La fiancée du rebelle: Épisode de la Guerre des Bostonnais, 1775. Joseph Marmette
Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу La fiancée du rebelle: Épisode de la Guerre des Bostonnais, 1775 - Joseph Marmette страница 5

Название: La fiancée du rebelle: Épisode de la Guerre des Bostonnais, 1775

Автор: Joseph Marmette

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066085148

isbn:

СКАЧАТЬ colonel McLean achevait de persuader l'assemblée en lui exposant combien le gouverneur était décidé d'opposer la plus vigoureuse résistance si les troupes de Montgomery et d'Arnold venaient, comme il était plus que probable, assiéger la ville. Québec était assez bien pourvu d'armes, d'approvisionnements et de munitions pour tenir les assiégeants en échec jusqu'au printemps, et permettre ainsi d'attendre les secours que l'Angleterre ne manquerait pas d'envoyer au Canada des le retour de la belle saison. Alors les partisans de la bonne cause reprendraient l'avantage et l'on verrait les rebelles dans la confusion et les traîtres aux abois. Les citoyens ne demandaient pas mieux que d'être rassurés, eux que la coupable insouciance du lieutenant-gouverneur Cramahé avait tant indignés pendant l'absence du général Carleton. Car on sait que pendant tout le temps que le gouverneur général avait été à Montréal, le sieur Cramahé, au lieu de s'occuper à préparer la défense de la ville, n'avait eu d'autres soucis que de festoyer avec le club des "Barons de la Table-Ronde", qu'il avait organisé lui-même à Québec.

      L'assemblée se dispersa paisiblement et avec des dispositions tout-à-fait contraires à celles que Williams avait voulu lui communiquer.

      Le jeune homme pâle fut le premier à sortir de la chapelle. Comme il lui fallait passer en face de l'officier qui attendait le colonel McLean, leurs regards se croisèrent encore une fois comme des lames acérées et avides de sang.

      Le géant qui suivait le jeune homme regarda l'officier de travers, comme un colosse prêt à bondir à la gorge de celui que l'instinct lui dit être l'ennemi de son maître.

      Arrivé à l'endroit où finit la moitié de la côte de Lamontagne pour commencer la rue Port-Dauphin, le jeune homme s'arrêta et dit à son formidable compagnon, qui était son serviteur:

      —Célestin, tu vas descendre seul à la maison, il n'est pas nécessaire que tu m'attendes. Je rentrerai tard. Couche-toi.

      —Je ne me sens pas encore l'envie de dormir, monsieur Marc. Si ça vous est égal, je fumerai la pipe en vous attendant.

      —A ton aise, mon vieux, repartit le jeune homme, qui monta la rue Port-Dauphin tandis que l'autre descendait la côte de Lamontagne en frappant lourdement de ses larges pieds le sol humide. Le jeune homme parcourut toute la rue Port-Dauphin, prit la rue du Fort et tourna à droite, après avoir jeté un coup-d'oeil distrait sur le château Saint-Louis et le convent des Récollets, qui dressaient, l'un en arriére et l'autre à gauche de la Place-d'Armes, leur masse indécise et plus noire encore que le fond sombre de la nuit.

      Tandis qu'il gagnait la rue Sainte-Anne de ce pas leste et ferme de jeune homme, dont la vue fait soupirer le vieillard, McLean et l'officier qui l'avait accompagné, débouchaient de la rue du Fort.

      —Eh bien! dit McLean en s'arrêtant pour serrer la main de son subordonné, bonsoir Evil. Plus chanceux que moi, amusez-vous bien tandis que je ferai mon rapport au général. Allez, dansez en toute liberté, car vous aurez bientôt à figurer dans un bal votre vis-à-vis vous lancera de traîtres balles de plomb au lieu de ces oeillades veloutées qui vont vous être décochées ce soir.

      —Merci, colonel! bonsoir.

      —Bonne nuit.

      Le capitaine James Evil tourna le dos à McLean qui montait vers le château, et il s'engagea dans la rue Sainte-Anne.

      Après avoir longé le mur de clôture qui bordait la cour entière du collège des Jésuites, lequel devait être enlevé à ses propriétaires et transformé en casernes l'année suivante, le capitaine continua d'avancer jusqu'à l'extrémité de la rue Sainte-Anne, qui finissait alors vis-à-vis du lieu où s'élève maintenant le collège Morrin. Arrivé au bout de la rue, Evil s'arrêta, embrassa d'un coup-d'oeil la façade illuminée de la dernière maison qui s'élevait à gauche, gravit les trois ou quatre marches du seuil, et, la main gauche campée, provoquante sur la garde de son épée, il souleva de la droite le lourd marteau de fer et le laissa bruyamment retomber. La même porte qui s'ouvrit devant lui venait aussi de donner accès au jeune homme pâle.

       Table des matières

      COUPS D'ARCHET, DE LANGUE ET D'ÉPÉE.

      Il y avait, ce soir-là, grande veillée dans cette maison de la rue Sainte-Anne. Le maître, M. Nicolas Cognard, royaliste renforcé, avait voulu témoigner son zèle à la bonne cause en réunissant ses connaissances chez lui pour montrer toute la joie que l'arrivée du gouverneur lui faisait éprouver. Il ne faudrait cependant pas confondre le sentiment qui lui avait dicté cette démonstration avec ce dévouement désintéressé qui lie un homme à un parti en vertu d'une conviction pure. Bien qu'il y eut à cette époque, pour le moins autant qu'aujourd'hui, de ces honnêtes gens qui sacrifient leurs intérêts les plus chers à certains principes sacrés, nous devons avouer que la loyauté de M. Cognard ne découlait point d'une source aussi limpide. Il était du bien petit nombre de ces Canadiens qui se rallièrent immédiatement aux vainqueurs après la conquête, afin de captiver leurs bonnes grâces et d'en obtenir des faveurs.

      Possesseur d'une charge lucrative sous le gouvernement français, maître Cognard, compromis dans les malversations de Bigot et Cie.[2], n'avait pas osé émigrer, et avait su conserver sa place sous la domination anglaise, grâce à une parfaite servilité. Aussi fut-il un des rares Canadiens qui participèrent aux emplois de l'administration de Murray et des gouverneurs qui lui succédèrent. Pour quiconque connaît la jalouse méfiance des conquérants de cette époque, il est facile de se faire une idée de la flexibilité de l'échine de M. Cognard.

      [Note 2: Voir l'Intendant Bigot.]

      Il est vrai qu'on se le montrait du doigt parmi ses compatriotes qu'un juste sentiment de dignité tenait éloignés des vainqueurs; mais lui n'en riait pas moins de ce qu'il appelait leur sot patriotisme. A ceux qui lui témoignaient ouvertement leur mépris, il disait en riant que l'argent anglais avait bien meilleur cours que les assignats dont le gouvernement avait inondé le pays sur les derniers temps de la domination française. Naturellement il était rare que pareille objection lui attira une réplique. Avec les hommes de cette trempe, les honnêtes gens évitent toute discussion. Nicolas Cognard était un homme de cinquante ans, de taille moyenne et carré d'épaules. Sa figure musculeuse, sanguine et dure avait dans l'ensemble quelque chose de vulgaire et qui déplaisait à première vue. Venait-il à parler, l'impression désagréable qu'il causait s'augmentait encore. Les grincements de sa voix aiguë et rauque écorchaient le tympan comme les notes criardes d'une mauvaise clarinette. Cette comparaison s'offrait tellement à la pensée de ceux qui le connaissaient, que les malins disaient que c'était un instrument parfaitement faux.

      M. Cognard avait eu de son premier mariage une fille unique qui ne ressemblait guère à son père et dont nous esquisserons, dans un instant, la sympathique figure.

      Madame Gertrude, la seconde femme de Cognard, était la plus longue, la plus sèche, la plus anguleuse et la plus revêche des créatures. Avec un langage mielleux et une figure doucereuse, sous les dehors les plus cauteleux, sous les démonstrations de la, politesse la plus affectée, elle cachait l'âme la plus envieuse, le coeur le mieux gonflé de venin qui ait jamais battu sous les côtes d'une vieille bégueule. Mariée par intérêt à quarante-cinq ans, elle avait eu le temps, pendant la durée de ce célibat prolongé, d'accumuler en elle tout le fiel des vieilles filles dédaignées contre ce qui est beau, jeune et recherché. Aussi haïssait-elle cordialement sa belle-fille Alice.

      Celle-ci, СКАЧАТЬ