Histoire fantastique du célèbre Pierrot. Assollant Alfred
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Читать онлайн книгу Histoire fantastique du célèbre Pierrot - Assollant Alfred страница 5

Название: Histoire fantastique du célèbre Pierrot

Автор: Assollant Alfred

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

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isbn: 4064066087142

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СКАЧАТЬ même temps elle parut en costume de dame d'honneur aux yeux du géant, qui ne l'avait pas encore vue. Vous imaginez assez ce que devait être la fée Aurore en dame d'honneur. Les plus belles filles d'Ève n'étaient auprès d'elle que des cailloux bruts, comparés aux purs diamants de Golconde. C'était une grâce, une lumière, une divinité. Tout en elle paraissait rose, transparent, diaphane, fait d'une goutte de lait dorée par un rayon de soleil. Elle regarda les cent mille Tartares, et tous, d'un commun accord, se prosternèrent contre terre. Pantafilando lui-même en fut ébranlé jusqu'au fond du coeur; il se sentit subitement radouci, ramolli, et saisi d'un transport de joie dont la cause lui était inconnue. Quant à Pierrot, il était ravi et transporté en esprit au-dessus des planètes. Il ne craignait plus ni le géant ni personne. Il ne craignait que de ne pas exécuter assez vite les ordres de sa marraine.

      —Seigneur, dit-elle à Pantafilando, la princesse Bandoline, ma maîtresse, qui a depuis longtemps entendu parler de vos exploits, est ravie de vous voir. Mais elle vous prie d'entrer seul dans ce palais avec deux ou trois officiers. C'est en habit de fête et non en habit de guerre qu'il faut venir voir sa fiancée.

      —Mon enfant, dit le gros Pantafilando, si ta maîtresse a seulement la moitié de ta beauté, mon coeur et ma main sont à elle; mais, sans aller plus loin, si tu veux m'épouser, je te fais dès à présent impératrice des îles Inconnues, et pour peu que tu le désires, j'y joindrai le royaume de la Chine, que mes Tartares et moi nous dévorerons en un instant. N'est-ce pas, amis? dit-il en se tournant vers son escorte.

      —Oui, oui, s'écrièrent à la fois les cent mille Tartares en remuant les mâchoires comme des castagnettes; nous mangerons la Chine et tous ses habitants.

      Cette armée était si admirablement disciplinée, que chaque soldat buvait, mangeait, dormait, marchait et parlait à la même heure, à la même minute que tous ses camarades. C'était un modèle d'armée. Chaque matin on lui disait ce qu'elle devait penser dans la journée, et, en vérité, il n'y avait pas d'exemple de soldat qui eût pensé à droite ni à gauche contre les ordres de son chef.

      —Seigneur, répliqua la fée en souriant, tant d'honneur ne m'appartient pas; mais souffrez que j'annonce votre arrivée à ma maîtresse. Et elle disparut.

      —Corbleu! dit le géant en passant sa langue sur ses lèvres, comme un chat qui lèche ses babines après dîner, comment t'appelle-t-on, capitaine?

      —Pierrot, seigneur.

      —Corbleu! capitaine Pierrot, par le grand Mandricard mon aïeul, premier empereur des îles Inconnues, voilà une jolie fille, et je veux lui faire plaisir. Holà! trois généraux! qu'on me suive, et que tous les autres remontent à cheval et attendent mes ordres, la lance en arrêt. Toi, Pierrot, montre-moi le chemin.

      Pierrot ne se fit pas prier. Il entra dans la salle à manger, qui était aussi la salle d'audience du grand Vantripan. La porte n'ayant que 60 pieds de haut, Pantafilando, qui marchait sans précaution, se cogna le front contre le montant supérieur. Il entra en jurant horriblement.

      —Que mille millions de canonnades renversent ce palais sur la tête de ceux qui l'ont bâti et de ceux qui l'habitent!... s'écria-t-il d'une voix si forte que toutes les vitres de la salle se brisèrent en éclats.

      —Diable! dit Pierrot, les affaires vont mal.

      Vantripan était assis sur son trône. Sa famille était à ses côtés avec toute la cour; mais au seul bruit de la voix de Pantafilando, toutes les dames s'enfuirent saisies d'une terreur panique. Les courtisans auraient bien voulu suivre cet exemple; mais les portes étaient trop étroites pour donner passage à tout le monde, et beaucoup furent forcés, ne pouvant fuir, de faire contre mauvaise fortune bon coeur.

      —Quel est l'officier de garde aujourd'hui! s'écria Vantripan d'une voix mal assurée.

      —C'est moi, sire, répondit Pierrot qui avait repris tout son sang-froid.

      —Quelle est la consigne?

      —De couper le cou à tous ceux qui entrent ici sans permission.

      —Eh bien, pourquoi n'as-tu pas coupé le cou à cet immense Tartare, et pourquoi laisses-tu entrer ici le premier venu?

      Pierrot allait répondre, le géant l'interrompit.

      —Le premier venu! s'écria Pantafilando. Oui, certes, le premier venu de cent mille Tartares qui n'attendent à ta porte que mon signal pour te casser en mille morceaux, toi et ta ville de porcelaine et tes coquins de sujets, dont aucun n'ose me regarder en face.

      —Prenez la peine de vous asseoir, monseigneur, dit alors Vantripan en présentant lui-même son fauteuil au géant, et excusez l'incivilité de mes officiers qui ne vous ont peut-être pas traité avec tous les égards dus à votre rang. Et, à propos, seigneur, à qui ai-je l'honneur de parler?

      —Ah! ah! vieux cafard, dit le bruyant Pantafilando, tu ne me connais pas, mais à ma mine seule tu as deviné que j'étais un hôte illustre. Je suis le géant Pantafilando, si connu dans l'histoire; Pantafilando, empereur des îles Inconnues, souverain des mers qui entourent le pôle et des neiges qui couvrent les monts Altaï; Pantafilando, qui a conquis le Beloutchistan, le Mazandéran et le Mongolistan; qui fait trembler l'Indoustan et la Cochinchine; qui rend muets comme des poissons le Turc et le Maure, et devant qui la terre frissonne comme l'arbre sur lequel souffle l'ouragan, pendant que l'Océan demeure immobile de frayeur; je suis Pantafilando, l'invincible Pantafilando.

      Durant ce discours, tous les assistants mouraient de peur. Pierrot seul regarda le géant sans pâlir.

      —Voilà, pensa-t-il, un grand fanfaron; mais sa barbe rousse, ses moustaches retroussées en croc et sa voix de chaudron percé ne m'effrayent pas.

      —A quel heureux événement devons-nous le plaisir de vous voir? dit Vantripan.

      —Je viens te demander en mariage ta fille Bandoline, la Reine de Beauté.

      —Je vous la donne avec beaucoup de plaisir, s'écria Vantripan. Elle ne pouvait pas trouver un époux plus digne d'elle. Elle est à vous, avec la moitié de mes États.

      —J'en suis enchanté, s'écria Pantafilando, et la dot ne me plaît pas moins que la fiancée. Entre nous, mon vieux Vantripan, tu es un peu âgé pour gouverner encore un si grand empire, et tu feras bien de prendre du repos. Dans une famille bien unie, un gendre est un fils. Tout n'est-il pas commun entre un père et ses enfants? La Chine nous est donc commune. Or, quand un bien est commun à deux propriétaires, si l'un des deux est paralytique, c'est à l'autre de le remplacer dans l'administration de la propriété commune. Tu es paralytique d'esprit, impotent de corps; donc, moi qui suis sain de corps et d'esprit, je te remplace dans le gouvernement et dans l'administration du royaume. C'est un lourd fardeau; mais, avec l'aide de Dieu, j'espère y suffire.

      —Mais je ne suis pas paralytique, essaya de dire Vantripan.

      —Tu n'es pas paralytique! dit Pantafilando feignant d'être étonné. On m'avait donc trompé. Si tu n'es pas paralytique, prends ce sabre et défends-toi.

      —Hélas! seigneur, dit tristement le pauvre Vantripan, je suis paralytique, étique et phthisique si vous le voulez. Prenez mes États, mais ne me faites pas de mal.

      —Vous faire du mal, dit Pantafilando, faire du mal à un beau-père si tendrement aimé! Que le ciel m'en préserve. Vous n'avez pas d'ami plus СКАЧАТЬ