Arnoldiana, ou Sophie Arnould et ses contemporaines;. Arnould Sophie
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Название: Arnoldiana, ou Sophie Arnould et ses contemporaines;

Автор: Arnould Sophie

Издательство: Public Domain

Жанр: Зарубежная классика

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isbn: http://www.gutenberg.org/ebooks/38974

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СКАЧАТЬ avoir que quelques complaisances pour les gentilshommes de la chambre, et sans aucun talent l'administration vous engageait, et cet engagement vous mettait à l'abri des lois. Louis XVI réforma cet abus au commencement de son règne.

      Avant l'arrêt de 1776 on entrait librement au foyer des actrices. C'était là qu'elles recevaient les hommages des spectateurs qui s'y rendaient en foule, et chacun pouvait en liberté approcher ces divinités et jouir du coup d'œil séduisant que présentait leur toilette.

      C'était là qu'on rencontrait ces aimables roués, êtres sans soucis, se jouant de toutes les femmes en paraissant les adorer; charmans dans un tête à tête, sémillans dans un repas, habiles à raconter l'aventure de la veille, savans dans l'art de bien placer le mot du jour, ils prenaient toutes les nuances du caméléon, et les meilleures sociétés auraient cru manquer d'usage en ne les accueillant pas.

      C'était encore là qu'on voyait papillonner ces êtres amphibies, qui n'étaient ni prêtres ni laïcs, connaissant tout, excepté l'étude et la religion, et qui sous le nom d'abbés circulaient dans le monde comme une fausse monnaie.

      C'était là enfin qu'allaient et venaient assidûment des milliers de jeunes gens et de vieillards qui seraient demeurés absolument muets s'ils n'avaient eu pour entretien les actrices et les spectacles, les ruelles et les coulisses.

      On met en usage dans ce véritable palais d'Armide toutes les ruses que la volupté enseigne pour séduire. Les femmes surtout, convaincues qu'on en impose avec un beau nom, ont grand soin, du moment qu'elles sont initiées, de déposer celui qu'elles ont reçu en naissant pour en prendre de plus conformes à leur nouvelle situation. Cette manie des noms supposés a produit des scènes plaisantes; on a vu plus d'une fois se présenter à la porte de l'Opéra une pauvre journalière couverte de haillons pour réclamer sa fille ou sa nièce, que le jour précédent elle a reconnue dans un brillant équipage, et dont elle a su la profession par un laquais.

      Un jeune homme, allant chez une danseuse de l'Opéra, se plaignit de l'impertinence de son portier, et lui dit: – Vous devriez bien chasser ce drôle-là de chez vous. – J'y ai bien pensé, répondit-elle; mais, que voulez-vous, c'est mon père. —

      Dans les beaux jours de l'Opéra une jolie actrice se montrait au foyer toute resplendissante de diamans, elle était respectée de ses compagnes en raison de sa robe éclatante, de sa voiture légère, de ses chevaux superbes; il s'établissait même un intervalle entr'elles selon le degré d'opulence; cette nymphe, plus ou moins illustrée par le rang de son amant, recevait avec hauteur celle qui débutait; elle traitait avec les airs d'une femme de qualité le bijoutier et la marchande de modes; le magistrat déridait son front en sa présence; le courtisan lui souriait; le militaire n'osait la brusquer; sa toilette était tous les matins surchargée de nouveaux présens; le Pactole semblait rouler éternellement chez elle. Mais la mode qui l'éleva vient à changer; une petite rivale, qu'elle n'apercevait pas, qu'elle dédaignait, se met insolemment sur les rangs, brille, l'éclipse, et fait déserter son salon. La courtisane superbe, quoique ayant encore de la beauté, se trouve l'année suivante seule avec des dettes immenses; tous les amans se sont enfuis, et quand ses affaires sont liquidées à peine a-t-elle de quoi payer sa chaussure et son rouge.

      De toutes les femmes entretenues dix font fortune au bout de quelques années. Que devient le reste? C'est la grenouille qui a profité d'un rayon de soleil pour se reposer sur une belle prairie, et qui se replonge dans son marais.

      Voyez Cartou, qui s'est retirée doyenne des chœurs de l'Opéra; elle comptait l'illustre Maurice de Saxe parmi ses conquêtes; elle le suivit au fameux camp de Mulhberg, où elle eut la gloire de souper avec les deux rois Auguste II de Pologne et Frédéric-Guillaume de Prusse, accompagnés des princes leurs fils et leurs successeurs au trône. Cette aimable chanteuse a brillé par ses diamans et ses équipages; elle a donné des fêtes aux beaux-esprits; elle a dit des bons mots qu'on cite encore, et sur la fin de sa carrière un vieux laquais formait toute sa compagnie.

      Voyez Gaussin; elle a jeté pendant longtemps le mouchoir à qui elle a voulu: princes, officiers de distinction, graves présidens, sémillans conseillers, auteurs sublimes, fermiers généraux, tout ce monde, aux poëtes près, a contribué à l'enrichir; et cette actrice charmante, qui eût pu comme Rhodope élever une pyramide en se faisant apporter une pierre par chacun de ses amans; cette fille si tendre, vieillie et ruinée, finit par épouser un danseur, qui la rouait de coups, et lui fit faire une rude pénitence de tous les péchés qu'elle avait commis.

      Voyez Fel, qui a fait la gloire de l'Académie royale de Musique et du concert spirituel, dont les accens enchanteurs l'ont disputé pendant longtemps à la mélodie du rossignol; elle crut autrefois honorer un souverain en le recevant dans ses bras; elle rendit fou le tendre Cahusac, qui, n'ayant pu l'épouser, alla mourir de chagrin à Charenton. Cette nymphe mangea les revenus de plusieurs provinces, et fut réduite sur la fin de sa carrière à quêter un regard ou à déshonorer son goût.

      Voyez Defresne, devenue par spéculation Mme la marquise de Fleury; cette beauté, après avoir été l'entretien de tous les cercles, avoir vu à ses pieds tout ce que la cour et la ville offraient de plus grand; après avoir dissipé la rançon d'un roi, tomba par son inconduite dans une indigence extrême et mourut sans secours, quoiqu'elle laissât deux fils, dont l'un était capitaine de dragons et l'autre d'infanterie, décorés du nom et des armes des Fleury.

      Si l'on passait en revue les Laïs anciennes et modernes qui tour à tour ont brillé sur la scène du monde, on formerait un tableau curieux des caprices de la fortune, qui souvent va chercher sous les livrées de la misère la femme qui doit un jour voir à ses pieds les plus grands personnages de l'Etat.

      Les courtisanes semblent avoir été plus en honneur chez les Romains que parmi nous, et chez les Grecs que parmi les Romains. Les courtisanes grecques étaient d'autant plus attrayantes qu'aux charmes de la figure, aux attraits d'une coquetterie raffinée, à une parure séduisante, à une élégance recherchée, elles joignaient tous les agrémens de l'esprit, la vivacité, la finesse, la subtilité des réparties; elles assaisonnaient les plaisirs de leur société par tout ce que le sel attique avait de plus piquant. Plusieurs d'entr'elles cultivaient avec succès les belles-lettres et les mathématiques; les plus célèbres sont Aspasie, qui donna des leçons de politique et d'éloquence à Socrate et à Périclès; Laïs, qui tourna la tête à tant de philosophes, et qui compta Aristippe parmi ses amans; Leontium, qui écrivit sur la philosophie, et qui fut tendrement aimée d'Epicure et de ses disciples; Phryné, amante de Praxitèle, et qui fit rebâtir à ses dépens la ville de Thèbes, détruite par Alexandre; Thaïs, qui suivit ce héros dans ses conquêtes, et qui après la mort de son illustre amant se fit tellement aimer de Ptolémée, roi d'Egypte, que ce prince l'épousa; Thargélie, maîtresse de Xerxès, qu'elle aida à faire la conquête de la Grèce, et qui, après avoir longtemps exercé ses talens et ses charmes, termina ses courses en Thessalie, dont elle épousa le souverain.

      On peut mettre sur la même ligne l'inimitable Ninon de l'Enclos, l'objet de l'admiration des hommes et de la jalousie des femmes, dont la maison était le rendez-vous de ce que Paris possédait de plus illustre, qui, dans le cours d'une vie de quatre-vingt-dix ans, a vu son pays se renouveler et changer plus d'une fois de goût, sans qu'elle ait jamais cessé d'être de celui de tout le monde, sans paraître jamais différer d'elle-même, et sans ressembler à personne.

      Ces aimables enchanteresses, dont la destinée est de faire ou des mécontens ou des ingrats, sont depuis longtemps l'objet de la censure, et nos théâtres, destinés à être l'école des mœurs, sont devenus celle de la galanterie. Mais n'est-ce que sur la scène que les chances heureuses du vice dégoûtent un sexe fragile des hasards de la vertu? Combien dans nos cercles les plus austères de Lucrèces, qui, plus adroites que sages, sous le voile de la pudeur, qui n'est pas toujours celui de l'innocence, ne pourraient pas soutenir devant le crédule Hymen l'épreuve de Tutia, qui, se voyant СКАЧАТЬ