Название: Les etranges noces de Rouletabille
Автор: Гастон Леру
Издательство: Public Domain
Жанр: Классические детективы
isbn:
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–Tas de menteurs! Vous ne vous êtes même pas déshabillés et votre couchette n'est pas défaite!… Mais vous n'aviez plus de cartes! Où donc avez-vous trouvé ce sale jeu-là? Il est ignoble!…
–C'est le sous-off qui accompagnait m'sieur Athanase, murmura La Candeur en baissant la tête, qui l'a laissé tomber de sa poche!…
–Tu le lui as acheté, oui, bandit! ou Vladimir le lui a volé!
–Monsieur! monsieur! pour qui me prenez-vous?…
–Et à quoi jouiez-vous?…
–Mais, fit La Candeur, à ce petit jeu russe dont je t'ai parlé autrefois et qui est si amusant…
–Et qu'est-ce que vous jouez? fit le reporter en saisissant le papier qui était sur la table et sur lequel il lut: «Bon pour cinq cents francs». Signé: «Vladimir Petrovitch».
Il arracha le billet et, furieux:
–Tu es encore plus bête que je ne croyais, dit-il à La Candeur… Que tu joues de l'argent contre de l'argent, passe encore, mais contre la signature de Vladimir Petrovitch…
–Je n'ai pas osé «faire Charlemagne», expliqua La Candeur.
–Je joue sur signature parce qu'il m'a gagné tout mon argent, dit Vladimir qui n'avait point une bonne mine.
–Tu en avais beaucoup?
–Demandez-le à La Candeur.
–Voilà… dit La Candeur en rougissant. Voilà comment les choses se sont passées… Au commencement, c'est moi qui n'avais pas d'argent et je savais que Vladimir en avait. C'est triste de voyager sans argent. J'ai proposé à Vladimir de lui jouer mon épingle de cravate qui est le dernier souvenir qui me reste de ma soeur morte en me maudissant.
–Pourquoi ta soeur t'a-t-elle maudit, La Candeur?
–Parce que je m'étais fait journaliste! Tu comprends que je ne tenais pas énormément à ce souvenir-là. Je m'étais débarrassé de tous les autres. Je jugeais l'occasion bonne pour mon épingle de cravate. Mais ce sera pour une autre fois, car comme tu le vois, je ne l'ai pas perdue!
–Et avec elle tu as gagné tout l'argent de Vladimir? Dis-moi, combien…
–Je vais te dire… je vais te dire… on a commencé d'abord par jouer petit jeu… tout petit jeu… Mon épingle vaut bien soixante-quinze francs… Vladimir me l'a jouée contre vingt-cinq!… ça n'était guère… le malheur, pour Vladimir, est que de vingt-cinq, en cinquante, en cent… (car Vladimir a le tort de poursuivre son argent, je le lui ai assez dit) je lui ai gagné tout ce qu'il avait dans sa poche… Maintenant, comme je ne suis pas un mufle, je lui joue des billets qu'il me fait. A ce qu'il paraît qu'il a encore de l'argent à toucher sur l'invention de sa cuirasse!
–La Candeur, tu vas me dire combien tu as gagné à Vladimir!
–Qu'est-ce que ça peut te faire?
–Cela me fait que j'ignore d'où vient cet argent-là…
–Puisqu'il vient de la cuirasse!… [Voir Le Château Noir].
–Assez, combien?…
La Candeur, de plus en plus écarlate, fit:
–Je ne sais plus au juste… et il se décida à fouiller dans l'une de ses poches d'où il tira trois ou quatre billets de banque de cent levas (francs).
–Ce n'est pas tout! fit Rouletabille.
–Non, grogna La Candeur, en voilà encore…
Et il tira, cette fois, cinq billets de cinq cents levas.
–Fichtre! tu te mets bien! c'est tout?
–Je crois que c'est tout, susurra le bon géant en détournant la tête.
Mais Rouletabille se précipita sur lui, le fouilla et le vida d'une quantité incroyable de billets de banque qu'il avait entassés au petit bonheur dans la fièvre du jeu et qu'il se laissait enlever avec des soupirs de soufflets de forge…
Rouletabille compta:
Il y avait là quarante mille levas (quarante mille francs)!
Rouletabille regardait La Candeur, mais La Candeur n'osait pas regarder Rouletabille.
–C'est la première fois que j'ai eu de la veine! balbutia-t-il.
–Attends! dit Rouletabille, d'une voix légèrement oppressée, car il ne s'attendait point au déballage de cette petite fortune, attends. Nous en parlerons tout à l'heure de ta veine.
Et il ajouta:
–C'est donc cela que tu proposais toujours à ces messieurs du Château Noir, une rançon de quarante mille francs!…
–Mais oui, gémit La Candeur; j'ai bon coeur, moi!…
–Avec l'argent des autres c'est facile d'avoir bon coeur, émit Vladimir.
A ce moment-là, j'avais encore presque tout mon argent dans ma poche, mais La Candeur n'hésitait pas à en disposer comme s'il était déjà dans la sienne!…
–C'était pour le bien de la communauté, répliqua La Candeur…
–Tu as bon coeur, gronda Rouletabille, mais je me demande si, au fond, tu n'es pas aussi crapule que Vladimir!…
–Monsieur, dit Vladimir en se levant, j'affirme que vous me faites beaucoup de peine!…
Et il voulut s'esquiver, mais, Rouletabille le retint et lui demanda sur un ton sec, qui fit pâlir le jeune Slave:
–D'où vient l'argent?
–Monsieur, je vous assure qu'il vient fort honnêtement de la vente de l'invention de ma cuirasse… je tiens cette cuirasse d'un de mes amis de Kiew, qui a passé plus de dix ans de sa vie à l'inventer, à la perfectionner, enfin à en faire un véritable objet d'art militaire pour lequel il a dépensé une véritable fortune. Désespéré, lors de la dernière guerre de la Russie avec le Japon, de n'avoir pu vendre sa cuirasse au gouvernement russe, il est entré dans les bureaux de la censure, à Odessa, et m'a fait cadeau du fruit de ses veilles et de la cause de tous ses malheurs. Plus favorisé que lui, monsieur…
Rouletabille l'interrompit.
–Assez, Vladimir Petrovitch!… Je te jure que si tu ne me dis pas comment tu as eu tout cet argent, je te livre aux autorités bulgares pieds et poings liés! Tu leur raconteras, à elles, l'histoire de ta cuirasse.
Vladimir vit que c'était fini de rire et commença, en soupirant comme un enfant malade:
–Eh bien, je vais vous dire la vérité!… Elle est beaucoup moins grave que vous ne croyez, et toute cette affaire est arrivée, mon Dieu! presque sans que je m'en aperçoive.
–Va!…
Rouletabille pensait: «Il est capable de tout! Pourvu qu'il n'ait assassiné СКАЧАТЬ