La Nation canadienne. Ch. Gailly de Taurines
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Название: La Nation canadienne

Автор: Ch. Gailly de Taurines

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ Quels funestes résultats ne devaient-ils pas en attendre, et quelle devait être leur conduite?

      «L'avenir, dit un historien canadien, M. Turcotte, se montrait à nos compatriotes couvert de sombres nuages. Leurs institutions et leur nationalité semblaient menacées plus que jamais. Pour conjurer l'orage ils vont suivre l'exemple donné par leurs ancêtres dans les moments critiques, et resserreront entre eux les liens de l'union la plus parfaite. Ils contraindront enfin leurs adversaires à leur rendre justice. A mesure que la race anglaise viendra en contact avec les Canadiens, elle reconnaîtra la magnanimité de leur caractère, leur grandeur d'âme, et ses préjugés d'autrefois disparaîtront peu à peu… La politique ancienne fera place à une politique plus juste, plus modérée; les chefs de chaque parti, parmi les Canadiens et les Anglais, se donneront la main et formeront des coalitions puissantes. On verra alors les descendants des deux grandes nations qui président à la civilisation du monde, fraterniser ensemble et réunir leurs efforts pour procurer le bien-être et la prospérité au pays51

      Tel est le résumé de l'histoire de l'Union. Elle nous montrera que les Canadiens surent reconquérir un à un tous les avantages dont on avait voulu les priver.

      Le gouvernement débutait pourtant contre eux d'une façon systématiquement hostile. Aucun nom français ne figurait dans le ministère que choisit le gouverneur, lord Sydenham. Injustice voulue qui ne tarda pas à être réparée; l'année suivante, le successeur de Sydenham, sir Charles Bagot, appelait au ministère un homme qui devait exercer sur la politique de son temps une influence prolongée et salutaire, M. Lafontaine.

      C'était un premier succès, mais les Canadiens ne s'en tinrent pas là, et malgré le mauvais vouloir d'un nouveau gouverneur, lord Metcalfe, qui dirigé systématiquement contre eux toutes les mesures gouvernementales, emploie en faveur de la province anglaise tous les fonds votés pour les travaux publics, donne aux protestants les revenus des biens confisqués aux Jésuites, accorde aux Anglais victimes de l'insurrection de 1837 des indemnités qu'il refuse aux Canadiens, et écarte du ministère M. Lafontaine, – malgré toutes ces vexations et toutes ces injustices, les Canadiens ne cessent d'accroître leur influence, jusqu'au jour, resté béni dans leur mémoire, où leur arrive enfin un gouverneur vraiment impartial et vraiment généreux, l'un des plus illustres qui aient gouverné le Canada: lord Elgin.

      C'est en 1847 que lord Elgin prend le gouvernement. Son premier acte est de faire rentrer au ministère M. Lafontaine; puis, à la session de 1849, prenant la parole en français, il annonce solennellement à l'assemblée le vote, par le Parlement impérial, d'un amendement à la Constitution qui rétablit l'usage de la langue française comme langue officielle. Les Canadiens cessent d'être ces parias qu'on veut «balayer de la surface de la terre». Les partis recherchent au contraire leur appui: ce sont des alliés dont on a besoin et qu'on flatte.

      Ce n'étaient pas là les résultats que leurs ennemis avaient attendus. «Quoi donc, s'écriait en 1849, dans l'Assemblée législative, sir Allan Mac Nab, l'Union a été faite dans le seul but de réduire les Canadiens français sous une domination anglaise, et l'on obtiendrait l'effet contraire! Ceux qu'on voulait écraser dominent; ceux en faveur de qui l'Union a été faite sont les serfs des autres52

      Cette Union, tant demandée, ne valait plus rien, et c'est aux cris de: Pas de papisme! Plus de domination française! que les plus fanatiques réclamaient son rappel.

      La clause elle-même de la représentation égale des provinces, tant sollicitée autrefois, on la répudiait aujourd'hui: les circonstances l'avaient rendue favorable aux Canadiens français. L'inégalité de population s'était en effet renversée. Une émigration considérable d'hommes de langue anglaise s'était tout à coup abattue sur le Haut-Canada. La seule année 1846-1847 y avait amené plus de 100,000 Irlandais fuyant en bloc les horreurs de la famine qui sévissait dans leur pays. Des clans entiers arrivaient aussi d'Écosse, conduits quelquefois par leurs seigneurs eux-mêmes. Ce fut une véritable invasion; la population de langue anglaise s'en trouva tout à coup accrue dans des proportions considérables et dépassa le chiffre de la population française du Bas-Canada.

      De ce jour, cessa l'enthousiasme des Anglais pour la représentation égale des provinces. Une mesure qui leur avait paru excellente quand elle était en leur faveur, leur sembla détestable quand elle tourna à leur détriment, et la devise: «Représentation suivant la population», devint le mot d'ordre de toute agitation politique.

      Les libéraux avancés du Haut-Canada, les Clear-Grits, se montraient les plus acharnés contre les Canadiens. L'un d'eux, M. Mac Dougal, durant la session de 1861, menaçait de «s'adresser au Parlement impérial pour lui dire que les Haut-Canadiens gémissaient sous la domination d'une race étrangère et d'une religion qui n'est pas celle de l'Empire…» Il ajoutait comme un avertissement ou une menace à l'Angleterre: «Si à nos maux et aux difficultés actuelles venait se joindre un refus d'être écoutés du gouvernement impérial, il n'y aurait pas d'autre alternative que de porter les yeux sur Washington53

      Ces Clear-Grits vraiment ne doutaient de rien et prétendaient tout régenter, même la métropole. Un ministre canadien, M. Cartier, répondit devant l'Assemblée d'une façon spirituelle à leurs réclamations: «L'Union, disait-il, avait fonctionné alors que le Bas-Canada avait 250,000 habitants de plus que l'autre province, et le même nombre de représentants. Pour que les choses restassent dans la justice, ne devait-on pas attendre, avant de demander un changement, que le Haut-Canada eût à son tour 250,000 habitants de plus que la province sœur? Or, il ne la dépassait que de 200,000. Il fallait donc encore une augmentation de 50,000 âmes, à moins que l'on ne considérât que 200,000 Clear-Grits valaient au moins 250,000 Canadiens

      Les réclamations des Clear-Grits devenaient tellement pressantes, la résistance des Canadiens était de son côté si vigoureuse, et la force de chacun des partis se balançait d'une façon si égale, qu'il était devenu impossible aux gouverneurs de constituer un ministère. Les crises gouvernementales se suivaient et les ministres succédaient aux ministres. En trois ans (de 1857 à 1860), quatre ministères avaient été renversés et deux élections générales avaient eu lieu sans rétablir l'harmonie.

      Il fallait aviser à sortir de cette embarrassante situation. C'est alors que M. John A. Macdonald, membre de l'un des derniers cabinets renversés, émit l'idée de rendre la liberté à chacune des provinces rivales, de rompre le lien d'union qui enchaînait ainsi, malgré elles, l'une à l'autre ces deux sœurs ennemies, et de le remplacer par le lien plus souple et moins étroit d'une confédération.

      L'idée se généralisait même et l'on proposait d'inviter toutes les colonies anglaises de l'Amérique du Nord à entrer dans la nouvelle combinaison. Un ministère de conciliation parvient en 1863 à se former sur ce projet. Sur l'initiative de M. John A. Macdonald, redevenu ministre, une conférence, composée des représentants des colonies anglaises de l'Amérique du Nord, Nouvelle-Écosse, Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve, réunis à ceux du Canada, s'assemble à Québec, et présidée par un ministre canadien-français, M. Étienne Taché, elle pose les bases d'une entente commune. Dans la session de 1865 enfin, le projet élaboré reçoit à la fois la sanction du Parlement canadien et celle du gouvernement anglais qui, par la bouche du ministre des colonies, M. Caldwell, faisait connaître qu'il était tout prêt à l'appuyer.

      L'opinion publique elle-même lui était partout favorable: le désir commun des Français et des Anglais du Canada était de sortir de cette promiscuité forcée, à laquelle les contraignait la constitution de l'Union, et à laquelle répugnaient également de part et d'autre leur caractère, leurs goûts, leurs idées et leurs croyances.

      Après la session de 1865, quatre ministres canadiens, MM. John A. Macdonald, Cartier, Brown et Galt, СКАЧАТЬ



<p>51</p>

Turcotte, le Canada sous l'Union. Québec, 2 vol. in-18.

<p>52</p>

Turcotte, t. II, p. 98.

<p>53</p>

Turcotte, t. II, p. 412.