L'oeuvre du divin Arétin, première partie. Aretino Pietro
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Название: L'oeuvre du divin Arétin, première partie

Автор: Aretino Pietro

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

Серия:

isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/43823

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СКАЧАТЬ belle farce!

      Nanna.– C'est maintenant que la farce va devenir belle, parce que Sa Révérence Paternité appela les trois novices et, appuyé sur l'un d'eux mince et long, formé avant l'âge, se fit tirer du nid par les autres le passereau qui se tenait coi. Le plus déluré et le plus charmant le prit sur la paume et lui lissa l'échine, comme on lisse la queue à la chatte qui ronronnant commence à souffler de sorte qu'elle ne peut plus tenir en place. Le passereau dressa la crête si bien que le vaillant Général ayant posé ses griffes sur la plus gracieuse et la plus jeune des Nonnes et lui ayant relevé ses jupes par-dessus la tête, lui fit appuyer le front sur le bois du lit. Alors, écartant délicatement avec les doigts les feuillets du missel culabrais, tout méditatif il contemplait ce fessier dont la figure n'était ni décharnée de maigreur jusqu'au dos, ni trop bouffie de graisse, mais rondelette, la raie du milieu tremblotante et qui reluisait comme un ivoire qui aurait eu la vie. Et ces petites fossettes que l'on aperçoit dans le menton et les joues des belles femmes se laissaient voir sur ses chiappeline31 pour parler à la florentine, et sa morbidesse aurait surpassé celle d'un rat de moulin, né, élevé, et engraissé dans la farine; et les membres de la Sœur étaient si lisses que si on lui posait la main sur les reins, elle glissait d'un trait jusqu'aux jambes, avec plus de rapidité qu'un pied ne glisse sur la glace. Aucun poil n'osait se montrer sur ce corps, pas plus que sur un œuf.

      Antonia.– Donc le Père Général perdit la journée en contemplation, hein?

      Nanna.– Il ne la perdit pas. Ayant trempé son pinceau, préalablement mouillé de salive, dans le godet à couleur, il la fit se tordre à la façon dont se tordent les femmes dans les douleurs de l'enfantement ou dans le mal de mère. Et pour que le clou demeurât plus fermement dans le trou, il fit signe derrière lui à son bœuf en herbe qui lui ayant rabattu les braies sur les talons administra un clystère au visibilium de Sa Révérence qui tenait les yeux fixés sur les autres garnements. Ceux-ci ayant disposé deux sœurs de la bonne façon et à leur aise dans leur lit leur pilaient la sauce dans le mortier, au désespoir de l'autre Nonnain qui étant quelque peu louche et noire de peau, rebutée de tous, avait rempli le Bernard de verre d'eau chauffée pour laver les mains du Messire, s'était assise par terre sur un coussin, la plante des pieds appuyée au mur de la chambre, et poussant le monstrueux bâton pastoral se l'était enfoncé dans le corps, comme on remet une épée au fourreau. Moi, à l'odeur de leur plaisir, me rongeant plus que ne se défont par usure les hardes, je me frottais la moniche à la façon dont les chats se frottent le cul sur les toits en janvier.

      Antonia.– Ah! ah! ah! Quelle fut la fin du jeu?

      Nanna.– Après s'être menés et démenés pendant une demi-heure, le Général s'écria: – «Faisons-le tous en chœur! et toi, mon petit couillaud, baise-moi; et toi aussi, ma petite colombe»; et tenant une main dans la boîte de l'angelette et de l'autre flattant les pommes de l'ange joufflu, baisant tantôt l'un et tantôt l'autre, il faisait le même visage grimaçant qu'au Belvédère cette statue de marbre fait aux serpents qui l'assassinent entre ses fils. A la fin, les Sœurs au lit, les jouvenceaux, le Général, celle sur laquelle il était monté, celui qu'il avait derrière lui et celle à la pastenague32 de Murano, s'accordèrent à le faire en mesure comme s'accordent les musiciens, ou les forgerons en levant le marteau, et ainsi chacun attentif au signal, on entendait un: «Aïe! Aïe!» un: «Embrasse-moi!» un: «Tourne-toi vers moi; ta langue douce, donne-la-moi! Retire-la; pousse fort. Attends que je le fasse! Je t'en prie, fais-le! Serre-moi! Aide-moi!» L'un parlait en sourdine, l'autre à voix haute, en miaulant; on aurait dit ceux du la, sol, fa, mi, ré, ut, et c'étaient des yeux renversés, des soupirs, un branle, des secousses telles que les bancs, les caisses, les bois de lits, les chaises et les écuelles s'en ressentaient comme les maisons pendant un tremblement de terre.

      Antonia.– Au feu!

      Nanna.– Puis voici huit soupirs coup sur coup, issus du foie, du poumon, du cœur et de l'âme du Révérend, et cætera, des Sœurs et des Novices qui firent un si grand vent que huit torches en auraient été éteintes, et soupirant ils tombèrent de fatigue, comme les ivrognes de vin. Et moi qui avais quasiment les nerfs cordés du dépit de les contempler, je me retirai adroitement et m'étant assise je donnai un regard au machin de verre.

      Antonia.– Arrête un peu: comment sais-tu qu'il y eut huit soupirs?

      Nanna.– Tu es trop pointilleuse: écoute donc.

      Antonia.– Dis!

      Nanna.– En contemplant le machin de verre, je sentis que je m'émouvais, bien que ce que j'avais vu eût ému l'ermitage des Camaldules. Et à force de contempler, je tombai in tentationem et libera nos a malo. Ne pouvant plus supporter la volonté de la chair qui me poignait bestialement la nature; n'ayant pas d'eau chaude à y mettre, comme m'en avait averti la sœur, en me disant à quoi servaient les fruits de cristal, je devins maligne par nécessité et pissai dans le manche de bêche.

      Antonia.– Comment?

      Nanna.– Par un petit trou qui y était exprès pour qu'on pût l'emplir d'eau tiède. Mais pourquoi t'allongerai-je la trame? Je me troussai galamment la robe et plaçant le pommeau de l'estoc sur la caisse, je commençai tout doucement à macérer ma concupiscence. La cuisson était vive et la tête du grondin était grosse, je ressentais à la fois martyre et jouissance, mais la jouissance surpassait la souffrance et peu à peu l'esprit entrait dans l'ampoule. Tout en sueur, me comportant en paladine, je me l'enfonçai si profondément que peu s'en fallut que je ne le perdisse en moi. Et à son entrée, je crus mourir d'une mort plus douce que la vie béate. Lui ayant tenu un bon bout de temps le bec dans l'eau, je me sens tout ensavonnée, je le retire aussitôt et, l'ayant retiré, je demeure avec cette cuisson qui dévore un rogneux lorsqu'il lève les ongles de dessus les cuisses. L'ayant regardé tout à coup, je le vois tout en sang et je fus prête à crier ma confession.

      Antonia.– Pourquoi, Nanna?

      Nanna.– Pourquoi? parbleu! Je crus m'être blessée à mort. Je me mets la main à la bouchette, je la retire toute mouillée et la voyant comme un gant d'évêque paré, je me mets à pleurer et les mains dans ces cheveux qu'en me les coupant auparavant m'avait laissés celui qui m'avait vêtue dans l'église, je commence la lamentation de Rhodes.

      Antonia.– Celle de Rome, où nous sommes.

      Nanna.– De Rome pour parler à ta façon, et outre que j'avais peur de mourir voyant ce sang, je craignais encore l'Abbesse.

       Antonia.– A quel propos?

      Nanna.– A propos de ce que, voulant savoir la raison du sang et connaissant la vérité, elle aurait pu me mettre en prison, liée comme une ribaude, et quand bien même elle ne m'aurait pas donné d'autre pénitence que de raconter aux autres l'histoire de ce sang, te paraît-il que je n'eusse pas lieu de pleurer?

      Antonia.– Non! Pourquoi?

      Nanna.– Pourquoi, non?

      Antonia.– Parce qu'en accusant la Sœur que tu avais vue jouer à ce qu'il y a dans le verre tu t'en serais tirée gratis.

      Nanna.– Oui, si la Sœur s'était ensanglantée comme moi. Ce qu'il y a de certain c'est que Nanna était dans une triste position. Là-dessus, j'entends frapper à ma cellule, je m'essuie le mieux possible les yeux, je me lève et je réponds: gracia plena. En même temps j'ouvre et j'apprends qu'on m'appelle à souper. Moi qui, en vraie soudarde, non СКАЧАТЬ



<p>31</p>

Petites fesses.

<p>32</p>

Poisson, sorte de raie (trygon pastinaca); on le nomme terre à Lorient, terre, tonare ou touare dans le Poitou, tère à Arcachon, pastenague à Cette, pastenaïga à Nice. L'Arétin a souvent pris des poissons pour les termes de ses comparaisons.

Une locution proverbiale de l'époque, esser comme il pastinaca, être comme la pastenague, signifiait: être sans queue ni tête, car enveloppée par les nageoires pectorales, la tête de ce poisson ne se distingue pas bien, et on lui coupait la queue dont on disait la piqûre dangereuse.