Perdus Pour Toujours. Nuno Morais
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Название: Perdus Pour Toujours

Автор: Nuno Morais

Издательство: Tektime S.r.l.s.

Жанр: Героическая фантастика

Серия:

isbn: 9788835424628

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СКАЧАТЬ Gabriela et moi nous sommes toujours tutoyés, et je ne vois pas de problème à cela et d’ailleurs elle non plus. Pour vous dire la vérité, à part vous, Lemos Nogueira et un ou deux associés qui préfèrent ainsi, je tutoie tout le monde dans le cabinet, même l’agent de sécurité. C’est bizarre que vous n’ayez jamais remarqué. Quant au fait qu’elle lise mes fax, et bien c’est ma secrétaire et cela me fait gagner du temps. Si je ne lui fais pas confiance à elle, à qui pourrais-je faire confiance ? » Gomez m’écoute d’un air totalement livide.

      « Oui j’ai remarqué que vous tutoyez tout le monde, – dit-il à moitié énervé – mais cela est complétement différent. Que vous les tutoyiez d’accord mais qu’ils vous tutoient ce n’est pas possible. Cela peut créer des problèmes de discipline et rendre difficile de maintenir la distance, vous voyez ? »

      Si cela dépendait de lui, il y aurait encore des esclaves et les salariés n’auraient le droit de faire que ce que les patrons, dans toute leur grandeur, les autoriseraient à faire, devant remercier un genou à terre la grandeur de leur don, pour plus qu’en réalité il puisse être insignifiante. Cet homme vit dans la préhistoire des relations humaines ; et le pire c’est que ça n’est pas le seul. Et il semblerait que de plus en plus de monde, peut-être parce qu’ils n’ont pas le choix, supportent ces manières. Je ne lui dis pas ce qu’il mérite, car cela ne mènerait à rien, tellement il est convaincu de sa vertu.

      « Je pense que vous avez tort. Je n’ai jamais eu de problème avec personne ici du fait que je tutoie les gens. Bien au contraire, je pense que cela rend le quotidien plus agréable, en sentant moins la naphtaline, vous voyez ce que je veux dire ? Personne ne m’a jamais manqué de respect – et moi non plus d’ailleurs, mais cela ne l’intéresse pas – ou ne se met, de manière indisciplinée, à refuser tout ce que je lui demande dans le cadre du cabinet. Prenez l’exemple de nos collègues espagnols et de leurs employés, ils se tutoient sans que cela n’affecte en rien leur productivité en tant qu’avocats. » Cette référence aux espagnols était bien choisie car malgré son nom et son insistance permanente pour qu’il soit écrit avec un z, Gomez les déteste du plus profond de lui et tombe directement dans le panneau. « Par ailleurs, il y a plusieurs autres exemples d’organisations extrêmement hiérarchisées et très disciplinées dans lesquelles tout le monde se tutoie, du poste le plus bas au poste le plus élevé sans que cela ne remette en cause la hiérarchie et la discipline. » Je finis ainsi, en espérant qu’il ait compris. Fol espoir. L’homme ne se montre pas vaincu.

      « Oui, oui je peux accepter que cela soit réel, bien que je ne puisse l’imaginer, – j’en ai marre de devoir lui ouvrir les yeux, pauvre âne, j’y pense mais ne dis rien – cependant, si tel est le cas, c’est à l’étranger. Au Portugal les choses sont différentes. Les personnes sont différentes. Le portugais de base est très indiscipliné et ne peut pas être laissé en liberté. Et ce même pour lui-même. »

      Un véritable homme des cavernes. À seulement trente-neuf ans. Comment est-ce que je n’ai jamais pu m’en rendre compte ? Peut-être que je m’en étais rendu compte mais que je n’avais jamais eu le déplaisir de l’écouter et de discuter du sujet avec lui. Cependant, ce n’est pas à moi de le faire changer, et même si cela était possible. Je n’ai rien contre ceux qui aiment, allez savoir pourquoi, maintenir des simulacres de formes archaïques dans des relations professionnelles qui n’ont quant à elles plus rien d’archaïques. Ce qui m’attriste est que, de manière générale, ces formes de traitement n’ont rien à voir avec la préservation de la courtoisie d’autres temps, elles sont plutôt utilisées pour marquer une position de domination sur les personnes avec lesquelles elles travaillent au quotidien, les collaborateurs, comme il est usage de dire.

      Mais je divague, j’ai Gomez qui se tient devant moi et me regarde d’un air ébahi, espérant que je lui réponde quelque chose, mais il me laisse sans voix. Je ne veux pas l’offenser, car selon mes principes tout le monde a le droit d’être comme il est, même imbécile, et au final il ne m’a rien fait. Le mieux c’est de lui dire, comme d’habitude, ce qu’il souhaite et de poursuivre.

      « Je ne dis pas que vous avez tort, après tout votre connaissance du Portugal est incommensurablement plus grande que la mienne. N’oubliez pas (et les personnes comme toi ne me laissent pas l’oublier) qu’ici je suis un étranger (malgré avoir vécu là pratiquement toute ma vie) et que, par conséquent certaines choses sont hors de ma portée ; ce que je peux cependant réaffirmer est que le tutoiement par consentement mutuel ne m’a jamais paru problématique, quelles qu’en soit les circonstances » Apaisé et satisfait que je lui reconnaisse des connaissances supérieures, il me fait un grand sourire et dit : « Heureusement que cela ne vous a pas causé de problème, mais si j’étais vous j’arrêterais » – me conseille-t-il de manière paternelle. « Cela rend tout plus facile. Concernant le séminaire, c’est Susana, qui s’est occupée de ma réservation, voyez avec elle les détails, pour vous et votre petite, qu’elle puisse modifier les billets. »

      Il se lève en s’aidant de mon bureau, et après avoir sournoisement observer mes papiers sur le plateau. Il se dirige, ensuite, vers la porte, et remonte son pantalon au niveau des jambes, prisonnier de ses cuisses dodues qui s’entrechoquent à chacun de ses pas. « Non, non, ce n’est pas nécessaire, » lui dis-je avec précipitation. « Gabriela va s’occuper de cela, ce n’est pas la peine de déranger Susana. Je vais lui en parler tout de suite. » Avant qu’il ne puisse dire quoi que ce soit, j’appuie sur le bouton de l’interphone : « Gabi, tu veux bien aller voir Susana s’il te plaît, et lui demander toutes les informations concernant une réservation pour Funchal qu’elle a faite, et nous en parlons plus tard. Merci. »

      Au moins je suis sûr de ne pas avoir des billets en classe éco ni une réservation dans un hôtel deux étoiles du côté plus bas d’une colline quelconque. En fin de compte, c’est toujours le cabinet qui paye et pour Gomez, moins de dépenses pour les autres signifie plus de sous pour ses dépenses et dans ses poches. Ce n’est pas difficile de lire sur son visage que c’était pour cette raison qu’il voulait que ce soit Susana qui s’occupe de cela. Malheureusement pour lui je connaissais déjà cette facette de sa personnalité. Bien que, pour lui il aime le luxe, cet homme est d’une radinerie légendaire avec tous les autres. Voyant alors qu’il n’a aucun moyen de reprendre le contrôle, il me fait un petit signe de la main et sort de mon bureau, les chaussettes à damiers lui tombant sur les mollets et le pantalon remonté sur ses cuisses imposantes.

      Je reviens au fax de Neil, je vois qu’il n’est pas compliqué et prends note mentalement de lui répondre aujourd’hui. Je me penche, en suivant, sur l’autre qui a l’air d’être véritablement un premier contact, au sujet d’une succession on dirait. Cependant, il est adressé à mon père – Gabriela n’a pas dû faire attention – et fait référence à une lettre que je n’ai jamais reçu ainsi qu’à un nom qui me rappelle des souvenirs lointains, mais comme cela n’a pas l’air urgent, je la mets sur la pile de choses que je dois faire et retourne m’occuper de ce que j’étais en train d’écrire avant que Gomez n’entre dans mon bureau.

      Contrairement à ce que je pensais, comme je n’ai pas eu d’appel téléphonique et que personne ne m’a interrompu, je réussis à expédier la réponse au fax de vendredi avant onze heures et demie. Gabriela vient alors toquer à la porte pour me dire que c’est l’heure, mais je suis déjà en train de mettre mon manteau. Elle me passe mon sac en toile lorsque nous nous croisons dans le couloir et je sors rapidement par le hall. Lorsque je vois que l’ascenseur est au rez-de-chaussée, je me décide à prendre les escaliers, et descends les marches quatre par quatre, attirant l’attention de João, l’agent de sécurité qui, lui, monte. « Eh bien, tu es pressé aujourd’hui. C’est toi qui donnes le cours ? » Me lance-t-il d’en haut après s’être agrippé à la rampe pour ne pas tomber. Je lui réponds que oui, lui dis à plus tard, et continue à descendre sans СКАЧАТЬ