Brancas; Les amours de Quaterquem. Assollant Alfred
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Название: Brancas; Les amours de Quaterquem

Автор: Assollant Alfred

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066085797

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СКАЧАТЬ même temps il sauta à terre et se trouva hors de danger; mais le plus difficile était encore à faire. La dame sèche criait de toutes ses forces:

      «Sauvez-moi! sauvez Claudie!» et lui tendait les bras.

      Brancas, mettant le pied sur la roue de la diligence, malgré le danger d'être renversé et écrasé sous les pieds des chevaux, dit d'une voix forte:

      «Donnez-moi la main, ou vous êtes perdue.»

      En même temps, les chevaux firent un violent effort pour se dégager, et la voiture recula. Claudie, éperdue, s'élança dans les bras du Parisien, qui l'enleva rapidement et la mit en sûreté.

      «Monsieur, sauvez ma mère!» s'écria-t-elle.

      Déjà la diligence, penchée sur le talus, perdait l'équilibre et allait rouler au fond du précipice; la dame sèche, épouvantée, sortait à demi du coupé sans oser sauter à terre et poussait des cris épouvantables. Le Parisien la saisit brusquement à bras le corps, l'enleva et la remit, non sans danger, aux mains de sa fille.

      Au même moment, un grand cri se fit entendre. La diligence et les chevaux roulèrent et se brisèrent au fond de la vallée. Heureusement, le conducteur et le postillon, qui s'étaient relevés sans graves contusions, avaient eu le temps de dégager les autres voyageurs. Tout le monde frémit, et Claudie s'écria:

      «Ah! monsieur, nous vous devons la vie!»

      Brancas reçut avec modestie ce remercîment et ceux de sa mère.

      Le danger passé, on tint conseil. Les voyageurs étaient à deux lieues du relai le plus proche. Le conducteur, forcé d'annoncer cette triste nouvelle, fut couvert de malédictions, aussi bien que le postillon malencontreux.

      «Qu'allons-nous faire? disait en gémissant la dame sèche. Il est trois heures du matin; nous gèlerons. Ce conducteur veut nous faire périr. J'écrirai à l'administration des Messageries, et je le ferai destituer. Brrr! qu'il fait froid!

      —Madame, dit Brancas, je vais descendre et chercher votre châle qui est resté dans la voiture.

      —Monsieur, dit la dame sèche en minaudant, je ne sais si je dois....»

      Au fond, elle brûlait d'envie de le voir descendre. Brancas le comprit, et, s'accrochant avec les mains aux arbustes, posant le pied avec précaution dans les moindres saillies du rocher, à la clarté de la lune, il commença cette périlleuse descente.

      «Laissez le châle! lui cria le conducteur, vous allez vous casser le cou!»

      Mais Brancas ne l'écoutait pas. Tout à coup, une grosse pierre sur laquelle ses pieds étaient appuyés glissa, et il parut près de rouler la tête la première dans le précipice. Heureusement il vit le danger et, par un effort désespéré, il reprit l'équilibre et parvint sans accident au fond de la vallée.

      Les voyageurs restés sur la route le regardaient avec une inquiétude mêlée d'admiration.

      «Voilà un gaillard qui ne manque pas de sang-froid, dit le conducteur. Au diable si je risque jamais ma peau et mes os pour aller chercher un châle.»

      La dame sèche l'entendit et répliqua sur-le-champ:

      «Ces hommes sont égoïstes et lâches!»

      Le conducteur vit bien qu'il n'était pas de force à soutenir une conversation qui débutait si vivement, et, ramassant le sac de dépêches qu'il s'était hâté de jeter hors de la diligence, il se mit à la tête de la caravane et prit le chemin du relais. Les voyageurs le suivirent clopin-clopant, demi-endormis, demi-éveillés, mais grognant tous avec un parfait ensemble.

      Enfin, l'avocat reparut, chargé de vêtements de toute espèce, parmi lesquels le châle de la dame sèche et ses socques. La dame sèche se confondit en remercîments auxquels il répondit de son mieux.

      Après quelques minutes, que les trois voyageurs employèrent à se rouler dans leurs châles et leurs manteaux, la vieille dame prit le bras de l'avocat et ils se hâtèrent de rejoindre les pauvres diables moins heureux qui étaient déjà en marche.

      «Vous êtes Parisien, monsieur? dit la dame sèche.

      —Oui, madame, et vous aussi, sans doute? répondit Brancas.

      —Non, monsieur, répliqua fièrement la dame sèche, mais il n'a tenu qu'à moi d'habiter Paris, et nous y avons des amis haut placés. M. Duverney, mon cousin, qui est chef de bataillon dans la garde nationale, dîne avec Louis-Philippe trois fois par an.

      —Diable! dit le Parisien, c'est un heureux homme que M. Duverney; est-ce qu'il est fonctionnaire public?

      —Non, monsieur, il est bottier, dit Claudie.

      —Il est bottier, reprit la mère; mais il n'était pas né pour faire des bottes. Il a publié, en 1835, un poëme dramatique intitulé: la Danse macabre, que Victor Hugo appelait le «monument impérissable du dix-neuvième siècle.» Je me rappelle encore les derniers mots de la lettre de Victor Hugo:

       «Lisez la Bible et Homère, mon cher Duverney. Nourrissez-vous de cette moelle de lion.»

      —Peste! dit l'avocat, c'est un brevet d'immortalité, cela.

      —N'est-ce pas, monsieur? Eh bien! le public est si peu connaisseur qu'il ne s'en est pas vendu six exemplaires, et cependant je vous jure qu'il n'y manquait aucune des épices de la vraie poésie. On y voyait des femmes séduites par des gnômes, des poëtes plus beaux que le jour assassinés la nuit par de jeunes princesses mal élevées, des rois qui s'embusquaient au détour des rues pour poignarder lâchement de sublimes boulangers. Monsieur, c'était une bénédiction. J'ai compté vingt-cinq personnes qui mouraient de mort violente en six mille vers. Notez que je laisse de côté les menus crimes, les petites trahisons, les viols, les adultères et autres incidents tragiques.

      —Six exemplaires vendus!

      —Oui, monsieur, six.

      —Au moins Louis-Philippe avait acheté l'un des six, puisqu'il a tant d'amitié pour M. Duverney?

      —Sa Majesté se soucie bien de poésie! La première fois que M. Duverney dîna aux Tuileries, Louis-Philippe lui parla de ses bottes pendant un quart d'heure. Pas plus de Danse macabre que sur la main. Monsieur, mon cousin était si outré qu'il allait voter pour le candidat de l'opposition. Heureusement le ministre de l'intérieur l'apprit et lui envoya la croix. Depuis ce temps, mon cousin est tout dévoué à la dynastie, et le roi ne fait rien sans lui demander conseil. Oh! c'est un homme de caractère que mon cousin Duverney. Il l'a dit souvent au roi: «Sire, tenez tête aux Anglais, développez le commerce, encouragez l'industrie, rendez le peuple heureux, et je réponds de tout. On ne connaît ses vrais amis que dans l'adversité; mais si vous êtes malheureux quelque jour, j'irai vous consoler dans votre exil. Vos pairs et vos députés pourront vous trahir, mais jamais Duverney ne vous manquera.»

      —Et qu'a répondu le roi?

      —Ma foi, le roi en est très-flatté; c'est que Duverney le ferait comme il le dit.»

      Le Parisien s'amusait fort de l'histoire du sieur Duverney, chef de СКАЧАТЬ