Название: Histoire amoureuse des Gaules; suivie des Romans historico-satiriques du XVIIe siècle, Tome III
Автор: Bussy Roger de Rabutin
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
isbn:
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Par ces deux gentils boutons
Plus rouges que l'écarlate
Dont une cerise éclate;
Par ce beau sein potelé,
Dont je suis ensorcelé:
Ne permets pas, je te prie,
Qu'ici je perde la vie.
Hélas! déjà je suis mort!
A moins que d'un prompt effort,
Ma chère âme, tu n'appaise
La chaude ardeur de ma braise.
Vénus, prens-moi à merci,
Et toi, Cupidon, aussi:
Car d'une nouvelle rage
Furieusement j'enrage,
Rage qui me vient domter,
Sans la pouvoir supporter.
La priant en cette sorte,
D'une façon demi morte,
Mes soupirs eurent pouvoir
A la fin de l'émouvoir:
Ainsi elle fut vaincue
Et sa colère abattue.
Une charmante pâleur
Lui fit changer de couleur.
Lors elle se prit à dire:
Tu as ce que tu désire,
Guillemette est toute à toi.
Et puis, s'approchant de moi,
Sans contrainte elle me baise,
Et coup sur coup me rebaise.
Enfin, se laissant aller,
Elle me vint accoler,
Et entre mes bras pâmée,
Elle demeura charmée.
Alors sur mon lit doré,
Mignardement préparé,
Dessus la folâtre couche
Nous dressons notre escarmouche.
Je me déchargeai soudain
De l'ardeur dont j'étois plein
Et de cette ardente flamme
Que je sentois dans mon âme.
Tout de mon long je me couche
Entre ses bras bouche à bouche.
Alors tout doucement j'entre
Là-bas, dans ce petit centre
Où Cypris fait son séjour,
Dedans les vergers d'amour,
Vergers qui toujours verdissent,
Vergers qui toujours fleurissent.
Mais pour cela je ne cesse
De la rebaiser sans cesse,
Et nos corps ensemble étraints
Sont sans contrainte contraints
D'une mignardise étrange
Faire un amoureux échange,
Et doucement haletans,
Nos âmes vont se mêlans;
Nos languettes fretillardes
Se font des guerres mignardes,
Et sur le rempart des dents
S'entre-choquent au dedans.
Oh! combien de friandises!
Oh! combien de paillardises
Aperçurent, cette nuit,
Et le flambeau et le lit,
Seuls témoins de nos délices.
Seuls témoins de nos malices,
Lors qu'étroitement pressés,
Nous nous tenions embrassés,
Et qu'une chaleur fondue,
Par nos veines épandue,
Va d'une douce liqueur
Attiédissant sa langueur!
Alors je me pris à dire:
O Dieux! gardez votre empire,
Et jouissez sûrement
De ce haut gouvernement:
Moyennant que je te tienne,
Moyennant que tu sois mienne,
Guillemette, n'aie peur
Que j'envie leur grandeur;
N'aie peur que je désire,
Ni leur ciel, ni leur empire.
Ainsi je vais m'égayant,
Ainsi je vais m'égarant,
Souvent hazardant ma vie
Entre ses deux bras ravie.
Puis en ses yeux affectés
Je noie les miens enchantés.
Tantôt de sa chevelure
Je fais une entortillure;
Puis je baise ses mamelles
Aussi charmantes et belles
Que celles de la Cypris;
Puis, de grand amour épris,
Visant à place plus haute,
Dessus son beau col je saute;
Puis après, d'un coup de dent
Je vais sa gorge mordant,
Et d'une main fretillarde
Par l'obscurité j'hasarde
De tâter les piliers nus
Dont ses flancs, sont soutenus;
Flancs où, sous garde fidelle,
Amour fait sa sentinelle,
Portier de ce lieu sacré
A sa mère consacré.
Enfin de mille manières,
Dans ces amoureux mystères,
Folâtres, nous nous baisons,
Et jouant contrefaisons
Les amours des colombelles,
Et celles des tourterelles;
Et à l'envi furieux,
Et à l'envi amoureux,
Par nos bouches haletantes
Nos deux âmes languissantes
D'un doux entrelacement
Se rassemblant doucement,
Et de leurs corps homicides
Tour à tour les laissent vuides.
Ainsi nous nous combattions,
Comme vaillans champions,
Non pas sans sueur et peine,
Ne même sans perdre haleine,
Quand enfin, les nerfs lassés,
Et les membres harassés,
Lorsque, l'humeur découlante,
Et ma vigueur défaillante,
Sans cœur, sans force et vertu,
Enfin je fus abattu.
A l'instant mon chef j'incline
Sur sa douillette poitrine,
Où un sommeil gracieux
Me ferma bien-tôt les yeux.
Lors, voyant que je repose
D'une un peu trop longue pause,
Elle me sait reveiller
Sans me laisser sommeiller.
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