Название: Les chasseurs de chevelures
Автор: Майн Рид
Издательство: Bookwire
Жанр: Книги для детей: прочее
isbn: 4064066090173
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Les Plum-Buttes etaient directement dans la ligne de notre course. J'avais remarque cela depuis notre point de depart, et je m'etais dit que si je pouvais les atteindre, je serais sauf. Elles etaient a environ trois milles de l'endroit ou nous avions etabli notre bivouac, mais, a la facon dont je franchis cette distance, il me sembla que j'avais fait dix milles au moins. Un petit monticule s'elevait dans la prairie a quelques centaines de yards du groupe des hauteurs. Je m'efforcai de diriger ma monture ecumante vers cette butte en l'excitant a un dernier effort avec mon couteau. Elle me porta complaisamment a une centaine de yards de sa base. C'etait le moment de prendre conge de mon noir compagnon. J'aurais pu facilement le tuer pendant que j'etais sur son dos. La partie la plus vulnerable de son corps monstrueux etait a portee de mon couteau; mais, en verite, je n'aurais pas voulu me rendre coupable de sa mort pour Koh-i-nor. Retirant mes doigts de la toison, je me laissai glisser le long de son dos, et sans prendre plus de temps qu'il n'en fallait pour lui dire bonsoir, je m'elancai de toute la vitesse de mes jambes vers la hauteur; j'y grimpai, et m'asseyant sur un quartier de roche, je tournai mes yeux du cote de la prairie. La lune brillait toujours d'un vif eclat. Mon buffalo avait fait halte non loin de la place ou j'avais pris conge de lui, il s'etait arrete, regardait en arriere et paraissait profondement etonne. Il y avait quelque chose de si comique dans sa mine que je partis d'un eclat de rire; j'etais en pleine securite sur mon poste eleve. Je regardai au sud-ouest; aussi loin que ma vue pouvait s'etendre, la prairie etait noire et en mouvement. Les vagues vivantes venaient roulant vers moi; je pouvais les contempler desormais sans crainte. Ces milliers de prunelles etincelantes, brillant de phosphorescentes lueurs, ne me causaient plus aucun effroi. Le troupeau etait a environ un demi-mille de distance; je crus voir quelques eclairs et entendre le bruit de coups de feu au loin sur le flanc gauche de la sombre masse; ces bruits me donnaient a penser que mes compagnons, sur le sort desquels j'avais concu quelques inquietudes, etaient sains et saufs.
Les buffalos approchaient de la butte sur laquelle je m'etais. etabli, et, apercevant l'obstacle, il se diviserent en deux grands courants, a ma droite et a ma gauche. Je fus frappe, dans ce moment, de voir que mon bison,—mon propre bison,—au lieu d'attendre que ses camarades l'eussent rattrape et de se joindre a ceux de l'avant-garde, se mit a galoper en secouant la tete, comme si une bande de loups eut ete a ses trousses; il se dirigea obliquement de maniere a se mettre en dehors de la bande. Quand il eut atteint un point correspondant au flanc de la troupe, il s'en rapprocha un peu et finit par se confondre dans la masse. Cette etrange tactique me frappa alors d'etonnement, mais j'appris ensuite que c'etait une profonde strategie de la part de cet animal. S'il fut reste ou je l'avais quitte, les buffalos de l'avant-garde auraient pu le prendre pour quelque membre d'une autre tribu, et lui auraient certainement fait un tres-mauvais parti. Je demeurai assis sur mon rocher environ pendant deux heures, attendant tranquillement que le noir torrent se fut ecoule. J'etais comme sur une ile au milieu de cette mer sombre et couverte d'etincelles. Un moment, je m'imaginai que c'etait moi qui etais entraine, et que la butte flottait en avant, tandis que les buffalos restaient immobiles. Le vertige me monta au cerveau, et je ne pus chasser cette etrange illusion qu'en me dressant sur mes pieds. Le torrent roulait toujours gagnant en avant; enfin je vis passer l'arriere-garde a moitie debandee. Je descendis de mon asile, et me mis en devoir de chercher ma route a travers le terrain foule et devenu noir. Ce qui etait auparavant un vert gazon presentait maintenant l'aspect d'une terre fraichement labouree et trepignee par un troupeau de boeufs. Des animaux blancs, nombreux et formant comme un troupeau de moutons, passerent pres de moi; c'etaient des loups poursuivant les trainards de la bande. Je poussai en avant, me dirigeant vers le sud. Enfin, j'entendis des voix, et, a la clarte de la lune, je vis plusieurs cavaliers galopant en cercle a travers la plaine. Je criai "Halloa!" Une voix repondit a la mienne, un des cavaliers vint a moi a toute vitesse; c'est Saint-Vrain.
—Dieu puissant, Haller! cria-t-il en arretant son cheval et se penchant sur sa selle pour mieux me voir; est-ce vous ou est-ce votre spectre? En verite, c'est lui-meme! et vivant!
—Et qui ne s'est jamais mieux porte, m'ecriai-je.
—Mais d'ou tombez-vous? des nuages? du ciel? d'ou enfin?
Et ses questions etaient repetees en echo par tous les autres, qui, a ce moment, me serraient la main comme s'ils ne m'avaient pas vu depuis un an. Gode paraissait entre tous le plus stupefait.
—Mon Dieu! lance en l'air, foule aux pieds d'un million de buffles damnes, et pas mort! Cr-r-re matin!
—Nous nous etions mis a la recherche de votre corps, ou plutot de ce qui pouvait en rester, dit Saint-Vrain. Nous avons fouille la prairie pas a pas a un mille a la ronde, et nous etions presque tentes de croire que les betes feroces vous avaient totalement devore.
—Devorer monsieur! Non! trois millions de buffles ne l'auraient pas devore. Mon Dieu! Ah! gredin de l'Endormi, que le diable t'emporte!
Cette apostrophe s'adressait a Hibbets, qui n'avait pas indique a mes camarades l'endroit ou j'etais couche, et m'avait ainsi expose a un danger si terrible.
—Nous vous avons vu lance en l'air, continua Saint-Vrain, et retomber dans le plus epais de la bande. En consequence, nous vous regardions comme perdu. Mais, au nom de Dieu, comment avez-vous pu vous tirer de la?
Je racontai mon aventure a mes camarades emerveilles.
—Par Dieu! cria Gode, c'est une merveilleuse histoire! Et voila un gaillard qui n'est pas manchot!
A dater de ce moment, je fus considere comme un capitaine parmi les gens de la prairie. Mes compagnons avaient fait de la bonne besogne pendant ce temps, et une douzaine de masses noires, qui gisaient sur la plaine, en rendaient temoignage. Ils avaient retrouve mon rifle et ma couverture; cette derniere, enfoncee dans la terre par le pietinement. Saint-Vrain avait encore quelques gorgees d'eau-de-vie dans sa gourde; apres l'avoir videe et avoir replace les vedettes, nous reprimes nos couches de gazon et passames le reste de la nuit a dormir.
IV
UNE POSITION TERRIBLE.
Peu de jours apres, une autre aventure m'arriva; et je commencai a penser que j'etais predestine a devenir un heros parmi les montagnards.
Un petit detachement dont je faisais partie avait pris les devants. Notre but etait d'arriver a Santa-Fe un jour ou deux avant la caravane, afin de tout arranger avec le gouverneur pour l'entree des wagons dans cette capitale. Nous faisions route pour le Cimmaron. Pendant une centaine de milles environ, nous traversames un desert sterile, depourvu de gibier et presque entierement prive d'eau. Les buffalos avaient completement disparu, et les daims etaient plus que rares. Il fallait nous contenter de la viande sechee que nous avions emportee avec nous des etablissements. Nous etions dans le desert de l'Artemisia. De temps en temps, nous apercevions une legere antilope bondissant au loin devant nous, mais se tenant hors de toute portee. Ces animaux semblaient etre plus familiers que d'ordinaire. Trois jours apres avoir quitte la caravane, comme nous chevauchions pres du Cimmaron, je crus voir une tete cornue derriere un pli de la prairie. Mes compagnons refuserent de me croire, et aucun d'eux ne voulut m'accompagner. Alors, me detournant de la route, je partis seul. Gode ayant pris les devants, l'un de mes camarades se chargea de mon chien que je ne voulais pas emmener, craignant d'effaroucher les antilopes. Mon cheval etais frais et plein d'ardeur; et que je dusse reussir ou non, je savais qu'il me serait facile de rejoindre la troupe a son prochain campement. Je piquai droit vers la place ou j'avais vu disparaitre l'objet, et qui semblait etre a un demi-mille environ de la route; mais il se trouva que la distance etait beaucoup plus grande; c'est une illusion commune dans l'atmosphere transparente de ces regions elevees.
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