La tombe de fer. Hendrik Conscience
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Название: La tombe de fer

Автор: Hendrik Conscience

Издательство: Bookwire

Жанр: Языкознание

Серия:

isbn: 4064066087104

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СКАЧАТЬ alla au fond de la chambre, ouvrit une grande porta et dit:

      —Jusqu'à présent vous n'avez vu que les études de l'élève: souvenirs qui font ma vie, pourtant: Entrez, vous pourrez juger aussi l'artiste. Ce serait une véritable joie pour lui si ses oeuvres pouvaient lui assurer votre approbation ou du moins votre sympathie.

      La salle où il me fit entrer était éclairée par le haut un grand nombre de statues de marbre et d'albâtre dont la vue me frappa d'admiration au premier coup d'oeil.

      Toutes ces oeuvres étaient évidemment l'expression d'une même pensée reproduite sous des formes diverses. Il n'y en avait aucune qui ne parlât de la mort et de la résurrection à une vie meilleure. C'était un ange aux ailes déployées qui portait vers sa céleste patrie une jeune fille endormie;—c'était le génie de l'immortalité ouvrant une tombe et montrant à l'âme réveillée le chemin de la lumière;—c'était cette même jeune fille se dressant à moitié hors d'une tombe, et étendant les mains avec un sourire de désir, comme si elle appelait quelqu'un;—c'était un jeune garçon agenouillé sur une pierre tumulaire, et tenant embrassée une ancre symbolique;—c'était l'oiseau Phénix, s'élevant avec des forces nouvelles du bûcher qui a consumé sa dépouille vieillie;—c'étaient enfin beaucoup de figures représentant sous une forme saisissante l'image de la vie future après la mort.

      Toutes ces compositions respiraient la sincérité profonde du sentiment de leur auteur, et semblaient vivre, non point par la perfection de leur forme corporelle, mais par quelque chose de plus élevé, par l'empreinte de l'âme que l'artiste avait imprimée dans toutes les parties de son oeuvre, en y versant un reflet de sa propre âme. Les formes des statues étaient à la vérité grêles et maigres, mais il y avait dans l'ensemble de ces créations une expression de pensée si parfaite, des proportions si harmonieuses, tant de naturel et néanmoins tant de poésie, qu'en les regardant je me sentis comme transporté dans un monde de pensées mystiques et presque surhumaines.

      —Que tout cela est beau! m'écriai-je enthousiasmé. Monsieur, vous ne devez pas tenir plus longtemps cachés ces chefs-d'oeuvre sublimes. Enrichissez d'un nom illustre le livre d'or de votre patrie, ajoutez un brillant fleuron à sa couronne artistique!

      Il sourit à mon exclamation; l'impression favorable que son talent avait produite sur moi parut lui faire plaisir; mais une sorte de raillerie ironique brillait dans son regard, comme pour me taxer d'exagération.

      —Je dis la vérité, croyez-moi, repris-je. Exposez vos ouvrages, et un cri d'admiration s'élèvera de la foule des artistes. S'ils ont été égarés autrefois par l'admiration exclusive des formes extérieures, il y a aujourd'hui une grande tendance vers des idées moins plastiques; l'art se tourne vers l'expression des pensées, des sentiments et des plus nobles aspirations de l'homme. Non, non, ne privez pas l'école flamande de si parfaits modèles.

      Le vieillard avait courbé la tête et murmurait en se parlant à lui-même:

      —Livrer en pâture à la foule mes souvenirs, tous les battements de mon coeur? Permettre à la malveillance de soulever le voile de ma vie, et appeler la raillerie sur tout ce qui est sacré pour moi?...

      En ce moment, la vieille servante ouvrit la porte et annonça que le dîner était servi.

      —Venez, monsieur, me dit le sculpteur, visiblement satisfait de cette interruption. La table de l'ermite ne vous offrira pas de mets recherchés; mais il y en aura assez pour restaurer les forces d'un homme qui, comme vous, aime la vie de campagne.

      Nous nous mîmes à table, nous mangeâmes assez rapidement deux ou trois bons plats, auxquels je fis honneur, d'autant plus que la présence de la servante m'empêchait de parler de ce qui occupait mon esprit.

      Après le repas, le vieillard me conduisit dans une serre assez spacieuse. Je sus ainsi d'où venaient les fleurs exotiques et rares qui croissaient sur la tombe de fer.

      Après avoir traversé cette, serre, nous entrâmes dans un jardin délicieux, émaillé de mille fleurs charmantes; ce qui me fit dire en riant que bien des gens voudraient être ermites dans un pareil ermitage.

      Mais le vieillard, sans répondre à ma, plaisanterie, me conduisit sous un berceau de clématite et de chèvre feuille, s'assit sur un banc, me montra une place à côté de lui et dit:

      —Vous logerez chez moi.... Pas d'excuses; mon histoire est plus longue que vous ne croyez. Si vous voulez la connaître tout entière, il faut vous soumettre à cette nécessité. Ce n'est pas une gêne pour moi; la servante a déjà reçu l'ordre de préparer votre chambre. Vous n'en dormirez pas plus mal qu'à l'Aigle, où vous aviez l'intention de passer la nuit. C'est donc convenu; vous serez l'hôte de l'ermite. Armez-vous de patience, et pardonnez à un vieillard, qui ne vit que par ses souvenirs, s'il vous raconte parfois des particularités ou des sensations puériles qui n'ont d'importance que pour lui seul. En un mot, souffrez que mon récit me fasse revivre encore une fois dans le passé. Après cette prière, je commence mon histoire sans autre préambule.

       Table des matières

      À un quart de lieue d'ici, près d'un clair ruisseau, s'élève une toute petite ferme nommée la Maison d'eau et entourée de bois et de prairies.

      Elle était habitée, il y a cinquante ans, par maître Wolvenaer, un sabotier connu des boutiquiers de la ville pour les jolies chaussures de bois qu'il savait tailler. Son état, lui procurait, à la sueur de son front, assez de bénéfices pour subvenir aux besoins d'une nombreuse famille; car il n'avait pas moins de six enfants, encore tous en bas âge.

      Comme il tenait en fermage un petit lopin de terre, et que sa femme vaquait le plus souvent aux travaux des champs, il y avait dans la maison, du sabotier une sorte de bien-être ou du moins d'aisance.

      Assurément le laborieux artisan eût été tout à fait heureux si une cause incessante de tristesse n'avait assombri son horizon. Parmi ses six enfants, il y en avait un,—un garçon de onze ans,—qui se faisait remarquer par une beauté extraordinaire. Il avait des cheveux noirs bouclés, des yeux bruns étincelants, et des traits d'une remarquable pureté.... Mais le pauvre enfant ne savait point parler. Dans les premiers mois de sa naissance, il était tombé de son berceau la tête en avant. Il avait eu des convulsions affreuses, et lutté longtemps contre la mort. On crut que dans cet accident la langue avait été frappée de paralysie; car, quoiqu'il ne pût articuler aucun son distinct, il entendait cependant fort bien.

      Le sabotier était mon père; l'enfant muet n'était autre que moi qui vous parle en ce moment.

      Mon père m'aimait et me plaignait de tout son coeur. Souvent, quand je me tenais en silence à côté de son établi, il interrompait tout à coup son travail et fixait sur moi un regard profond plein de tristesse et de pitié. Alors je l'embrassais avec reconnaissance, et je tâchais de le consoler par gestes de mon malheureux sort. Mais, au lieu d'adoucir son chagrin, le plus souvent mes caresses ne réussissaient qu'à le faire pleurer. En effet, je faisais des efforts surhumains pour parler; mais il n'entendait sortir de ma gorge que des cris rauques et perçants, des sons inarticulés et sauvages qui lui déchiraient l'âme. D'ailleurs, comme tous les muets, j'étais d'une sensibilité extrême, et mes moindres gestes, mes moindres mouvements pour exprimer ce que je pensais ou ce que j'éprouvais, étaient violents et exagérés comme ceux d'un insensé.

      Mes parents СКАЧАТЬ