Les français au pôle Nord. Boussenard Louis,
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Название: Les français au pôle Nord

Автор: Boussenard Louis,

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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СКАЧАТЬ style="font-size:15px;">      L'hélice et le gouvernail ont été disposés de façon à pouvoir être facilement ramenés à bord, au cas où une circonstance fortuite menacerait de mettre hors d'usage ces organes si essentiels.

      En plus d'une petite chaloupe à vapeur bien saisie sur ses dromes, la Gallia possède trois baleinières et un bateau plat, de sept mètres de long sur un mètre quarante de large, pouvant contenir vingt hommes avec quatre tonnes de vivres et que quatre matelots peuvent transporter sur les épaules.

      Le navire avant été construit en vue de plusieurs hivernages consécutifs sous des latitudes où la vie semble de prime abord impossible, les précautions les plus minutieuses ont été prises pour combattre le froid, l'implacable et mortel ennemi.

      Le logement de l'équipage, fractionné en trois chambres, est placé à l'avant et reçoit la chaleur d'un calorifère chauffé à la houille. Entre la paroi extérieure de ces chambres, garnies d'un épais revêtement de feutre, et la paroi intérieure de la coque, se trouve un espace libre rempli de sciure de bois pour empêcher l'invasion du froid et de l'humidité. Et toutes les issues par où pourrait s'introduire le plus léger souffle de la bise glacée, sont hermétiquement closes.

      Les soutes aux vivres, qui regorgent littéralement, sont approvisionnées pour quatre ans. Peu de viande et de poisson salé. Mais en revanche, de véritables montagnes de conserves en boîtes, qui donnent presque l'illusion des vivres frais et permettent de varier l'ordinaire; sans omettre le pemmican, d'une conservation si facile, et particulièrement nutritif sous un petit volume. Les vins et les spiritueux, tous de premier choix, surabondent, comme aussi le thé et le café, ces toniques par excellence.

      Notons en passant le jus de citron en tablettes, les pastilles de chaux et de chlorate de potasse, des graines de cresson et de cochléaria, et autres antiscorbutiques destinés à combattre l'éventualité du scorbut, cet autre ennemi des expéditions polaires.

      Puis le matériel scientifique, très complet, ainsi que la pharmacie; puis la bibliothèque, un piano et divers instruments de musique; puis encore un assortiment d'explosifs les plus énergiques, une puissante batterie d'accumulateurs Planté, plusieurs centaines de mètres de fils métalliques enduits de gutta-percha, des scies à glace, des tarières immenses, des haches énormes, un appareil d'éclairage électrique, une vaste poche en caoutchouc que l'on gonfle en insufflant de l'air, et qui se transforme en radeau, bref, tout un monde.

      Enfin, la sollicitude éclairée du chef n'a pas négligé l'importante question de l'habillement qui, sous la zone hyperboréenne, est affaire de vie ou de mort.

      Le magasin spécial renferme une collection réellement incomparable d'étoffes de laine et de fourrures. Epais gilets de tricots ouatés et doublés de flanelles, chemises, caleçons et pantalons de laine douce, pourvus de boutons en ivoire végétal, et cousus avec du fil en poil de chèvre, parce que la soie ou le lin deviennent cassants sous l'influence du froid. Bottes en toile à voile, bien préférables au cuir qui se racornit et se fendille dans la neige, bachelicks en fourrure couvrant complètement la tête, le cou et les épaules, gants en peau de loutre de mer, montant jusqu'au coude, et assez amples pour recouvrir la main déjà munie d'un gant de laine, casaques, pelisses en peau de mouton, d'élan et de bison, et pour finir, de grands sacs fourrés sur les deux faces, dans lesquels trois hommes peuvent se blottir côte à côte, pour bivouaquer en plein air.

      Bref, le capitaine a su pourvoir à tout et procurer à son équipage un nécessaire à un point surabondant, que des gens inexpérimentés pourraient le regarder comme superflu.

      Un exemple, entre cent, de cette sollicitude qui n'a omis aucun détail: toutes les cuillères sont en corne, de façon à éviter aux matelots de la Gallia, le contact de leur bouche avec le métal!

      … Tous ces préparatifs, malgré leur longueur, leur multiplicité, leur minutie, n'avaient pas duré plus de onze mois, y compris l'établissement des plans, la construction du navire, son équipement, ses essais et jusqu'au recrutement du personnel.

      Cette dernière opération, dont le second Berchou s'était tiré à son honneur, n'était pas une petite affaire, étant donné que le capitaine d'Ambrieux voulait des sujets d'élite, moralement et physiquement irréprochables.

      Tous Français, d'ailleurs, c'était là une condition indispensable, car la Gallia ne devait, à aucun prix, embarquer d'étranger à bord.

      Donc, tous Français, mais pris un peu de tous côtés et offrant les échantillons les plus divers des races composant notre population maritime.

      Témoin la liste suivante, dressée par le maître d'équipage: 1o (A tout seigneur tout honneur) Guénic Trégastel, 46 ans, Breton. – 2o Fritz Hermann, 40 ans, Alsacien, maître mécanicien. – 3o Justin Henriot, 26 ans, Parisien, second maître mécanicien. – 4o Jean Itourria, 27 ans, charpentier, Basque. – 5o Pierre Le Guern, 35 ans, matelot baleinier, Breton. – 6o Michel Elimberri, 35 ans, matelot baleinier, Basque. – 7o Elisée Pontac, 33 ans, matelot baleinier, Gascon. – 8 °Constant Guignard, 26 ans, matelot, Normand. – 9o Joseph Courapied, dit Marche-à-Terre, 29 ans, matelot, Normand. – 10o Julien Montbartier, 30 ans, matelot, Gascon. – 11 °Chéri Bédarrides, 27 ans, matelot, Provençal. – 12o Isidore Castelnau, 31 ans, armurier, Gascon. – 13o Jean Nick, dit Bigorneau, 24 ans, chauffeur, Flamand. – 14o Arthur Farin, dit Plume-au-Vent, 25 ans, chauffeur, Parisien. – 15o Abel Dumas, dit Tartarin, cuisinier, Provençal.

      De cette collection très hétérogène de braves gens, tous francs matelots, avaient surgi, dès le premier jour, des types extraordinaires, comiques volontaires ou inconscients, qui promettaient à leurs camarades quelques bonnes heures de douce gaieté. Entre autres, Jean Nick, dit Bigorneau, un ancien mineur têtu, naïf, n'aimant rien au monde que sa chaufferie, heureux de tripoter le charbon, et avalant par douzaines les bourdes les plus insensées. Il y a encore Arthur Farin, dit Plume-au-Vent, un ancien virtuose de café-concert, cœur d'or et caractère de fer, mais blagueur enragé, mystificateur à froid, et cet épique Abel Dumas, dit Tartarin!.. Mossieu Dumasse!.. qui, comme le héros de Tarascon, court d'abord les aventures par gloriole, croit, en fin de compte, que c'est arrivé, s'emballe et accomplit des prodiges.

      On a pu voir précédemment combien, en dépit de la diversité de leur origine, ces hommes sont unis déjà dans une même pensée d'abnégation, et prêts, comme l'a déclaré Farin, dit Plume-au-Vent, l'orateur de l'équipage, à suivre toujours et quand même leur capitaine.

      Il est temps, pour finir ce rapide exposé, de présenter en deux mots le second capitaine, M. Berchou, un Havrais de 41 ans, le lieutenant, M. Vasseur, un Charentais de 32 ans, et le docteur Gélin, petit homme sec, grisonnant, vif comme un salpêtre, médecin distingué, chasseur intrépide, naturaliste éminent et connaissant à fond les questions polaires étudiées sur nature, soit à Terre-Neuve soit au Groenland, où il a longtemps stationné.

      Cependant, les dernières minutes s'écoulent, et la Gallia, dont la machine est en pression, frémit sur ses câbles d'amarrage. Guénic vient d'arriver du bureau de poste et rapporte une volumineuse correspondance. Il s'enlève à bord d'un seul élan par les tire-veilles et va prendre son poste.

      L'instant solennel est arrivé, car la mer est étale.

      Le capitaine fait hisser au mât de misaine le pavillon du Yacht-Club de France, une flamme tricolore avec une étoile blanche dans le bleu et le pavillon national à la corne, puis remet le commandement au pilote qui doit conduire le bâtiment en pleine mer.

      Les amarres sont larguées, un coup de sifflet strident retentit, la machine pousse un long halètement et la Gallia s'avance avec une prudente lenteur vers l'écluse qui s'ouvre devant elle.

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