Mathilde. Эжен Сю
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Название: Mathilde

Автор: Эжен Сю

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ après tout quelques paroles passées? tu souffres, tu pleures: eh bien! je veux souffrir, je veux pleurer avec toi… Vois mes larmes… ma sœur, sens mon cœur comme il bat… Dis… maintenant, dis… crois-tu que ce soit là du mépris… de la pitié?

      – Eh bien! non, non; je te crois, Mathilde. Pardon! oh! pardon d'avoir un instant pu douter de ton cœur… Mais c'est qu'aussi j'avais… je dois avoir tant de préventions à détruire dans ton esprit!

      – Mais aucune, – te dis-je.

      – Alors, écoute-moi, ma sœur, ma tendre sœur. Tes larmes, ton affliction, m'arrachent mon secret. Tout à l'heure je ne voulais rien te dire… Je voulais ne plus te revoir, car vivre près de toi, soupçonnée par toi de fausseté, oh! cela me semblait impossible.

      – Pauvre Ursule! eh bien! voyons… ne méritai-je pas ta confiance?

      – Si… oh! si! mon Dieu! toi seule… écoute donc… Ce mariage me causait un tel désespoir que jusqu'au dernier moment, malgré moi, je crus qu'un événement imprévu l'empêcherait… Oui… j'étais comme ces condamnés qui savent qu'ils doivent mourir, qu'il n'y a pas de grâce pour eux, et qui pourtant ne peuvent s'empêcher d'espérer cette grâce impossible. C'était un dernier instinct de bonheur qui se révoltait en moi!

      – Ursule… Ursule… et ce que tu dis là est affreux. Combien tu as dû souffrir, mon Dieu!

      – J'obéis à mon père… je voulus te mettre dans l'impossibilité de consommer le généreux sacrifice que tu m'avais proposé. Ce mariage se fit… mon sort irrévocablement fixé, je n'avais que deux alternatives… la mort…

      – Ursule… Ursule, ne parle pas ainsi… tu m'épouvantes.

      – La mort, ou une vie à tout jamais malheureuse. Un moment je restai accablée sous le coup de ce funeste avenir! Pourtant, avant que de me désespérer tout à fait, je me demandai ce qui causait l'éloignement que m'inspirait mon mari; je me dis que c'était la vulgarité de ses manières, son éducation commune, car son cœur est bon, je crois…

      – Oh! sans doute, Ursule, crois-le, crois-le; il est généreux, il est bon. N'as-tu pas vu avec quelle sensibilité il parlait des bienfaits de M. de Rochegune! Mon Dieu! son langage, ses manières se façonneront au monde.

      – Eh bien, donc, je me suis dit: ce langage commun me choque, ces familiarités, presque grossières, me révoltent… Ma vie, désormais, doit se passer dans la compagnie de cet homme; il faut renoncer à toutes mes idées de jeune fille. Désormais je dois vivre d'une vie tout autre… Du courage… tout est fini, tout!!! – et les larmes couvrirent la voix d'Ursule.

      – C'est la délicatesse naturelle de mes habitudes, – reprit-elle, – de mes penchants qui me rend si malheureuse. Eh bien! puisque je ne puis pas élever mon mari jusqu'à moi… je m'abaisserai jusqu'à lui… Oui, ce langage qui me révolte, je le parlerai… ces manières qui me font frissonner de répugnance, je les imiterai… Mathilde! Mathilde! cela, je l'ai fait; j'ai flatté cet homme comme il voulait être flatté. J'ai feint de l'aimer comme il voulait être aimé… Ses expressions ridiculement familières je les ai répétées en rougissant d'humiliation et de honte… Oh! ma sœur, ma sœur… tu ne sauras jamais ce que j'ai souffert pendant les huit jours d'épreuves que je m'étais imposés!.. Tu ne sauras jamais ce qu'il y a d'affreux dans cette profanation de soi-même, dans ce mensonge des lèvres, dont le cœur se révolte. Oh! que de larmes dévorées en secret, pendant que je jouais cette triste et amère comédie!.. Mais, vois-tu, maintenant je ne puis plus, je souffre… non, je ne puis plus! Ah! plutôt que de continuer à m'abaisser à mentir ainsi… oh! oui… la mort! mille fois la mort.

      L'accent d'Ursule était si déchirant, si désespéré, son air si égaré, ses traits si bouleversés, qu'elle m'effraya.

      Alors je comprenais sa conduite; alors j'étais frappée du courage qu'il lui avait fallu pour tenter seulement ce qu'elle avait essayé.

      – Rassure-toi, rassure-toi, ma sœur, – lui dis-je, – écoute seulement mes conseils. Tu te trompes, je pense, en croyant nécessaire de t'abaisser au niveau de ton mari. Son cœur est généreux, il t'aime avec idolâtrie; essaye au contraire de l'élever jusqu'à toi… Tout à l'heure, n'as-tu pas vu avec quel empressement il accueillait les observations de mademoiselle de Maran? Juge donc de quelle autorité seraient les tiennes sur lui? Ursule, ma sœur, songe à cela… Sans doute, je t'aurais désiré une autre union; mais enfin celle-ci est accomplie. Ne repousse donc pas les chances de bonheur qu'elle t'offre.

      – Du bonheur, Mathilde? à moi du bonheur?.. oh! jamais.

      – Si, si, du bonheur… Ton mari est bon, franc, loyal… Il est riche, il t'aime. Il n'est pas d'une très-jolie figure; ses manières, son langage manquent d'élégance; soit; mais cela est-il donc irréparable? Mon Dieu! cela s'apprend si vite, l'exemple est tout! Et tu seras pour lui un si charmant exemple à étudier! Et puis, enfin, veux-tu que nous t'aidions?.. Oui, pour te rendre cette éducation plus facile, – lui dis-je en souriant, – veux-tu que moi et Gontran nous allions passer cet été quelque temps chez toi? Si tu ne veux pas encore prendre de maison à Paris, tu viendras chez nous. Aujourd'hui nous avons vu une maison assez grande pour que nous puissions t'offrir un appartement. Eh bien! mon projet, qu'en dis-tu?

      – Je dis que tu es toujours la meilleure des amies, la plus tendre des sœurs! – me dit Ursule en m'embrassant avec effusion. – Je dis que près de toi j'oublie mon malheur, et que tu as toujours le don de me faire espérer. Mais, hélas! maintenant, Mathilde, il me sera difficile de me faire illusion.

      – Je ne te demande pas de te faire illusion: je ne te demande que de croire aux réalités… Tu verras ton mari dans un an! Combien ton amour pour lui l'aura transformé!

      – Mais vois combien le chagrin rend égoïste! – me dit Ursule; – je ne te parle pas de ton bonheur; tu dois être si heureuse, toi!

      – Oh! oui, maintenant surtout que tu es là pour partager ce bonheur… Tiens, Ursule, si je te savais sans chagrin, je ne connaîtrais pas de félicité égale à la mienne: Gontran est si bon, si dévoué! c'est un si noble cœur, un caractère si élevé! et puis, il me comprend si bien! Oh! je le sens là… à la sécurité de mon cœur, c'est un bonheur de toute la vie. Il m'inspire une confiance inaltérable; la mort seule pourrait la troubler. Et encore! Non, non, quand on s'aime ainsi, quand on est aussi heureuse que je le suis, l'on ne survit pas; on meurt la première… Non, rien au monde ne pourrait m'ôter cette conviction, que je serai la plus heureuse des femmes, et que ce bonheur durera toute ma vie, ou plutôt toute la vie de Gontran!

      Maintenant encore, quoique ces prévisions de mon cœur aient été bien cruellement déçues, mon ami, je me souviens que cette créance à un avenir heureux était absolue, aveugle.

      Huit jours après l'arrivée d'Ursule, toute notre famille devait se rassembler le soir pour la signature de mon contrat de mariage avec M. de Lancry.

      Mademoiselle de Maran avait obtenu du maire de notre arrondissement de nous marier le soir après cette cérémonie, afin d'éviter les curieux.

      CHAPITRE IV.

      LA LETTRE

      Le jour de la signature du contrat, je fus réveillée selon mon habitude par Blondeau, qui m'apporta la corbeille d'héliotrope et de jasmin que depuis six semaines Gontran m'envoyait chaque matin.

      J'ai toujours attaché une importance СКАЧАТЬ