Chronique de 1831 à 1862, Tome 3 (de 4). Dorothée Dino
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Название: Chronique de 1831 à 1862, Tome 3 (de 4)

Автор: Dorothée Dino

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ même du parc. De même, elle ne peut vendre l'autre propriété d'Ampthill sans son consentement: il le donnerait volontiers, pour lever les hypothèques considérables dont elle a chargé des biens qui étaient immenses et sans une dette à l'avènement de son mariage avec lord Holland, si elle, de son côté, voulait faire quelque chose. Elle a tant dans son pouvoir, tant, dont malheureusement elle peut disposer, qu'on a conseillé à mon mari de demander quelque chose d'équivalent pour ce consentement; il ne lui demandait que de conserver la maison telle qu'elle était du vivant de son père, de ce père qu'il adorait, dont la mémoire lui est si chère; que la bibliothèque, les papiers qu'il a laissés, toutes ces choses lui tiennent plus au cœur cent fois que le solide, que l'argent dont elle peut disposer. Eh bien! elle ne veut pas, elle ne veut rien faire. Elle a consulté tous ses amis, qui tous lui ont démontré la vérité, l'ont priée de faire ce qu'elle doit faire. Non, ce sont des scènes, des injustices; et il faut tout voir, tout entendre, et ne pas se plaindre! La position est difficile, et quelquefois je sens mon sang bouillir dans mes veines; mais pour mon mari, je me retiens, et je fais comme ses fils, comme sa fille, qui sont des anges pour elle, et qui se conduisent avec une délicatesse, une tendresse, une réserve dont elle n'est, parfois, sûrement pas digne. Enfin, il faut espérer qu'un jour viendra où nous pourrons vivre tranquilles et rentrer dans cette chère maison qu'il ne nous a pas été permis d'approcher depuis notre arrivée. Pour le moment, il faut partir sitôt que nous le pourrons et retourner à Florence en passant par Paris.

      «Fanny Cowper n'épouse pas Charles Gore; elle ne peut encore se fixer, ni se décider; elle est toujours fort jolie6. La beauté par excellence, c'est lady Douro. Le duc de Wellington est de nouveau rétabli, mais il fait de telles imprudences qu'on ne peut jamais être en sûreté sur lui. On siffle lord Cardigan au théâtre, ce qui est fort ennuyeux pour ceux qui y vont. J'ai été à son jugement, qui m'a fort intéressée7. Il est bel homme, et il était pâle et intéressant; aussi, avons-nous été, nous Pairesses, contentes de sa libération. Mais c'était un peu théâtral, et je crains que, dans ces temps de réforme et de mécontentement, cela ne donne des griefs contre la Chambre des Pairs. Mon mari a prononcé bien les paroles: Pas coupable, sur mon honneur, mais celui qui les a prononcées mieux que personne était mon cousin, lord Essex. Du reste, vers le soir, les robes des Pairs, les tapisseries rouges, la présence des dames, etc., tout cela faisait un effet frappant. Les dames les plus admirées étaient lady Douro, lady Seymour, lady Mahon, ma cousine Caroline Essex.

      «Notre chère tante, miss Fox, que nous aimons tant, puisqu'elle a été une vraie mère pour mon mari, nous a mis dans la peine; elle a été bien malade, mais j'espère qu'elle est sauvée; elle pleure son frère qu'elle aimait pour lui, pour lui seul; ni vanité, ni regrets d'importance ou d'ambition n'entrent dans sa douleur, et tout ce qu'elle a vu ou entendu depuis sa mort l'a choquée, peinée. Nous avons été aussi en alarme pour ma pauvre cousine lady Melbourne: elle a été à la mort, d'une fausse couche de cinq mois; elle est sauvée, je crois et j'espère, mais ce sont des scènes qui font mal et restent empreintes sur le cœur. Elle croyait mourir, et quittait tout ce qu'elle aimait avec tranquillité, soumission et tendresse, n'oubliant rien de ce qui pouvait conduire au bonheur de son mari qu'elle laissait.

      «Nous passâmes une semaine, le premier de l'An, à Windsor; un tableau de bonheur parfait; notre chère petite Reine, le beau Prince Albert et la petite Princesse, bel enfant de bonne humeur, se laissant tout faire avec un sourire, signe certain de bonne santé. On dit que la Reine est encore grosse. Nous y dînâmes il y a quatre ou cinq jours, elle me parut un peu souffrante, mais deux soirs après, elle dansa beaucoup; mais, au reste, elle est si forte qu'on ne peut juger sur les apparences.»

      Rochecotte, 1er mars 1841.– Voici mon dernier mois de Rochecotte qui commence. Je l'envisage à regret. Je me suis trouvée ici aussi bien que je puis être à présent; j'y vis exemptée de fatigue, d'agitations, de blessures et de contrainte; je retrouverai tout cela à Paris, mais comme il y aurait une certaine affectation à n'y pas aller du tout, et qu'avant de partir pour l'Allemagne, j'ai pas mal de petits arrangements à prendre, de préparatifs à faire, qui ne peuvent s'accomplir qu'à Paris, j'en prends, quoiqu'en grommelant, mon parti pour le mois d'avril.

      J'ai reçu, hier, une lettre de Mme Mollien, qui me paraît assez amusante d'un bout à l'autre: «Il faut donc vous parler de ce bal costumé, vrai bal de carnaval et qui fera époque dans les annales des Tuileries pour avoir, pendant quelques heures, ramené dans ses murs, d'ordinaire assez tristes, la folle, franche et vive gaieté qui ne se voit guère que dans de plus simples salons: c'est au Prince de Joinville qu'est dû le succès de cette soirée. Rien ne peut résister à son entrain. Les costumes étaient variés, en général assez riches et de bon goût, à quelques exceptions près; il y a des exceptions partout. La Reine, les vieilles Princesses et les vieilles dames non costumées s'étaient rendues successivement dans la galerie Louis-Philippe; tous les costumes, hommes et femmes, se réunissaient dans une autre partie du Château, pour faire une entrée solennelle, qui eut lieu vers huit heures et demie, au bruit d'une musique infernale, composée de toutes sortes d'instruments plus ou moins barbares, que le Prince de Joinville a rapportés de ses voyages. Lui-même, en vrai costume turc, portait devant lui un immense tambour, oriental s'il en fut, dont il faisait un très bruyant usage. Un magicien, en guise de héraut, précédait le cortège, qui était conduit par la Duchesse d'Orléans: elle était superbe et avait le plus grand air. Son costume était celui de Marie de Bourgogne, velours noir, richement brodé d'or et garni d'hermine; le grand bonnet pointu, qui fait partie de ce costume, était orné par devant d'une barbe de velours, bordée tout autour par d'énormes chatons; le susdit bonnet était lui-même en drap d'or, surmonté à son extrémité d'un voile de tulle brodé en or. Deux dames et deux hommes, également en costume du temps de Louis XI, escortaient la Princesse: les deux femmes, dont le costume était pareil au sien, mais seulement moins riche, étaient Mmes de Chanaleilles et Olivia de Chabot; les hommes étaient M. Asseline, son secrétaire des commandements, et M. de Praslin, qui était à merveille dans un vêtement long, tout de velours brun et en martre, et qui s'appelait Philippe de Commines. Ma pauvre Princesse Clémentine n'était pas bien: elle portait un costume turc, rapporté par le Prince de Joinville, lors de son voyage en Syrie; c'était riche, mais lourd, peu gracieux, et sa mobile et charmante figure n'a retrouvé tous ses avantages qu'après souper, lorsque, pour danser plus à son aise, elle s'est débarrassée de son énorme coiffure qui l'écrasait. La Duchesse de Nemours, au contraire, était ravissante: elle avait copié un portrait de la femme du Régent, à qui on prétend qu'elle ressemble; une robe de dessus en velours, rouge, très courte, bouffante, relevée tout autour par des rubans et des diamants, sur une jupe de satin blanc, garnie de deux rangs de grosses franges chenilles et perles posées en guirlandes; un petit toquet de velours, avec une seule petite plume droite, posé en biais et bordant le front, en le dégageant extrêmement d'un côté; des cheveux très blonds, légèrement poudrés, frisés, mousseux, relevés de côté, tombant de l'autre, tout cela avait un certain air coquet, et, en même temps, négligemment abandonné qui était charmant; je ne l'ai jamais vue si jolie: ce n'était qu'un cri. Le reste ne vaut pas la peine d'être nommé. Cependant, il y avait de très belles toilettes. Des dames du temps de la Ligue, de la Fronde, de Louis XIII, de Louis XIV, quelques Espagnoles, et, entre autres, une vivandière du temps de Louis XV, qui faisait fureur. Mme de Montalivet et Mme de Praslin s'appelaient, à l'envi l'une de l'autre, Mlle de Hautefort. Beaucoup de dames poudrées. Le Duc d'Orléans n'était pas revenu de Saint-Omer, comme il l'avait fait espérer, au grand chagrin de la Princesse, pour qui, je crois, cela a beaucoup gâté la soirée. Le Prince de Joinville s'est promptement délivré de son costume turc. Ses deux jeunes frères étaient d'abord apparus en costumes militaires des derniers siècles. Après la première contredanse, tous trois s'en allèrent et revinrent bientôt, le Prince de Joinville et le Duc d'Aumale, en débardeurs, et le Duc de Montpensier en fifi du temps de la Régence. Si vous avez près de vous quelque habitué des bals masqués (je ne pense pas que ce soit M. de Castellane), faites-vous expliquer ce que sont ces costumes. Leur principal mérite, et qui, probablement, СКАЧАТЬ



<p>6</p>

Fille d'un premier mariage de lady Palmerston, et nièce de lord Melbourne, lady Fanny devait épouser, quelques mois plus tard, lord Jocelyn.

<p>7</p>

Le jeune colonel Cardigan avait eu plusieurs démêlés avec les officiers de son régiment, et, à la suite d'un duel avec le capitaine Harvey-Tuckett, qu'il blessa, il fut, en février 1841, traduit devant la Chambre des Lords constituée en Cour de justice. Un verdict d'acquittement y fut rendu en sa faveur: son accusation n'était qu'un hommage nécessaire rendu aux lois du pays contre le duel.