François de Bienville: Scènes de la Vie Canadienne au XVII siècle. Joseph Marmette
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Название: François de Bienville: Scènes de la Vie Canadienne au XVII siècle

Автор: Joseph Marmette

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

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isbn: 4064066082611

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СКАЧАТЬ son retour à Québec, il fut reçu avec de grandes démonstrations de joie par tous les habitants, y compris ceux-là mêmes qui avaient le plus contribué à son rappel en France, quelques années auparavant.

      Peu de temps avant le retour de M. de Frontenac, le tomahawk iroquois avait frappé le plus terrible des coups à Lachine, où deux cents personnes avaient péri dans cette néfaste journée. Les auteurs de ce drame sanglant promenaient encore par le pays l'effroi de leurs armes, quand le comte de Frontenac arriva au secours des colons.

      La situation prit dès lors un autre caractère. Dans l'espace de quelques mois, Schenectady, Salmon-Falls et Casco, bourgs fortifiés de la Nouvelle-Angleterre, disparaissaient sous des ruines; tandis que les Iroquois étaient repoussés, et que le brave d'Iberville laissait aux Anglais, dans la baie d'Hudson, les sanglants souvenirs de ses audacieuses victoires.

      Tel était le comte de Frontenac, gouverneur de la Nouvelle-France, au début de ce récit.

      Au moment où nous vous présentons à lui, sa tête, ornée d'une perruque légèrement poudrée et à torsades ou tire-bouchons, descendant à droite et à gauche de sa mâle figure, était coiffée d'un chapeau à trois cornes bordé d'or. Son manteau de voyage, de couleur sombre, aussi galonné d'or, laissait entrevoir un long justaucorps gris à parements et à retroussis de couleurs tranchantes, et en dessous une courte veste brodée. Il portait encore des nœuds de cravate de dentelle, des nœuds d'épaule et d'épée. Le bas de ses chausses s'engouffrait en bouffant dans des bottes de chasse évasées par le haut, dont il avait eu la précaution de se munir pour le voyage. Les poignets de ses mains blanches, mais amaigries par l'âge, se perdaient dans les gracieux replis de deux manchettes de dentelle. Enfin, un large baudrier, tout brodé d'or, lui descendait de l'épaule droite au côté gauche et retenait une brillante épée, dont le bout du fourreau relevait le manteau par derrière, tandis que la poignée, appuyée sur sa hanche gauche, laissait miroiter à la lumière des bougies les pierreries dont la garde était ornée.

      MM. Prevost et de Bienville étaient moins richement vêtus. Un simple filet d'or bordait le chapeau du major, tandis que celui du jeune Le Moyne n'était garni que d'un galon d'argent. Toutefois, M. Prevost, au lieu d'être chaussé de lourdes bottes, comme le comte et Bienville, ne portait que des bottes de ville, ou bottines, et de longs bas de soie noire qui laissaient librement se dessiner son musculeux mollet.

      François Le Moyne, sieur de Bienville, compagnon de voyage de M. de Frontenac, avait vingt-quatre ans. Bien qu'il doive être un des principaux acteurs dans ce récit des hauts faits d'un âge héroïque, veuillez bien, jolies lectrices, ne le point orner d'avance de ces qualités extérieures dont beaucoup de romanciers se plaisent à habiller leurs héros.

      Bienville n'avait pas une de ces tailles élancées qui se dessinent si bien, selon le goût moderne, sous la coupe plus ou moins élégante des habits de nos tailleurs à la mode; bien au contraire, il était trapu, courtaud, robuste et carré.

      Le nôtre arrivait de la baie d'Hudson, où il avait guerroyé contre l'Anglais, pendant plusieurs mois, avec ses frères d'Iberville, Sainte-Hélène et Maricourt. Accoutumées, lors des fréquentes expéditions qu'il faisait à travers les bois, à manier la hache autant que l'épée, ses mains étaient devenues épaisses, larges et musculeuses.

      Enfin, lectrices, dernière déception pour vous, M. de Bienville n'était pas beau de figure. Cependant, pour rester dans le vrai, je dois me hâter d'ajouter qu'il n'était certainement pas laid.

      Si vous aviez examiné ses grands yeux bruns, où se lisaient l'intelligence, le courage, ainsi qu'une aristocratique fierté, ses lèvres tant soit peu dédaigneuses et si fines de contour, vous n'auriez pas remarqué, sans doute, qu'il avait la figure osseuse et fort peu d'animation dans le teint. Si enfin, tenant vos doigts mignons dans sa main nerveuse et dure, cet homme, frère de héros et héros lui-même, vous eût dit: "Je vous aime," peut-être alors, mademoiselle, aurait-il pris un extérieur plus séduisant à vos yeux, et n'auriez-vous pas retiré votre main tremblante de celle du galant guerrier.

      La famille de François Le Moyne de Bienville était originaire de Normandie. Le père de notre héros, Charles Le Moyne, qui avait brillé au premier rang dans les combats alors si fréquents avec les Iroquois, avait eu onze fils et deux filles. Cinq des premiers moururent au champ des braves, après avoir étonné leurs contemporains par leur courage indomptable et leurs merveilleux faits d'armes.

      M. de Bienville, quatrième fils de Charles Le Moyne, avait déjà, tout jeune qu'il était encore, la réputation bien méritée d'un vaillant soldat et d'un bon officier. Il avait, l'année précédente, fait ses preuves à la baie d'Hudson, où il avait rivalisé d'audace avec ses frères.

      Il était à peine revenu de ces contrées, et se trouvait à Montréal, quand M. de Frontenac, qui s'y était aussi rendu pour s'opposer à l'invasion par terre tentée par Winthrop, dont nous parlerons bientôt, ayant été rappelé à Québec par l'approche d'une flotte anglaise, lui avait demandé de descendre à la capitale en sa compagnie. Comme le sieur de Bienville flairait de loin la poudre, haïssait mortellement l'Anglais, et se trouvait bien partout où il y avait de glorieuses estocades à donner--quitte à en recevoir en échange--il avait accepté avec joie, et s'était aussitôt embarqué avec le comte, qui l'affectionnait particulièrement.

      Mais ils avaient couru maint danger en descendant le fleuve: leur barque s'était échouée à la Pointe-aux-Trembles; et, pour ne point perdre de temps, ils avaient pris un mauvais canot d'écorce, qui faillit chavirer plus d'une fois avant de les amener à bon port.

      C'est après toutes ces péripéties que nous les avons vus monter au château du Fort en compagnie du major Prevost.

      La chambre où ils entrèrent était spacieuse. Dans la vaste cheminée, qui occupait à elle seule plus de la moitié de l'un des pans de la pièce, pétillait un feu des mieux nourris.

      --Vive Dieu! mon cher Bienville, dit le comte en s'approchant du bon feu clair, voici qui vaut mieux, je pense, que cet air glacial de tantôt. Allons, mon gentilhomme, prenez place à ma gauche, et vous, major, asseyez-vous sur ce siège à ma droite.

      Puis, se tournant vers un valet de chambre:

      --Faites servir le souper.

      --Eh bien! major, dit-il ensuite, quoique l'on fasse ici bonne garde, l'ennemi n'est pas encore en vue.

      --Non, monsieur le comte, mais peut-être qu'il n'est pas bien loin.

      --Ah!.....quelles nouvelles en avez-vous?

      --J'ai envoyé ce matin un éclaireur à la découverte, et il a aperçu des bâtiments mouillés en grand nombre au pied de l'île.

      --Par la mordieu! s'écria le gouverneur, qui jurait en bon gentilhomme, pourvu que mes soldats et miliciens de Montréal et des Trois-Rivières aient le temps d'arriver. Mais il serait peut-être bon d'envoyer sur l'heure un officier avec un détachement, pour observer l'ennemi et nous avertir de son approche.

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