Les etranges noces de Rouletabille. Гастон Леру
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Читать онлайн книгу Les etranges noces de Rouletabille - Гастон Леру страница 6

СКАЧАТЬ dont, certes! il se serait très bien passé.

      Vladimir commençait:

      –Rappelez-vous, monsieur, ce jour où, à Sofia, en sortant de l'hôtel Vilitchkov, vous nous trouvâtes, La Candeur et moi, enveloppés, à cause du froid, en des vêtements de fortune. La Candeur avait une couverture et moi, monsieur, j'avais une fourrure, une fourrure magnifique, une fourrure que vous avez admirée, monsieur…

      –Oui, la fourrure d'une amie à vous, m'avez-vous dit, la fourrure d'une princesse… je me rappelle très bien, fit Rouletabille, qui fronçait terriblement les sourcils… Après?

      Vladimir s'épouvanta tout à fait.

      –Oh! monsieur, s'écria-t-il, vous n'allez pas croire que je l'ai vendue!…

      –Ah! tu ne l'as pas vendue?…

      –Monsieur, pour qui me prenez-vous?

      –Qu'en as-tu donc fait?

      –Remarquez, reprit Vladimir, en clignotant de ses lourdes paupières et en roucoulant de sa plus douce voix, car il se remettait peu à peu et, ayant fait un rapide examen de conscience, il en était sans doute arrivé à se demander pourquoi il avait essayé de dissimuler un acte qui ne lui apparaissait point si répréhensible… Remarquez, monsieur, que j'aurais pu la vendre! Ne vous récriez pas! Vous connaissez la princesse?

      –Oui… heu!… je l'ai entr'aperçue…

      –Oh! vous lui avez parlé…

      –C'est elle qui m'a parlé… je me rappelle m'être heurté sur votre palier contre une grande dégingandée vieille dame aux cheveux couleur de feu qui paraissait un peu folle et qui sortait de chez vous sans manteau, et le chapeau en bataille sur son postiche qui avait perdu tout équilibre.

      –Oh! monsieur Rouletabille, que vous a fait la princesse pour que vous la traitiez de la sorte?…

      –Elle m'a dit tout simplement ceci, mon cher monsieur Vladimir: «C'est bien à monsieur Rouletabille que j'ai le plaisir de parler?… Vladimir m'a beaucoup parlé de vous. Je vous prie! permettez-moi de me présenter à vous! Je suis une vieille amie de la famille de Vladimir et je m'intéresse à ce garçon qui a beaucoup de talent et qui envoie au journal l'Époque de Paris de si jolis articles, ma parole!»

      –La princesse vous a dit cela? fit Vladimir qui, cette fois avait rougi jusqu'à la racine des cheveux.

      –Naturellement… je lui ai même répondu: «Mais parfaitement, madame… c'est Vladimir qui écrit mes articles et c'est moi qui porte à la poste les articles de Vladimir!»

      –Dieu, que c'est drôle! exprima assez nonchalamment Vladimir.

      –Pour savoir si c'est drôle, j'attendrai la suite de l'histoire… déclara, d'une voix menaçante, Rouletabille.

      Rappelé à l'ordre, Vladimir toussa et continua:

      –Je vous disais donc, à propos de cette fourrure, qu'il n'eût tenu qu'à moi de la vendre, car enfin la princesse—la princesse Kochkaref… de la fameuse famille Kochkaref de Kiew… les Kochkaref sont bien connus…

      –Allez!… mais allez donc…

      –… Car enfin la princesse, qui est une vieille amie de ma famille et qui me veut beaucoup de bien, m'a dit plus d'une fois, cependant que j'admirais ce magnifique manteau: «Vladimir, s'il vous fait envie, mon ami, il est à vous!»

      –Petit misérable! jeta Rouletabille…

      –Ah! monsieur, calmez-vous, je ne mange pas de ce pain-là! interrompit Vladimir avec une admirable expression de dégoût! C'est ce que, chaque fois qu'elle parlait ainsi, j'ai fait comprendre à la princesse qui, voyant qu'elle me froissait dans mes sentiments naturels, voulut bien ne pas insister. Mais voici ce qui arriva. Ce manteau était l'objet de la jalousie de quelques amies de la princesse qui en discutaient le prix de façon fort déplaisante et qui ne voulaient point croire qu'elle l'eût payé cinquante mille roubles à un marchand de Moscou… à cause de quoi la princesse m'avait dit:

      «—Vladimir, pour les faire taire, ces péronnelles, vous devriez un jour ou l'autre porter ma fourrure au clou, la faire estimer, refuser bien entendu le prix que l'on vous en offrirait, et revenir avec mon manteau en proclamant la somme que l'on était prêt à vous avancer dessus!…»

      «Voilà ce que m'avait dit la princesse, et voilà ce que j'ai fait, monsieur, pas autre chose!… je le jure!…

      –Et moi, je jure que je ne comprends pas très bien, dit Rouletabille.

      –Vous allez comprendre, monsieur, et vous auriez déjà compris si votre impatience ne vous faisait m'interrompre tout le temps… Voilà la chose… Elle est simple… Le jour même de notre départ de Sofia, quand vous nous eûtes annoncé que nous partions pour une grande et longue expédition, quel a été mon premier mouvement?… Mon premier mouvement a été de courir chez la princesse pour me débarrasser de ce précieux manteau, que je ne voulais pas conserver plus longtemps sous ma responsabilité; le hasard fit que je pris justement par la rue où se trouve le Mont-de-Piété, et que, me trouvant en face de cette institution dont il avait été si souvent question entre la princesse et moi, je me suis mis à penser: «Tiens! voilà l'occasion de faire estimer le manteau!» J'entrai. On m'offrit de me prêter dessus la valeur de 43.000 francs!…

      –Et vous avez accepté?…

      –Non, monsieur, j'ai refusé. J'ai dit: Non!

      –Alors?

      –Alors, je ne sais par quelle fatalité, l'employé, qui était sans doute distrait, comprit que je lui répondais: Oui. Et voilà comment on m'allongea 43.000 levas sans que j'aie eu même le temps de protester!

      –Mais vous avez eu le temps de les ramasser!…

      –Ne me jugez pas mal, monsieur. En sortant du Mont-de-Piété, mon premier soin a été de renvoyer à la princesse sa «reconnaissance!»

      –Ah! ah! vous lui avez renvoyé sa «reconnaissance»… répéta Rouletabille, stupide devant un si prodigieux toupet…

      –Oui, monsieur, c'est comme je vous le dis! Je lui ai renvoyé sa «reconnaissance», et ainsi elle pourra retirer son manteau quand elle le voudra!

      –Oui-da! j'espère que la bonne dame vous sera reconnaissante d'une aussi délicate attention!…

      –Elle n'y manquera point, monsieur, je la connais..

      –Et qu'elle vous remerciera d'avoir pensé à un aussi infime détail…

      –Monsieur, entre nous, je lui devais bien ça!…

      –Mais vous lui devez aussi les 43.000 francs!

      –Qui est-ce qui le nie? monsieur. En même temps que je lui faisais parvenir sa «reconnaissance», qu'elle pourra montrer à ses amis, ce qui lui sera, comme elle le désirait, un motif de triomphe, je la prévenais que, partant le soir même, je n'avais pas le temps de passer chez elle, mais que je lui rapporterais cet argent dès mon retour à Sofia!

      –Brigand! Vous avez usé de cet argent comme s'il vous appartenait!

      –Eh! monsieur, la première chose que j'ai faite a été, СКАЧАТЬ