Monsieur Lecoq. Emile Gaboriau
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Название: Monsieur Lecoq

Автор: Emile Gaboriau

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ de deux étrangers, elle se leva à demi, surprise, un peu effrayée même ; et quand ils lui eurent expliqué qu’ils avaient à lui parler assez longuement, elle quitta sa chaise pour l’offrir.

      Mais le vieil homme de police la contraignit de demeurer assise, et il resta debout pendant que Lecoq s’établissait sur l’autre chaise.

      D’un coup d’œil, le jeune policier avait inventorié le logis et évalué la femme.

      Elle était petite, courte, grosse, affreusement commune. Une forêt de rudes cheveux noirs plantés très bas sur le front et de gros yeux à fleur de tête donnaient à sa physionomie quelque chose de la navrante résignation de la bête maltraitée.

      Peut-être avait-elle eu autrefois ce qu’on est convenu d’appeler la beauté du diable, maintenant elle semblait presque aussi vieille que sa belle-mère.

      Le chagrin et les privations, les travaux excessifs, les nuits passées sous la lampe, les larmes dévorées et les coups reçus avaient plombé son teint, rougi ses yeux et creusé à ses tempes des rides profondes.

      Mais de toute sa personne s’exhalait un parfum d’honnêteté native que n’avait pu corrompre le milieu où elle avait vécu.

      Son enfant ne lui ressemblait en rien. Il était pâle et chétif, avec des yeux qui brillaient d’un éclat phosphorescent et des cheveux de ce jaune sale qu’on appelle le blond de Paris.

      Un détail émut les deux agents.

      La mère n’avait sur elle qu’une méchante robe d’indienne, mais le petit était chaudement vêtu de gros drap.

      – Madame, commença doucement Lecoq, vous avez sans doute entendu parler du grand crime commis dans l’établissement de votre belle-mère.

      – Hélas !… oui, monsieur.

      Et vivement elle ajouta :

      – Mais mon homme ne peut y être mêlé, puisqu’il est en prison.

      Cette objection, qui courait au devant du soupçon, ne trahissait-elle pas des appréhensions horribles ?

      – Oui, je le sais, dit le jeune policier, Polyte a été arrêté il y a une quinzaine….

      – Oh !… bien injustement, monsieur, je vous le jure. Il a été, comme toujours, entraîné par ses amis, des mauvais sujets. Il est si faible ; quand il a un verre de vin en tête, on en fait alors tout ce qu’on veut. De lui-même, il ne ferait pas de mal à un enfant, il n’y a qu’à le regarder….

      Tout en parlant, elle attachait des regards enflammés à une mauvaise photographie suspendue au mur et qui représentait un affreux garnement à l’œil louche, à la bouche grimaçante à peine ombragée d’une légère moustache, portant des mèches de cheveux bien collées aux tempes. C’était là Polyte.

      Et il n’y avait pas à s’y méprendre, cette malheureuse l’aimait toujours ; c’était son mari, d’ailleurs.

      Une minute de silence suivit cette scène muette où éclatait la passion, et c’est pendant ce silence que la porte de la mansarde s’entr’ouvrit doucement.

      Un homme avança la tête et la retira aussitôt avec une sourde exclamation. Puis, la porte se referma, la clé grinça dans la serrure, et on entendit des pas rapides dans l’escalier.

      Assis dans la mansarde, le dos tourné à la porte, Lecoq n’avait pu apercevoir le visage de l’étrange visiteur.

      Et, si promptement qu’il se fût retourné au bruit, il avait deviné le mouvement bien plutôt qu’il ne l’avait surpris.

      Pourtant il n’eut pas l’ombre d’un doute.

      – C’est lui, s’écria-t-il, le complice !

      Grâce à sa position, le père Absinthe avait vu.

      – Oui, dit-il, oui, j’ai reconnu l’homme qui m’a grisé hier.

      D’un bond, les deux agents s’étaient jetés sur la porte, et ils s’épuisaient pour l’ouvrir en stériles efforts. Elle résistait, elle tenait bon, car elle était de chêne plein, ayant été achetée aux démolitions par le propriétaire, et ajustée là, par hasard, avec sa vieille et solide serrure.

      – Mais aidez-nous donc, disait le père Absinthe à la femme de Polyte, pétrifiée de surprise, donnez-nous donc une barre, un morceau de fer, un clou, n’importe quoi !…

      Le jeune policier, lui, s’ensanglantait les mains à essayer de renfoncer le pêne ou d’arracher la garde. Il trépignait de rage…

      Enfin, la porte fut forcée, et les deux agents, animés d’une ardeur pareille, s’élancèrent à la poursuite de leur mystérieux adversaire.

      Arrivés dans la ruelle, ils s’informèrent. Ils pouvaient donner le signalement de l’homme ; c’était quelque chose. Deux personnes l’avaient vu entrer dans la maison de Toinon-la-Vertu, une troisième l’avait remarqué lorsqu’il en était sorti précipitamment. Des enfants qui jouaient sur la chaussée assurèrent que cet individu s’était enfui à toutes jambes dans la direction de la rue du Moulin-des-Prés.

      C’était dans cette rue, près de l’endroit où s’y amorce la ruelle de la Butte-aux-Cailles, que Lecoq avait fait arrêter sa voiture.

      – Courons-y ! proposa le père Absinthe, le cocher pourra peut-être nous donner quelque renseignement.

      Mais l’autre hocha la tête d’un air découragé et ne bougea point.

      – À quoi bon !… prononça-t-il. La présence d’esprit qu’a eue cet homme de donner un tour de clé l’a sauvé. Il a maintenant dix minutes d’avance sur nous, il est loin, nous ne le rattraperons pas.

      Le vieil agent était blême de colère.

      Il considérait maintenant comme son ennemi personnel ce rusé complice qui l’avait si cruellement mystifié ; il eût donné un mois de sa paye pour lui mettre la main au collet.

      – Ah ! ce n’est pas le toupet qui lui manque, à ce brigand, dit-il, ni la chance !… Penser qu’il se moque de nous, comme une souris qui jouerait avec les griffes du chat, et que voici trois fois qu’il nous échappe … Trois fois !…

      Le jeune policier était aussi irrité au moins que son collègue, et bien autrement blessé dans sa vanité. Mais il sentait la nécessité du sang-froid.

      – Oui, répondit-il, d’un ton pensif, le mâtin est hardi et intelligent, et il ne reste pas les jambes croisées. Si nous travaillons, il se remue ferme. Ce démon-là est partout. De quelque côté que je pousse l’attaque, je l’y trouve sur la défensive. C’est lui, l’ancien, qui vous a fait perdre la piste de Gustave, c’est lui qui a organisé cette belle comédie de l’hôtel de Mariembourg…

      – Et maintenant, objecta le bonhomme, d’un air capable, que le Général vienne donc nous chanter que c’est des fantômes que vous prétendez conduire au poste !…

      Si délicate que fût la flatterie, elle ne put tirer Lecoq de ses réflexions.

      – Jusqu’à présent, reprit-il СКАЧАТЬ