Mémoires d'un cambrioleur retiré des affaires. Galopin Arnould
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СКАЧАТЬ mais je suis assez physionomiste pour voir tout de suite à qui j'ai affaire… vous vous êtes tout simplement laissé empaumer par des aigrefins… et…

      Je n'achevai pas. Une idée m'était soudain venue à l'esprit.

      – Et le diamant? m'écriai-je… vous l'avez toujours, le diamant?

      Manzana eut un sourire méprisant, mais porta malgré tout la main à la poche de son gilet.

      – Oh… oooh! s'écria-t-il… c'est trop fort!.. Ils…

      Je m'étais précipité sur lui et le secouais par les épaules en hurlant:

      – Ils vous l'ont pris, n'est-ce pas?.. Nous sommes refaits!.. vous vous êtes peut-être entendu avec eux, misérable!.. Vite! vite! lançons-nous à la poursuite de ces bandits et je vous promets bien que si nous ne les retrouvons pas vous aurez affaire à moi… triple idiot! crétin! rastaquouère!

      Le train qui s'était arrêté pendant cinq minutes se remettait en marche. Nous bondîmes dans le couloir, bousculant les voyageurs, nous frayant un chemin à coups de coude.

      J'avais poussé Manzana devant moi et m'en servais comme d'un bélier pour dégager le passage.

      Enfin, au risque de nous rompre le cou, nous sautâmes sur le quai, au grand effroi des employés.

      Comme nous étions descendus presque à l'entrée du tunnel qui se trouve au bout du débarcadère, nous fûmes obligés de revenir sur nos pas pour gagner la sortie.

      Là, je questionnai à la hâte un employé qui me regarda d'un air niais.

      – Voyons! criai-je exaspéré… deux vieux messieurs… et une jeune femme… ils sont bien descendus ici… vous avez dû les voir?..

      – Sais pas!.. répondit l'homme avec un accent traînant… adressez-vous au bureau de renseignements, moi j'suis là pour recevoir les billets… m'occupe pas d'la tête des gens!..

      Comprenant que je ne tirerais rien de ce butor, j'entraînai Manzana. Il avait maintenant perdu de sa belle assurance et se laissait conduire comme un enfant…

      Devant la gare, il y a une petite place qui va en montant vers la ville.

      Des fiacres archaïques avec des cochers rubiconds et malpropres stationnaient là dans l'attente des voyageurs. Quelques taxis qui avaient déjà été retenus disparaissaient les uns après les autres, mettant sur le sol des étincellements rapides.

      – Parbleu! pensai-je, nos gredins ont pris un taxi… mais nous les retrouverons… dussions-nous bouleverser toute la ville…

      Cependant, je restais là, planté devant la station de voitures, incapable d'une décision quelconque.

      Pour une fois, Manzana eut une bonne idée.

      – Nous n'avons qu'une chose à faire, dit-il, c'est de prendre une voiture et de nous faire conduire dans les principaux hôtels de Rouen… nous finirons bien par savoir où nos gens sont descendus…

      La colère m'étouffait! Je n'étais plus maître de moi et j'avais envie d'étrangler mon compagnon.

      Ah! si jamais je le retrouvais, le diamant, je me promettais bien de le garder pour moi seul et de faire ainsi payer à ce stupide Manzana les tortures que j'endurais à cause de lui…

      Je le poussai dans un fiacre, après avoir jeté ces mots au cocher:

      – Nous cherchons quelqu'un, menez-nous dans les grands hôtels de la ville.

      – Bien, monsieur, répondit l'homme… mais c'est qu'il y a beaucoup d'hôtels ici…

      – Commencez par ceux de premier ordre…

      – Compris.

      Le fiacre partit à petite allure. Il était tiré par un pauvre cheval boiteux qui buttait à chaque pas et s'arrêtait, par instants, pour souffler. Dans la descente de la rue Jeanne-d'Arc, il accéléra un peu son train, mais nous n'allions guère plus vite que si nous avions suivi un convoi funèbre.

      A toute minute, je passais la tête par la portière et stimulais le zèle du cocher par la promesse d'un bon pourboire. Il avait beau cingler sa rosse, nous n'avancions pas.

      Et, dans mon exaspération, je déchargeais ma bile sur Manzana qui, blotti dans un coin de la voiture, me regardait d'un air ahuri…

      Je lui prodiguais toutes les injures que je savais et parfois, pris d'une rage subite, je lui empoignais les bras et lui enfonçais mes doigts dans la chair.

      Il ne disait rien… ce n'était plus un homme, c'était une vraie loque. J'allai même jusqu'à l'accuser d'être de complicité avec les rastas du wagon, mais je compris bientôt que cette accusation était ridicule. Il avait trop de raisons de tenir, lui aussi, au diamant, et il n'eût pas été assez naïf pour le partager avec trois personnes.

      Il s'était laissé rouler, voilà tout!

      Le fiacre s'arrêta enfin devant un hôtel situé au fond d'un jardin minuscule. Je me précipitai au bureau et interrogeai rapidement la caissière.

      Les renseignements qu'elle me fournit furent des plus vagues. Elle avait vu beaucoup de monde dans la soirée, des jeunes gens, des vieillards, quelques femmes, mais aucun de ces voyageurs ne répondait au signalement que j'en donnais.

      Nous visitâmes encore cinq hôtels. Partout ce furent les mêmes réponses ambiguës, jetées d'un ton sec, désagréable, et quand sonnèrent deux heures du matin, nous n'étions pas plus avancés qu'à notre sortie de la gare.

      Comme nous ne pouvions garder le cocher toute la nuit, je le fis stopper sur la place de la Cathédrale et demandai ce que je lui devais.

      – C'est dix-huit francs, répondit-il… et le pourboire en plus.

      Je me fouillai, mais au moment où j'introduisais la main dans la poche de côté de ma jaquette, un petit frisson me courut le long des reins… Mon portefeuille avait disparu!

      Ceux qui avaient dérobé le diamant à Manzana avaient aussi pris mon portefeuille!

      J'eus la présence d'esprit de ne rien laisser paraître de mon trouble en présence du cocher. Tirant de ma poche un papier quelconque, je dis avec aplomb:

      – Avez-vous la monnaie de cinq cents francs?

      Le bonhomme roula des yeux effarés.

      – Non?.. fit-il… Vous croyez comme cela que l'on se promène avec la monnaie de cinq cents francs.

      – Où pourrait-on en faire?

      – Nulle part… tout est fermé maintenant…

      Et, comme je demeurais indécis:

      – Votre ami a peut-être de la monnaie, lui?..

      – Non… répondit Manzana, je n'en ai pas…

      Le cocher s'impatientait:

      – Oh! vous savez, cria-t-il, faut pas m'la faire, j'connais l'coup. Vous m'devez dix-huit СКАЧАТЬ