Henri IV en Gascogne (1553-1589). Charles de Batz-Trenquelléon
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СКАЧАТЬ le trône des Valois, si leur sang appauvri venait à se tarir. Il faut ajouter que le caractère du fils de Jeanne d'Albret se marquait, en mainte circonstance, par des traits qu'il était impossible de ne pas retenir. Il connaissait son rang et le gardait; au besoin, il tenait tête à Charles IX, quand le jeune roi jouait au tyran; les princes et les grands seigneurs qu'il coudoyait n'auraient pas impunément traité sans conséquence le «petit Vendômet», comme l'appelaient les ennemis des Maisons de Bourbon et d'Albret. Henri pensait, et parfois un mot, un regard, un éclair de fierté ou d'enthousiasme, trahissait sa pensée. Ce fut ainsi que, dans une loterie de cour où chacun fournissait une devise, il choisit celle-ci, écrite en grec: «Vaincre ou mourir». Catherine de Médicis lui en ayant demandé la traduction, il refusa de satisfaire sa curiosité. Etonnée de ce caprice, la reine-mère voulut en avoir le cœur net, et quand on lui eut traduit la devise, elle en parut mécontente, disant que de telles pensées n'étaient bonnes qu'à faire du jeune prince «un enfant opiniâtre». Elle prévoyait peut-être, non l'opiniâtreté, mais la constance dans les desseins, qui fut, en effet, une des grandes qualités de Henri.

      Outre les chagrins de famille qui l'affligèrent en certaines circonstances, pendant qu'il vivait à la cour, il eut à souffrir de l'isolement où le tenait l'absence de sa mère: on lui parlait d'elle, il lui écrivait et recevait ses lettres, mais ne la voyait point; et comme elle avait prescrit à La Gaucherie une extrême prudence touchant les dangereuses amitiés de cour, Henri avait des compagnons d'étude, de chasse et d'armes, mais pas un ami. Un jour, il en souhaita deux, dont l'affection fut une de ses joies jusqu'au massacre de la Saint-Barthélemy: c'étaient Ségur et La Rochefoucauld. Il venait de les acquérir, quand l'ami par excellence, l'honnête précepteur, quitta la vie. En le présentant au prince, Jeanne d'Albret avait dit: « – Mon fils, je vous donne un bon maître, revêtu de toute mon autorité. Il faudra l'aimer comme moi-même. – Je le veux bien, avait répondu l'enfant, s'il veut bien m'aimer aussi.» Ils s'étaient tenu parole, et La Gaucherie fut sincèrement pleuré par le prince de Navarre. Un autre homme de sens, Florent Chrestien, fut attaché, dans la suite, à la personne de Henri, et, une fois encore, Jeanne d'Albret eut la main heureuse. Nous dirons, plus tard, quelques mots de ce complément d'éducation. Il faut reprendre maintenant l'historique des faits à travers lesquels La Gaucherie avait accompli la tâche que nous venons de résumer.

      CHAPITRE IV

      Catherine de Médicis entre les catholiques et les protestants. – Antoine de Bourbon retourne au catholicisme. – Ses querelles avec Jeanne d'Albret, résolûment calviniste. – Henri entre la messe et le prêche. – Réponse de la reine de Navarre à Catherine de Médicis. – Jeanne quitte la cour de France. – Lettre de Henri. – La guerre civile. – Le siège de Rouen. – Mort d'Antoine de Bourbon. – Jeanne d'Albret zélatrice de la Réforme. – Le monitoire de Pie IV contre la reine de Navarre, dont Charles IX prend la défense. – Jeanne ramène son fils en Béarn. – Le complot franco-espagnol contre Jeanne et ses enfants. – Catherine de Médicis ressaisit son «otage». – Voyage de la cour en France. – Charles IX dans le midi. – La prédiction de Nostradamus. – L'entrevue de Bayonne. – Le prince de Navarre devant l'ennemi héréditaire. – La cour à Nérac. – L'assemblée de Moulins. – Retour de Jeanne et de Henri en Béarn.

      Antoine de Bourbon ayant accepté la lieutenance-générale du royaume, en échange de la régence, à laquelle il avait droit, fit venir à la cour sa femme et ses enfants. Le roi de Navarre et le prince de Condé passaient alors pour être les chefs du parti huguenot, et il pouvait sembler étrange que la reine mère, naguère inféodée aux Guises, chefs incontestés du parti catholique, se tournât ostensiblement du côté opposé. Elle révélait de la sorte son système de gouvernement, qui consista toujours, non seulement à diviser pour régner, comme on l'a dit si souvent, mais encore à réagir contre l'influence de ceux sur qui elle s'était appuyée, aussitôt que cette influence lui donnait de l'ombrage. Durant le règne de dix-huit mois de François II, elle avait senti et subi le joug mal dissimulé des Guises, et s'il n'entrait pas dans ses desseins de les frapper de disgrâce, elle jugea, du moins, que son intérêt lui commandait de relever quelque peu la fortune de leurs adversaires naturels, sans toutefois se livrer à ceux-ci. C'est ce qui explique l'espèce de faveur dont les réformés parurent jouir dès les premiers mois de sa régence. Elle avait, du reste, une arrière-pensée, qui se manifesta par la suite: c'était, au cas où les réformés ne s'amenderaient pas, de les priver de leurs chefs par la séduction ou par quelque mesure de rigueur arbitraire. La reine-mère ne manqua jamais de vues ni de finesses; seulement, ses vues étaient courtes, ses finesses trop multipliées, et, quoique travaillant toujours à concilier les partis qui assiégèrent si longtemps le pouvoir, elle ne réussit qu'à les précipiter tour à tour et tous ensemble sur le trône.

      En appelant Jeanne d'Albret et ses enfants à la cour de France, Catherine comptait qu'il lui serait aisé, par quelques flatteries ou, au besoin, par quelques menaces, d'arrêter l'élan de la reine de Navarre vers la Réforme. Antoine, esprit flottant et circonvenu par des galanteries diplomatiques, semblait déjà prêt à combattre ses coreligionnaires de la veille; mais la reine de Navarre n'était pas une âme facile à pétrir: lentement gagnée aux doctrines de la Réforme, rien ne put l'en détacher. Dans son voyage de Pau à Paris, elle se montra ouvertement favorable aux calvinistes, partout où ils invoquèrent sa protection; en passant à Nérac, elle leur donna le couvent des Cordeliers; à Périgueux et en plusieurs autres villes, ils reçurent des marques de sa munificence et de sa sympathie. Quand elle arriva à la cour, elle était huguenote sans réserve et sans esprit de retour.

      Une lutte pénible, qui eut ses jours de scandale et de funestes contre-coups dans l'esprit public, commença bientôt entre la reine de Navarre et son mari, manié par Catherine de Médicis et par les princes lorrains. On fut sur le point de décider Antoine à répudier sa femme pour épouser Marie Stuart, veuve de François II. Ce projet abandonné, on lui fit proposer, par les Espagnols, la cession de la Sardaigne, en échange de ses prétentions sur la Haute-Navarre, proposition qu'il finit par décliner aussi. On cherchait moins à le gagner qu'à le paralyser. On lui dicta tout un système de persécutions contre sa femme, qu'il s'efforça de ramener au catholicisme avec ses enfants, déjà calvinistes, sinon de cœur, du moins d'éducation. Le prince de Navarre, mêlé à ces querelles de famille, dont le sens politique lui échappait, reçut de son père l'ordre d'aller à la messe, et de sa mère, celui de s'en abstenir. A mesure que de nouveaux troubles éclataient dans les provinces au nom de la religion, cette lutte, qui était, au fond, celle de deux factions, arrivait à des éclats dont retentissait l'Europe entière. Assiégée de toutes parts, la reine de Navarre eut à défendre sa nouvelle foi contre Catherine de Médicis en personne. Un jour que la reine-mère s'évertuait à la convertir par des raisons tirées de l'intérêt politique: « – Madame, répondit Jeanne, si j'avais mon fils et tous les royaumes du monde dans la main, je les jetterais au fond de la mer plutôt que d'aller à la messe6!» Enfin, fatiguée des combats de toute sorte qu'on lui livrait, ne pouvant plus douter du parti pris d'Antoine de devenir l'épée des catholiques, après avoir été le champion des protestants, blessée, d'ailleurs, dans sa double dignité d'épouse et de mère, par le spectacle des dérèglements de son mari, la reine de Navarre reprit le chemin de ses Etats, laissant auprès de son fils le précepteur dont nous avons raconté la tâche heureusement accomplie. De cette séparation, qui devait être éternelle pour les deux époux, il existe un touchant souvenir: c'est la lettre suivante, écrite par le prince de Navarre, quelques jours après le départ de sa mère, et adressée à Nicolas de Grémonville, seigneur de Larchant, qui accompagnait la reine dans son voyage: «Larchant, écrivez-moi pour me mettre hors de peine de la reine ma mère; car j'ai si grande peur qu'il lui advienne mal de ce voyage où vous êtes, que le plus grand plaisir que l'on me puisse faire, c'est m'en mander souvent des nouvelles. Dieu vous veuille bien conduire en toute sûreté. Priant Dieu vous conserver. – De Paris, le vingt-deuxième jour de septembre (1562).»

      Le départ de Jeanne ressembla fort à une fuite: СКАЧАТЬ



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Appendice: II.