Название: Fables de La Fontaine
Автор: Jean de la Fontaine
Издательство: Bookwire
Жанр: Языкознание
isbn: 4064066074258
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Un envoyé du grand-seigneur
Préféroit, dit l’histoire, un jour chez l’empereur,
Les forces de son maître à celles de l’empire.
Un Allemand se mit à dire:
Notre prince a des dépendants
Qui, de leur chef, sont si puissants
Que chacun d’eux pourroit soudoyer une armée.
Le chiaoux, homme de sens,
Lui dit: Je sais par renommée
Ce que chaque électeur peut de monde fournir;
Et cela me fait souvenir
D’une aventure étrange, et qui pourtant est vraie.
J’étois dans un lieu sûr, lorsque je vis passer
Les cent têtes d’une hydre au travers d’une haie.
Mon sang commence à se glacer;
Et je crois qu’à moins on s’effraie.
Je n’en eus toutefois que la peur sans le mal:
Jamais le corps de l’animal
Ne put venir vers moi, ni trouver d’ouverture.
Je rêvois à cette aventure
Quand un autre dragon, qui n’avoit qu’un seul chef,
Et bien plus d’une queue, à passer se présente.
Me voilà saisi derechef
D’étonnement et d’épouvante.
Ce chef passe, et le corps, et chaque queue aussi:
Rien ne les empêcha; l’un fit chemin à l’autre.
Je soutiens qu’il en est ainsi
De votre empereur et du nôtre.
XIII
LES VOLEURS ET L’ANE.
Pour un âne enlevé deux voleurs se battoient:
L’un vouloit le garder, l’autre le vouloit vendre.
Tandis que coups de poings trottoient,
Et que nos champions songeoient à se défendre,
Arrive un troisième larron
Qui saisit maître Aliboron[6]. L’âne, c’est quelquefois une pauvre province: Les voleurs sont tel et tel prince, Comme le Transylvain, le Turc et le Hongrois. Au lieu de deux, j’en ai rencontré trois: Il est assez de cette marchandise. De nul d’eux n’est souvent la province conquise: Un quart[7] voleur survient, qui les accorde net En se saisissant du baudet.
XIV
SIMONIDE PRÉSERVÉ PAR LES DIEUX.
On ne peut trop louer trois sortes de personnes:
Les dieux, sa maîtresse et son roi.
Malherbe le disoit: j’y souscris, quant à moi;
Ce sont maximes toujours bonnes.
La louange chatouille et gagne les esprits:
Les faveurs d’une belle en sont souvent le prix.
Voyons comment les dieux l’ont quelquefois payée.
Simonide avoit entrepris
L’éloge d’un athlète; et, la chose essayée,
Il trouva son sujet plein de récits tout nus.
Les parents de l’athlète étoient gens inconnus,
Son père, un bon bourgeois; lui, sans autre mérite:
Matière infertile et petite.
Le poëte d’abord parla de son héros.
Après en avoir dit ce qu’il en pouvoit dire,
Il se jette à côté, se met sur le propos
De Castor et Pollux; ne manque pas d’écrire
Que leur exemple étoit aux lutteurs glorieux;
Élève leurs combats, spécifiant les lieux
Où ces frères s’étoient signalés davantage:
Enfin l’éloge de ces dieux
Faisoit les deux tiers de l’ouvrage.
L’athlète avoit promis d’en payer un talent:
Mais, quand il le vit, le galant
N’en donna que le tiers, et dit fort franchement
Que Castor et Pollux acquittassent le reste.
Faites-vous contenter par ce couple céleste.
Je vous veux traiter cependant:
Venez souper chez moi; nous ferons bonne vie.
Les conviés sont gens choisis,
Mes parents, mes meilleurs amis;
Soyez donc de la compagnie.
Simonide promit. Peut-être qu’il eut peur
De perdre, outre son dû, СКАЧАТЬ