement que son expérience, son habileté, sa vigilance pourraient compenser tout ce que ces éléments avaient d'insuffisant ou de défectueux.

      Mais il n'en fut pas de même dans la population de Palos ni parmi les marins ou les familles des marins qui devaient s'embarquer sur ces caravelles; la nouvelle de cet armement y fit l'effet d'un СКАЧАТЬ