Conscience. Hector Malot
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Название: Conscience

Автор: Hector Malot

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066089078

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СКАЧАТЬ je lui ressemble. Quand, en quelques jours, il, nous a été enlevé, tu peux t'imaginer comment, tombant de cette vie heureuse dans la détresse et le chagrin, nous avons été anéantis; maman, tu le sais, est une mélancolique et une inquiète, une timide disposée à voir tout en noir; mon frère Florentin est comme elle. Ce fut un désespoir morne: maman répétait du matin au soir que nous n'avions qu'à mourir de faim; mon frère voulait s'engager; je ne m'abandonnai point, et, si je ne pus pas rire et chanter, je me remuai assez cependant pour secouer l'engourdissement de la désespérance: je fis obtenir une place à Florentin, je trouvai du travail pour maman, et j'en trouvai pour moi aussi; le courage revint à tout le monde et peu à peu avec lui le calme de l'esprit.

      Elle le regarda avec un sourire qui disait: «Veux-tu me laisser faire pour toi ce que j'ai fait pour eux?»

      Mais, ces paroles précises, elle ne les prononça point; au contraire, elle chercha tout de suite à effacer leur impression si, comme elle le croyait, il les avait devinées.

      —Va donc chercher de l'eau, dit-elle; pendant ce temps, je vais allumer le feu; maintenant c'est le moment.

      Quand il revint, apportant une carafe pleine, le feu flambait en jetant des pétillements d'or qui illuminaient le cabinet. Assise devant le bureau, Philis écrivait.

      —Que fais-tu donc là? demanda-t-il avec surprise.

      J'écris notre menu, car tu penses bien que nous n'allons pas nous mettre comme ça tout bourgeoisement à table. Le voilà: qu'en penses-tu.

      Elle lut tout haut:

      —Sardines de Nantes.

      —Cuisse de dinde rôtie.

      —Terrine de pâté de foie gras aux truffes du Périgord.

      —Mais c'est un festin, ton dîner!

      —Croyais-tu que j'allais t'offrir une portion de fricandeau au jus?

      Elle continua:

      —Fromage de Brie,

      —Choux à la crème vanillée,

      —Pomme de Normandie,

      —Vin....

      —Ah! voilà. Quel vin? Je ne voudrais pas te tromper. Mettons: «Vin du marchand de vin du coin.» Et maintenant, à table.

      Comme il allait s'asseoir, elle l'arrêta:

      —Tu ne me donnes pas le bras pour me conduire à ma place? Si nous ne faisons pas les choses sérieusement, méthodiquement, nous n'y croirons pas, et les truffes du Périgord se changeront peut-être en petits morceaux noirs de n'importe quoi.

      Quand ils furent assis en face l'un de l'autre, la serviette dépliée, elle continua sa plaisanterie:

      —Allâtes-vous lundi à la représentation de Don Juan, mon cher docteur?

      Et Saniel qui, malgré tout, avait gardé la mine sombre, se mit à rire franchement.

      —Allons donc! s'écria-t-elle en frappant ses mains l'une contre l'autre. Plus de préoccupation, n'est-ce pas, plus de souci! Tes yeux dans les miens, cher Victor, et ne pensons qu'à l'heure présente; à la joie d'être ensemble, à notre amour. Est-ce dit?

      Elle lui tendit la main par-dessus la table.

      Il la prit et la serra:

      —C'est dit.

      Le dîner continua gaiement, Saniel répondant aux sourires et à la gaieté de Philis, qui conduisait l'entretien en ne le laissant pas languir: elle le servait, lui versait à boire, et c'étaient des éclats de voix, des rires comme ce cabinet n'en avait jamais entendu; de temps en temps, elle quittait sa chaise et jetait une poignée de bois au feu qui, à moitié éteint, reprenait ses pétillements.

      Cependant, elle remarqua que peu à peu la physionomie de Saniel, un moment détendue, s'assombrissait et reprenait l'expression de préoccupation et d'amertume qu'elle avait eu tant de peine à chasser; elle voulut faire un nouvel effort.

      —Est-ce que cette charmante dînette ne te donne pas l'idée de recommencer bientôt? demanda-telle,

      —La recommencer! Comment? Où?

      —Mais si j'ai pu venir ce soir sans que maman s'en inquiète, je trouverai bien un moyen, un prétexte, pour recommencer la semaine prochaine.

      Il secoua la tête.

      —Tu ne seras pas libre la semaine prochaine? demanda-t-elle, inquiète.

      —Où serai-je la semaine prochaine, demain, dans quelques jours?

      —Tu me fais peur! Explique toi, je t'en prie. Oh! Victor, aie pitié de moi, ne me laisse pas dans l'angoisse.

      —Tu as raison; je dois tout te dire et ne pas laisser ta tendresse chercher des explications à ma préoccupation, qui ne peuvent que te tourmenter.

      —Si tu as des soucis, ne m'estimes-tu pas assez pour les partager avec moi? Tu sais bien que je suis à toi, tout à toi, aujourd'hui, demain, à jamais!

      Sans lui laisser ignorer les difficultés de sa situation, il n'était jamais cependant entré dans des détails précis, aimant mieux parler de ses espérances que de sa misère présente.

      Le récit qu'il avait déjà fait à Glady et à Caffié, il le recommença, en ajoutant ce qui venait de se passer avec le concierge, le marchand de vin, le charbonnier et Joseph.

      Elle écoutait anéantie.

      —Il a emporté la redingote! murmura-t-elle.

      —Il n'est venu que pour ça.

      —Et demain?

      —Ah! demain... demain!

      —Avec tant de travail comment as-tu pu en arriver là?

      —Comme toi, j'ai cru à la vertu du travail, et voilà où j'en suis! Parce que je sentais en moi une volonté que rien n'affaiblirait, une force que rien ne lasserait, un courage que rien ne rebuterait, je me suis imaginé que j'étais armé pour la lutte, de façon à ne pouvoir pas être vaincu, et je le sais, autant par la faute des circonstances que par la mienne...

      —Et de quoi es-tu coupable, pauvre cher?

      —D'ignorance de la vie, de maladresse, de présomption, d'aveuglement. Si j'avais été moins naïf, est-ce que je me serais laissé prendre aux propositions de Jardine? Est-ce que j'aurais accepté ce mobilier, cet appartement? Il me disait que les engagements qu'il me faisait signer étaient de simples formalités, qu'en réalité je le payerais quand je pourrais, qu'il se contenterait d'un honnête intérêt: cela m'a paru vraisemblable; je n'ai pas cherché au delà et j'ai accepté, heureux, glorieux de m'installer... certain d'avoir les reins assez solides pour porter ce fardeau. C'est une force d'avoir confiance en soi, mais c'est aussi une faiblesse. Parce que tu m'aimes tu ne me connais pas, tu ne me vois pas. En réalité, je suis peu sociable, et je manque absolument СКАЧАТЬ