Название: La Querelle d'Homère dans la presse des Lumières
Автор: David D. Reitsam
Издательство: Bookwire
Жанр: Документальная литература
Серия: Biblio 17
isbn: 9783823302872
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Cependant, malgré ce petit défaut, Hardouin Le Fèvre de Fontenay donne une description relativement positive des bals de l’Opéra :
Le spectacle de Paris, le plus suivi à présent & le plus agréable en même temps, est celui dont les Directeurs de l’Opera regalent le public tous les Lundy, les Mercredy & les Samedy de chaque semaine. C’est un Bal établi avec tant d’ordre, de lumières, & de propreté, qu’il est devenu le divertissement de Paris le plus à la mode25.
Un peu plus loin, il déclare que « cet établissement a été inventé fort à propos, dans une Ville comme Paris, où il faut absolument des plaisirs26 ». Le responsable fait donc de la publicité pour ces événements tout en informant ses lecteurs provinciaux de la dernière mode parisienne. Si la couverture de ce nouvel événement socio-culturel le prend apparemment de court en janvier 1716 – il n’y accorde que 12 pages27 –, Le Fèvre de Fontenay se rattrape un mois plus tard et consacre presque 100 pages aux bals de l’Opéra. Ainsi, il en souligne la grande importance sans pour autant entrer dans une réflexion sur les raisons d’être de ce nouveau divertissement28.
En somme, l’exemple du bal de l’Opéra montre à nouveau l’aptitude d’Hardouin Le Fèvre de Fontenay à soutenir la politique royale. Tout comme dans le cas de la Comédie-Italienne, il promeut une innovation majeure de la Régence et suit – presque aveuglément – la direction choisie par les autorités.
Afin de conclure ce sous-chapitre, force est de constater que le Nouveau Mercure galant a sans aucun doute contribué à une certaine démarcation du siècle de Louis XIVLouis XIV en particulier, mais également du pouvoir politique en général sans pour autant prendre la position d’une opposition fondamentale. D’une part, la revue semble mettre le Régent en garde contre les dérives d’une politique trop ambitieuse – principalement s’il s’agit d’un lecteur averti qui sait lire entre les lignes. Et de l’autre, il est intéressant d’observer que les plumes du Nouveau Mercure galant défendent d’abord violemment la suprématie de la langue et de la culture françaises pour chanter ensuite les louanges du théâtre italien. Ainsi, Hardouin Le Fèvre de Fontenay illustre parfaitement la fonction politique d’une revue semi-officielle, c’est-à-dire dotée d’un privilège royal, qui soutient sans se poser trop de questions la politique et les orientations du pouvoir en place.
3. Rôle des femmes
3.1 La femme dans le champ littéraire naissant
La Querelle des Anciens et des Modernes fut également une Querelle des Femmes : la « Satire X » de Nicolas Boileau, NicolasBoileau, dans laquelle il se moque des vices des femmes, et la réaction de Charles Perrault, CharlesPerrault, qui entame une défense du beau sexe dans son Apologie des femmes, en témoignent1. Ainsi, il peut être observé que deux débats, qui ont tous les deux leurs propres histoires et traditions, convergent et forment une symbiose fructueuse, puisque génératrice de réflexions riches et controverses. Cette « sous-querelle2 » – pour reprendre les termes de Rotraud von Kulessa – qui oppose Boileau, NicolasBoileau et Perrault, CharlesPerrault illustre donc bien la grande productivité des différentes querelles à l’époque moderne en général et au siècle de Louis XIVLouis XIV en particulier. Étant donné que la Querelle d’Homère constitue non seulement un moment-clef de la Querelle des Anciens et des Modernes, mais qu’une femme savante, Anne Dacier, en est également une protagoniste, la question de savoir si la Querelle des Femmes a aussi des répercussions dans le Nouveau Mercure galant s’impose.
À en croire Gisela Bock et Margarete Zimmermann, plusieurs questions devront être étudiées. Par exemple, il sera intéressant d’analyser qui prend la parole pour énoncer quoi : des hommes parlent-il des femmes ou des contributrices prennent-elles la plume pour définir les qualités qui distinguent les femmes3 ? Deuxièmement, il faut bien expliquer le comportement féminin idéal mis en avant dans ces contributions4. En outre, dans ce contexte, il faut également vérifier une autre hypothèse de Bock et Zimmermann qui prétendent que les Modernes prennent en général position en faveur des femmes et que les Anciens les critiquent5. La controverse de Boileau, NicolasBoileau et de Perrault, CharlesPerrault évoquée en début de chapitre semble soutenir cette idée, mais cet exemple pourra-t-il être généralisé ?
Avant de reconstruire l’image que les contributeurs au Nouveau Mercure galant dressent d’Anne Dacier, il sera nécessaire d’étudier jusqu’à quel degré les commentaires sur la Querelle d’Homère constituent un prétexte afin de se prononcer sur ce qui caractérise le comportement digne et exemplaire d’une galante femme.
Les femmes et les érudites
Une première question soulevée est celle de savoir si les femmes doivent acquérir une érudition savante ou, au contraire, si elles peuvent s’en passer. Sans aborder les défenses et critiques de l’érudition en général qui seront discutées dans la partie consacrée à la dimension épistémologique de la Querelle d’Homère, il faut constater que cette problématique semble passionner les lecteurs et contributeurs au Nouveau Mercure galant.
Dans la livraison d’avril 1715, « un galant homme1 » publie une lettre qui reproduit une discussion probablement fictive et d’abord tranquille, mais par la suite, de plus en plus animée entre deux femmes : une Blonde, la représentante des Anciens dans le dialogue, et une Brune, qui est proche des Modernes. Après quelques échanges de politesse, la Blonde loue Anne Dacier de manière excessive puisqu’elle libérerait les femmes et leur ouvrirait de nouveaux champs d’action : « [S]on exemple [de Dacier] suffit à faire voir l’injustice des hommes qui nous veulent exclurre de la République des Lettres, & qui non contents de nous faire un crime de l’usage de nos cœurs, nous interdisent encore l’usage de nostre esprit2. » Ainsi, la représentante des Anciens souligne que les femmes peuvent être les égales des hommes. Y compris la Brune, à savoir la Moderne du dialogue, est obligée d’admettre que les femmes ont « toutes interest à […] applaudir [Madame Dacier]3 ». Par conséquent, et malgré le fait que par la suite, l’auteur de cette lettre fasse triompher sa Moderne, il paraît partager l’opinion de son Ancienne quant à cette question précise et dénonce l’éviction des femmes de la République des Lettres.
Certes, il se peut qu’il s’agisse d’une simple captatio benevolentiae étant donné l’orientation féminine de la revue, mais, de la même manière, ces lignes traduisent également un sentiment СКАЧАТЬ