Название: Henri IV (2e partie)
Автор: Уильям Шекспир
Издательство: Public Domain
Жанр: Драматургия
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LE JUGE. – Sir Jean, je vous avais fait demander avant votre expédition de Shrewsbury.
FALSTAFF. – Avec votre permission, on dit que Sa Majesté est revenue du pays de Galles avec quelques chagrins.
LE JUGE. – Je ne parle pas de Sa Majesté. Vous ne vous êtes pas soucié de venir, lorsque je vous ai envoyé chercher.
FALSTAFF. – Et on dit même que Sa Majesté a eu une nouvelle attaque de cette coquine d'apoplexie.
LE JUGE. – Eh bien, que Dieu veuille la guérir! mais écoutez ce que j'ai à vous dire.
FALSTAFF. – Cette apoplexie est, à ce que je m'imagine, une espèce de léthargie; n'est-ce pas, milord? comme qui dirait un assoupissement du sang, un coquin de tintement dans les oreilles.
LE JUGE. – Qu'est-ce que vous me contez là? Qu'elle soit ce qu'elle voudra.
FALSTAFF. – Cela vient de beaucoup de chagrin, de l'étude et des tourments d'esprit. J'ai lu la cause de ses effets dans Galien; c'est une espèce de surdité.
LE JUGE. – Je crois, ma foi, que vous tenez aussi un peu de cette surdité-là; car vous n'entendez rien de ce que je vous dis.
FALSTAFF. – Fort bien dit, milord, fort bien: ou plutôt, avec votre permission, c'est la maladie de ne pas écouter, l'infirmité de ne pas faire attention, dont je suis attaqué.
LE JUGE. – Une correction par les talons pourrait guérir le défaut d'attention de vos oreilles. C'est ce qui ne m'embarrassera guère si je deviens votre médecin.
FALSTAFF. – Je suis bien aussi pauvre que Job, milord, mais pas tout à fait si patient que lui. Dans le premier cas, votre seigneurie peut bien, si cela lui plaît, m'administrer la recette de l'emprisonnement à cause de ma pauvreté: mais jusqu'à quel point votre patient consentirait-il à suivre vos ordonnances, c'est en quoi les savants pourraient bien admettre quelques parties de scrupule, et peut-être même un scrupule tout entier.
LE JUGE. – Je vous ai envoyé chercher, pour me parler sur des choses où il n'allait pas moins que de votre vie.
FALSTAFF. – Et comme j'ai été conseillé par mon avocat, qui est très-versé dans les lois de ce pays, je ne me suis pas rendu chez vous.
LE JUGE. – Fort bien; mais le fait est, sir Jean, que vous vivez dans une grande infamie.
FALSTAFF. – Je défie quiconque pourra se serrer dans mon ceinturon de vivre à moins.
LE JUGE. – Vos moyens sont très-minimes, et vous faites grosse dépense.
FALSTAFF. – Je voudrais qu'il en fût autrement. J'aimerais bien mieux avoir des moyens plus grands, et dépenser moins gros 10.
LE JUGE. – Vous avez perverti le jeune prince.
FALSTAFF. – C'est le jeune prince qui m'a perverti. Je suis l'homme au gros ventre, et lui mon chien 11.
LE JUGE. – Enfin, je ne veux pas rouvrir une plaie récemment guérie: votre service à la journée de Shrewsbury a un peu replâtré vos exploits de nuit à Gadshill. Vous avez à remercier les troubles d'aujourd'hui, de ce que vous avez vu se passer sans trouble une pareille affaire.
FALSTAFF. – Milord?
LE JUGE. – Mais puisque tout est raccommodé, ayez soin que les choses restent comme elles sont, et n'éveillez pas le loup qui dort.
FALSTAFF. – Réveiller un loup est aussi fâcheux que de sentir un renard.
LE JUGE. – Songez que vous êtes comme une chandelle, le meilleur en est usé.
FALSTAFF. – Comme un gros cierge, milord, et tout de suif, et quand j'aurais dit de cire, cela ne conviendrait pas mal à la gravité de ma personne 12.
LE JUGE. – Il n'y a pas un poil blanc sur toute votre figure qui ne dût produire en vous sa portion de gravité.
FALSTAFF. – Qui ne dût produire sa part de jus, jus, jus 13.
LE JUGE. – Vous suivez le jeune prince partout comme son mauvais ange.
FALSTAFF. – Vous vous trompez, milord, un mauvais ange n'est pas de poids 14; au lieu que quiconque me regardera seulement me prendra bien, j'espère, sans me peser: et cependant, je l'avoue, à quelques égards, je ne serais pas de cours. La vertu a si peu de prix dans ces vils siècles de négoce, que le véritable courage se fait meneur d'ours, la vivacité d'esprit servante de cabaret, et elle est obligée d'employer toute la promptitude de ses reparties à présenter des comptes et dépenses: et tous les autres dons qui appartiennent à l'homme, à la manière dont la méchanceté du siècle les accommode, ne valent pas un grain de groseille. Vous qui êtes vieux, vous ne nous tenez pas compte de nos facultés à nous autres qui sommes jeunes; vous jugez de la chaleur de notre foie suivant l'amertume de votre bile; et nous qui sommes dans la fougue de la jeunesse, j'avoue que nous sommes aussi un peu crânes parfois.
LE JUGE. – Osez-vous encore placer votre nom dans la liste des jeunes gens, vous sur qui la main du temps a écrit en toutes lettres que vous êtes vieux? N'avez-vous pas l'oeil larmoyant, la main sèche, le visage jaune, la barbe blanche, une jambe qui diminue et un ventre qui grossit? N'avez-vous pas la voix cassée, l'haleine courte, le menton épais et l'esprit mince? Enfin tout n'est-il pas chez vous ravagé par la vieillesse? Et vous vous traitez encore de jeune homme? Fi, fi, fi, sir Jean!
FALSTAFF. – Milord, je suis né à trois heures de l'après-dînée, ayant la tête blanche et le ventre déjà un peu rond. Quant à ma voix, je l'ai perdue à force de crier après mes soldats et de chanter des antiennes. Vous donner d'autres preuves encore de ma jeunesse, c'est ce que je ne ferai point. La vérité est que je ne suis vieux que d'esprit et de conception; et quiconque voudra gagner mille guinées avec moi à qui fera le meilleur entrechat n'a qu'à m'avancer l'enjeu, et je suis son homme. Pour le soufflet que le prince vous a donné, il vous l'a donné en homme brutal, et vous, vous l'avez reçu en seigneur sensé. Je l'ai réprimandé dans le temps pour cela; et le jeune lion en fait pénitence aujourd'hui, non pas à la vérité dans la cendre et le cilice, mais avec des habits de soie neufs et de vieux vin d'Espagne.
LE JUGE. – Allons; Dieu veuille donner au prince un meilleur compagnon!
FALSTAFF. – Dieu veuille donner au compagnon un meilleur prince! car je ne saurais me dépêtrer de lui.
LE JUGE. – Eh bien! le roi vous a séparé du prince Henri, car on m'a dit que vous partiez avec le prince de Lancastre qui marche contre l'archevêque et le comte de Northumberland.
FALSTAFF. – Oui, et j'en rends grâces à votre aimable et charmante imagination; mais songez donc à prier, vous autres qui restez à la maison à caresser milady la Paix, que nos deux armées ne se joignent pas dans une journée chaude: car, ma foi, je n'emporte que deux chemises avec moi, et je ne prétends pas suer extraordinairement. Si la journée est chaude, je veux ne jamais cracher blanc de ma vie, si je brandis autre chose que la bouteille. Il ne lui passe pas par la tête une entreprise СКАЧАТЬ
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Le grand juge a dit à Falstaff
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Le juge a dit
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