La corde au cou. Emile Gaboriau
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Читать онлайн книгу La corde au cou - Emile Gaboriau страница 14

Название: La corde au cou

Автор: Emile Gaboriau

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ pas moinsété soupçonné. Et, tel est l'esprit de notre pays, que ce soupçon fera ombre à sa vie entière. Dans vingt ans d'ici, en parlant de monsieur de Boiscoran, on dira encore: «Ah! oui, celui qui a mis le feu au Valpinson…»

      Ce fut non M. Galpin-Daveline, mais le procureur de la République qui répondit.

      – Je ne saurais, fit-il tristement, partager la manière de voir de monsieur le maire, mais peu importe. Après ce qui s'est passé, monsieur le juge d'instruction ne peut plus reculer, son devoir le lui interdit, et plus encore l'intérêt de l'homme accusé. Que diraient tous ces paysans, qui ont entendu la déclaration de Cocoleu et la déposition des témoins, si l'enquêteétait abandonnée? Ils diraient que monsieur de Boiscoran est coupable et que, si l'on ne le poursuit pas, c'est qu'il est noble et très riche. Sur mon honneur, je crois à son innocence absolue. Mais précisément parce qu'elle est ma conviction, je soutiens qu'il faut le mettre à même de la démontrer victorieusement. Il doit en avoir les moyens. Quand il a rencontré Ribot, il lui a dit qu'il se rendait à Bréchy pour voir quelqu'un…

      – Et s'il n'yétait pas allé? objecta M. Séneschal. Et s'il n'eût vu personne? Si ce n'eûtété là qu'un prétexte pour satisfaire l'indiscrète curiosité de Ribot?

      – Eh bien! il en serait quitte pour dire la vérité à la justice. Je ne suis pas inquiet. Et, tenez, il est une preuve matérielle qui, mieux que tout, disculpe monsieur de Boiscoran. Est-ce que si, par impossible, il eût eu dessein de tuer monsieur de Claudieuse, il n'eût pas chargé son fusilà balle au lieu d'y laisser du plomb de chasse…

      – Et il ne m'eût point manqué à dix pas…, fit le comte.

      Des coups précipités, frappés à la porte, les interrompirent.

      – Entrez! cria M. Séneschal.

      La porte s'ouvrit, et trois paysans parurent, effarés, mais visiblement satisfaits.

      – Nous venons, dit l'un d'eux, de trouver quelque chose de singulier.

      – Quoi? interrogea M. Galpin-Daveline.

      – On dirait, ma foi, unétui, mais Pitard prétend que c'est l'enveloppe d'une cartouche.

      M. de Claudieuse s'était haussé sur ses oreillers.

      – Montrez! fit-il vivement. J'ai tiré, ces jours passés, plusieurs coups de fusil autour de la maison, pourécarter les oiseaux qui mangeaient nos fruits; je verrai si cette enveloppe vient de moi.

      Le paysan la lui tendit.

      C'était une enveloppe de plomb, très mince, comme en ont les cartouches de deux ou trois systèmes de fusils de chasse américains. Fait singulier, elle avaitété noircie par l'inflammation de la poudre, mais elle n'avaitété ni déchirée, ni même faussée par l'explosion. Elleétait si parfaitement intacte qu'on y pouvait lire encore, en lettres repoussées, le nom du fabricant: Klebb.

      – Cette enveloppe ne m'a jamais appartenu, fit le comte.

      Mais ilétait devenu fort pâle en disant cela, si pâle que sa femme se rapprocha de lui, l'interrogeant d'un regard où se lisait la plus horrible angoisse.

      – Eh bien?…

      Il ne répondit pas. Et telleétait en ce moment l'éloquence décisive de ce silence, que la comtesse parut sur le point de se trouver mal et murmura:

      – Cocoleu avait donc toute sa raison!

      Pas un détail de cette scène rapide n'avaitéchappé à M. Galpin-Daveline. Sur tous les visages, autour de lui, il avait pu surprendre l'expression d'une sorte d'épouvante. Pourtant, il ne fit aucune remarque. Il prit des mains de M. de Claudieuse cette enveloppe métallique, qui pouvait devenir une pièce à conviction de la plus terrible importance, et durant plus d'une minute il la retourna en tous sens, l'examinant au jour avec une scrupuleuse attention. Ensuite de quoi, s'adressant aux paysans, debout et respectueusement découverts à l'entrée:

      – Où avez-vous trouvé ce débris de cartouche, mes amis? interrogea-t-il.

      – Tout près de cette vieille tour, qui reste du vieux château, où l'on serre des outils et qui est toute couverte de lierre.

      Déjà M. Séneschal avait maîtrisé la stupeur dont il avaitété saisi en voyant blêmir et se taire le comte de Claudieuse.

      – Assurément, fit-il, ce n'est pas de là que l'assassin a tiré. De cette place, on ne voit même pas l'entrée de la maison.

      – C'est possible, répondit le juge, mais l'enveloppe d'une cartouche ne tombe pas nécessairement à l'endroit d'où l'on fait feu. Elle tombe quand on ouvre le tonnerre de l'arme pour recharger…

      C'était si exact que le docteur Seignebos lui-même n'osa pas protester.

      – Maintenant, mes amis, reprit M. Galpin-Daveline, lequel de vous a trouvé ce débris de cartouche?

      – Nousétions ensemble quand nous l'avons aperçu et ramassé.

      – Eh bien! dites-moi tous trois votre nom et votre domicile, pour que je puisse, au besoin, vous faire citer régulièrement.

      Ils obéirent, et cette formalité remplie, ils se retiraient, après force salutations, quand le galop d'un cheval retentit sur l'aire qui précédait la maison.

      L'instant d'après, l'homme qui avaitété expédié à Sauveterre pour chercher des médicaments entrait. Ilétait furieux.

      – Gredin de pharmacien! s'écria-t-il, j'ai cru que jamais il ne m'ouvrirait!

      Le docteur Seignebos s'était emparé des objets qu'on lui rapportait.

      S'inclinant alors devant le juge d'instruction, d'un air d'ironique respect:

      – Je n'ignore pas, monsieur, dit-il, combien il est urgent de faire couper le cou de l'assassin, mais je crois aussi pressant de sauver la vie de l'assassiné. J'ai interrompu le pansement de monsieur de Claudieuse plus peut-être que ne le permettait la prudence. Et je vous prie de vouloir bien me laisser seul faire en paix mon métier…

      6. Rien, désormais, ne retenait plus le juge d'instruction, le procureur de la République ni M. Séneschal…

      Rien, désormais, ne retenait plus le juge d'instruction, le procureur de la République ni M. Séneschal. À coup sûr, M. Seignebos eût pu s'exprimer plus convenablement, mais onétait fait aux façons brutales de ce cher docteur, car elle est inouïe, la facilité avec laquelle, en notre pays de courtoisie, lesêtres les plus grossiers se font accepter, sous prétexte qu'ils sont comme cela et qu'il faut bien les prendre tels qu'ils sont.

      Donc, après avoir salué la comtesse de Claudieuse, après avoir serré la main du comte en lui promettant de promptes et sûres informations, ils sortirent.

      Faute d'aliments, l'incendie s'éteignait. Quelques heures avaient suffi pour anéantir le fruit de longues années de soins et de travaux incessants. De ce domaine charmant et tant envié du Valpinson, rien ne restait plus que des pans de murs calcinés et croulants, des amas de cendres noires et des monceaux de décombres d'où montaient encore des spirales de fumée.

      Grâce au capitaine Parenteau, tout ce qu'on avait pu arracher aux flammes avaitété transporté à une certaine distance et mis à l'abri vers les СКАЧАТЬ