Résurrection (Roman). León Tolstoi
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Читать онлайн книгу Résurrection (Roman) - León Tolstoi страница 7

Название: Résurrection (Roman)

Автор: León Tolstoi

Издательство: Bookwire

Жанр: Философия

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isbn: 4064066373573

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СКАЧАТЬ trouvait pas d’autre mot pour désigner cette qualité, qu’il prisait extrêmement. Le second argument était que la jeune princesse l’appréciait mieux que personne, le comprenait mieux; et dans ce fait qu’elle le comprenait, c’est-à-dire qu’elle reconnaissait ses hautes qualités, Nekhludov trouvait la preuve de son intelligence et de la sûreté de son jugement. Mais il y avait aussi des arguments très sérieux contre le mariage avec Missy en particulier: le premier était que, suivant toute vraisemblance, Nekhludov aurait pu trouver une jeune fille encore plus «distinguée» que Missy; en second lieu, que celle-ci avait déjà vingt-sept ans, que probablement elle avait aimé d’autres hommes: et cette pensée était un tourment pour Nekhludov. Sa vanité ne pouvait admettre que, même dans le passé, la jeune fille eût aimé quelqu’un qui n’était pas lui. Sans doute, il ne pouvait exiger qu’elle eût su d’avance qu’elle le rencontrerait un jour dans la vie; mais la seule idée qu’elle avait pu aimer un autre homme, avant lui, était pour lui une humiliation. Ainsi les arguments pour et contre se trouvaient être en nombre égal; et Nekhludov, riant de lui-même, se comparaît volontiers à l’âne de Buridan. Mais il n’en continuait pas moins à faire comme l’âne, ne sachant vers laquelle des deux bottes de foin il devait se tourner.

      «Au surplus, aussi longtemps que je n’aurai pas reçu de réponse de Marie Vassilievna, et que cette affaire ne sera pas terminée, il m’est impossible de prendre aucun engagement», songea-t-il.

      Et ce sentiment de la nécessité d’ajourner sa décision lui fit plaisir. «Et puis je penserai à tout cela plus tard, — se dit-il encore, tandis que sa voiture roulait sans bruit sur l’asphalte de la cour du Palais de Justice. — Il s’agit maintenant pour moi de remplir un devoir social, avec le soin que j’apporte à tout ce que je fais. Sans compter que ces séances sont souvent très intéressantes.»

      CHAPITRE IV

      I

      Quand Nekhludov entra au Palais de Justice, les corridors étaient déjà fort animés. Des gardiens couraient, portant des papiers; d’autres marchaient d’un pas grave et lent, les mains derrière le dos. Les huissiers, les avocats, les avoués se promenaient de long en large; les demandeurs et les prévenus libres s’effaçaient humblement contre les murs, ou restaient assis sur les bancs, attendant.

      — Le tribunal du district? — demanda Nekhludov à l’un des gardiens.

      — Quel tribunal? Criminel, ou civil?

      — Je suis juré.

      — Alors c’est la cour d’assises! Il fallait le dire tout de suite! Vous prendrez à droite, puis à gauche, la deuxième porte!

      Nekhludov s’avança dans les corridors.

      Devant la porte que le gardien lui avait désignée, deux hommes se tenaient debout, en conversation. L’un était un gros marchand qui, pour se préparer à remplir sa tâche, avait sans doute bu et mangé copieusement, car il paraissait être dans une disposition d’esprit des plus gaies; l’autre était un commis, d’origine juive. Les deux hommes s’entretenaient du cours des laines, lorsque Nekhludov, s’approchant d’eux, leur demanda si c’était bien là que se réunissaient les jurés.

      — C’est ici, Monsieur, c’est parfaitement ici. Un juré aussi, sans doute, un de nos confrères? — ajouta le brave marchand en souriant et en clignant de l’œil.

      — Eh bien! Nous allons travailler ensemble! — poursuivit-il après la réponse affirmative de Nekhludov. — Baklachov, de la deuxième guilde! — ajouta-t-il en tendant au prince sa large main. — Et à qui ai-je l’honneur de parler?

      Nekhludov se nomma, et entra dans la salle de jury.

      — C’est celui dont le père à été attaché à la personne de l’empereur! — murmura le juif.

      — Et il a de la fortune? — demanda le marchand.

      — Un richard!

      Dans la petite salle du jury, une dizaine d’hommes de toute condition étaient réunis. Tous venaient d’arriver; les uns étaient assis, les autres marchaient de long en large. On s’examinait et on faisait connaissance. Il y avait là un colonel retraité, en uniforme; d’autres jurés étaient en redingote, en jaquette; un seul avait mis son habit. Plusieurs d’entre eux avaient dû renoncer à s’occuper de leurs affaires pour remplir les fonctions de jurés, et ils ne se faisaient pas faute de s’en plaindre, mais avec tout cela on lisait sur leurs visages une satisfaction mêlée d’orgueil, et la conscience d’accomplir un grand devoir social.

      Le premier examen achevé, on s’était simplement groupé, sans se lier plus à fond. On s’entretenait du temps qu’il faisait, de la venue précoce du printemps, des affaires inscrites au rôle. Un grand nombre de jurés s’empressaient de faire connaissance avec le prince Nekhludov, jugeant évidemment que c’était là, pour eux, un honneur exceptionnel. Et Nekhludov trouvait cela naturel et légitime, comme il faisait toujours en pareille circonstance. Si on lui avait demandé pourquoi il se considérait comme supérieur à la majorité des hommes, il aurait été incapable de répondre, car sa vie, surtout pendant les derniers temps, n’avait guère rien eu de bien méritoire. Il savait, en vérité, parler couramment l’anglais, le français et l’allemand; son linge, ses vêtements, ses cravates, ses boutons de manchettes venaient toujours des premiers magasins, et étaient toujours les plus chers qu’il y eût; mais lui-même ne prétendait pas que ce fût là un titre suffisant pour faire de lui un être supérieur. Et cependant il avait une conscience très profonde de sa supériorité; et il considérait comme lui étant dus tous les hommages qu’il recevait, et l’absence de ces hommages le blessait comme un affront.

      Un affront de ce genre l’attendait précisément dans la salle du jury. Parmi les jurés se trouvait un homme qu’il connaissait, un certain Pierre Gérassimovitch, — jamais Nekhludov n’avait su son nom de famille, — qui avait été précepteur des enfants de sa sœur. Ce Pierre Gérassimovitch avait, depuis, terminé ses études et était maintenant professeur au gymnase. Nekhludov l’avait toujours trouvé insupportable pour sa familiarité, son rire suffisant, et ses mauvaises manières.

      — Ah! Le sort vous a désigné aussi? — dit-il à Nekhludov en s’avançant vers lui avec un gros rire. — Et vous ne vous êtes pas fait dispenser?

      — Jamais je n’ai en l’idée de me faire dispenser, — répondit sèchement Nekhludov.

      — Hé bien! Voilà un beau trait de courage civique! Vous allez voir comme vous souffrirez de la faim! Et pas moyen de dormir, ni de boire! — poursuivit le professeur en riant encore plus haut.

      «Ce fils de pope va bientôt se mettre à me tutoyer!» songea Nekhludov; et, donnant à sa figure une expression aussi morne que s’il venait d’apprendre la mort d’un de ses parents, il tourna le dos à Pierre Gérassimovitch pour s’approcher d’un groupe formé autour d’un personnage de haute taille, rasé, éminemment représentatif, et qui paraissait raconter quelque chose. Ce personnage parlait d’un procès qu’on était en train de juger au tribunal civil; il en parlait en homme qui connaissait à fond toute l’affaire, nommant par leurs prénoms les juges et les avocats. Il ne tarissait pas sur le tour merveilleux qu’avait su donner à l’affaire un fameux avocat de Pétersbourg, et grâce auquel une vieille dame, tout en ayant absolument raison, était assurée désormais de perdre sa cause.

      — Un homme de СКАЧАТЬ