Название: L'année terrible
Автор: Victor Hugo
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066304270
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Comme le vieil Entelle et le vieux d’Aubigné,
J’ai des frémissements, je frissonne indigné ;
Nous sommes dans Paris, volcan, fournaise d’âmes,
Près de deux millions d’hommes, d’enfants, de femmes,
Pas un n’entend céder, pas une; et nous voulons
La colère plus prompte et les discours moins longs:
Et je l’irais demain dire à l’hôtel de ville
Si je ne sentais poindre une guerre civile,
O patrie accablée, et si je ne craignais
D’ajouter cette corde affreuse à tes poignets,
Et de te voir traînée autour du mur en flamme,
Dans la fange et le sang, derrière un char infâme,
D’abord par tes vainqueurs, ensuite par tes fils!
Ces fiers Parisiens bravent tous les défis;
Ils acceptent le froid, la faim, rien ne les dompte,
Ne trouvant d’impossible à porter que la honte;
On mange du pain noir n’ayant plus de pain bis;
Soit; mais se laisser prendre ainsi que des brebis,
Ce n’est pas leur humeur, et tous veulent qu’on sorte,
Et nous voulons nous-même enfoncer notre porte,
Et, s’il le faut, le front levé vers l’orient,
Nous mettre en liberté dans la tombe, en criant:
Concorde! en attestant l’avenir, l’espérance,
L’aurore; et c’est ainsi qu’agonise la France!
C’est pourquoi je déclare en cette extrémité
Que l’homme a pour bien faire un cœur illimité,
Qu’il faut copier Sparte et Rome notre aïeule,
Et qu’un peuple est borné par sa lâcheté seule;
J’écarte le mauvais exemple, ce lépreux;
A cette heure il nous faut mieux que les anciens preux
Qui souvent s’attardaient trop longtemps aux chapelles;
Je dis qu’à ton secours; France, tu nous appelles;
Qu’un courage qui chante au lutrin est bâtard,
Qu’il sied de tout risquer, et qu’il est déjà tard!
C’est mon avis, devant les trompettes farouches,
Devant les ouragans gonflant leurs noires bouches,
Devant le Nord féroce attaquant le Midi,
Que nous avons besoin de quelqu’un de hardi;
Et que, lorsqu’il s’agit de chasser les Vandales,
De refouler le flot des bandes féodales,
De délivrer l’Europe en délivrant Paris,
Et d’en finir avec ceux qui nous ont surpris,
Avec tant d’épouvante, avec tant de misère,
Il nous faut une épée et non pas un rosaire.
VIII
Qu’on ne s’y trompe pas, je n’ai jamais caché
Que j’étais sur l’énigme éternelle penché ;
Je sais qu’être à demi plongé dans l’équilibre
De la terre et des cieux, nous fait l’âme plus libre;
Je sais qu’en s’appuyant sur l’inconnu, l’on sent
Quelque chose d’immense et de bon qui descend,
Et qu’on voit le néant des rois, et qu’on résiste
Et qu’on lutte et qu’on marche avec un cœur moins triste;
Je sais qu’il est d’altiers prophètes qu’un danger
Tente, et que l’habitude auguste de songer,
De méditer, d’aimer, de croire, et d’être en somme
A genoux devant Dieu, met debout devant l’homme;
Certes, je suis courbé sous l’infini profond.
Mais le ciel ne fait pas ce que les hommes font;
Chacun a son devoir et chacun a sa tâche;
Je sais aussi cela. Quand le destin est lâche,
C’est à nous de lui faire obstacle rudement,
Sans aller déranger l’éclair du firmament,
Et j’attends, pour le vaincre, un moins grand phénomène
Du tonnerre divin que de la foudre humaine.
IX
A L’ÉVÊQUE QUI M’APPELLE ATHÉE
Athée? entendons-nous, prêtre, une fois pour toutes.
M’espionner, guetter mon âme, être aux écoutes,
Regarder par le trou de la serrure au fond
De mon esprit, chercher jusqu’où mes doutes vont,
Questionnner l’enfer, consulter son registre
De police, à travers son soupirail sinistre,
Pour voir ce que je nie ou bien ce que je croi,
Ne prends pas cette peine inutile. Ma foi
Est simple, et je la dis. J’aime la clarté franche:
S’il s’agit d’un bonhomme à longue barbe blanche,
D’une espèce de pape ou d’empereur, assis
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