Название: Le magasin d'antiquités. Tome I
Автор: Чарльз Диккенс
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
isbn:
isbn:
J'eus amplement le temps de noter ces traits caractéristiques; car, outre qu'ils étaient de nature à frapper sans plus ample examen, il se passa quelques instants avant que le silence, fût rompu. L'enfant s'avança timidement vers son frère et mit sa main dans la sienne. Le nain, si l'on veut bien nous permettre de l'appeler ainsi, avait embrassé d'un coup d'oeil pénétrant tous ceux qui étaient présents; et le marchand de curiosités, qui sans doute ne comptait pas sur cet étrange visiteur, semblait éprouver un profond embarras.
«Ah! ah! dit le nain qui, la main posée au-dessus de ses yeux, avait regardé attentivement le jeune homme; ce doit être là votre petit-fils, voisin?
– Vous voulez dire qu'il ne devrait pas l'être, répondit le vieillard; mais il l'est en effet.
– Et celui-ci? demanda le nain, montrant Dick Swiveller.
– C'est un de ses amis, aussi bienvenu que l'autre dans ma maison.
– Et celui-là? demanda encore le nain, tournant sur ses talons et me montrant du doigt.
– Un gentleman qui a eu la bonté de ramener Nell au logis l'autre soir qu'elle s'était égarée en revenant de chez vous.»
Le petit homme se tourna vers l'enfant pour la gronder ou lui exprimer son étonnement; mais, comme elle était en train de causer avec le jeune homme, il se contint et pencha la tête afin d'entendre leur conversation.
«Eh bien, Nelly, disait à haute voix le jeune homme, est-ce qu'on ne vous enseigne pas à me haïr, hein?
– Non, non. Quelle horreur! Oh! non.
– On vous enseigne à m'aimer, peut-être? dit-il en ricanant.
– Ni l'un ni l'autre. Jamais on ne me parle de vous, jamais.
– J'en suis persuadé, dit-il en lançant à son grand-père un regard farouche; j'en suis persuadé, Nell. Je vous crois.
– Moi, je vous aime sincèrement, Fred.
– Sans doute!
– Je vous aime et vous aimerai toujours, répéta-t-elle avec une vive émotion; mais si vous vouliez cesser de le tourmenter, de le rendre malheureux, ah! je vous aimerais encore davantage.
– Je comprends, dit le jeune homme qui s'inclina nonchalamment vers l'enfant et la repoussa après l'avoir embrassée. Là! maintenant que vous avez bien débité votre leçon, vous pouvez vous retirer. Il est inutile de pleurnicher. Nous ne nous quittons pas mal ensemble, si c'est cela qu'il vous faut.»
Il demeura silencieux, la suivant du regard jusqu'à ce qu'elle eût regagné sa petite chambre et fermé la porte; se tournant ensuite vers le nain, il lui dit brusquement:
«Écoutez-moi, monsieur…
– C'est à moi que vous parlez? répliqua le nain. Mon nom est Quilp. Ce n'est pas long à retenir: Daniel Quilp.
– Alors, écoutez-moi, monsieur Quilp. Vous avez un peu d'influence sur mon grand-père…
– Un peu! dit l'autre avec un ton d'importance.
– Vous êtes un peu dans la confidence de ses mystères, de ses secrets?
– Un peu! répliqua Quilp sèchement.
– Dites-lui donc de ma part, une fois pour toutes, qu'il doit s'attendre à me voir entrer ici et en sortir aussi souvent qu'il me conviendra, aussi longtemps qu'il gardera Nelly ici, et que, s'il veut se débarrasser de moi, il faut que d'abord il se soit débarrassé d'elle. Qu'ai-je donc fait pour être traité comme un loup-garou, pour qu'on me fuie et qu'on me redoute comme si j'apportais la peste? Ce vieillard vous dira que je ne sais pas ce que c'est qu'une affection de famille, et que je ne me soucie pas plus du bonheur de Nelly que de lui-même; laissez-le dire. En ce cas, ce dont je me soucie, c'est de venir ici à ma guise et de rappeler à ma soeur que j'existe. Je veux la voir quand il me plaira. J'y tiens. C'est un droit que je suis venu maintenir aujourd'hui. Je reviendrai cinquante fois dans le même but, et toujours avec le même succès. J'ai dit que je resterais ici jusqu'à ce que j'eusse eu satisfaction: je l'ai eue, voilà ma visite terminée. Allons, Dick.
– Arrêtez! cria M. Swiveller au moment où son ami se dirigeait vers la porte. Monsieur…
– Monsieur, votre très-humble serviteur, dit M. Quilp, à qui s'adressait ce dernier mot.
– Avant de quitter ce lieu de joie et de plaisir, ce séjour où règne une clarté éblouissante, je désire, avec votre permission, hasarder une petite remarque. Je suis venu ici aujourd'hui, monsieur, avec la pensée que le bonhomme était bien disposé…
– Continuez, monsieur, dit Daniel Quilp en voyant l'orateur s'arrêter subitement.
– Inspiré par cette idée et par les sentiments qu'elle éveille, et jugeant, en ma qualité d'ami commun, que ce n'est pas par des criailleries, des disputes, des querelles, que les âmes arrivent à s'épancher et que l'harmonie sociale se rétablit entre les parties adverses, j'ai pris sur moi de suggérer un moyen, le seul qu'on puisse adopter en pareille occurrence. Voulez-vous me permettre de vous glisser un tout petit mot à ce sujet?»
Sans attendre la permission qu'il avait sollicitée, M. Swiveller fit un pas vers le nain; puis, s'appuyant sur son épaule et se penchant comme pour lui parler à l'oreille, il lui dit, de manière à être parfaitement entendu de tout le monde:
«Voilà le mot d'ordre pour le bonhomme: fouille.
– Quoi? … demanda Quilp.
– Fouille, monsieur, fouille, répéta M. Swiveller en frappant sur son gousset pour montrer qu'il fallait fouiller à la poche. Vous comprenez, monsieur?»
Le nain fit un signe de tête. M. Swiveller fit quelques pas pour se retirer, et il s'arrêta pour lui rendre le même signe de tête à chaque pas qu'il faisait en arrière. Ce fut ainsi qu'il arriva à la porte: là, il toussa fortement pour appeler l'attention du nain et saisir cette occasion de lui recommander par un jeu muet la discrétion la plus absolue et le secret le plus inviolable. Après cette grave pantomime, qui dura le temps nécessaire selon lui pour bien lui inculquer ses idées, il suivit les traces de son ami et disparut.
«Hum! dit le nain avec un regard de travers et en haussant les épaules, il en coûte cher d'avoir de chers parents. Dieu merci, je ne m'en connais pas! Et vous seriez comme moi si vous n'étiez pas aussi faible qu'un roseau et presque aussi dépourvu de raisonnement.
– Que voulez-vous que je fasse? répliqua le vieillard avec une sorte de désespoir impuissant. Il est bien facile de parler et de ricaner. Que voulez-vous que je fasse?
– Ce que je ferais, moi, si j'étais à votre place.
– Quelque acte violent, sans doute?
– Fort bien, dit le petit homme très-flatté de ce qu'il prenait pour un compliment et grimaçant un rire diabolique en frottant ses mains sales l'une contre l'autre. Demandez à Mme Quilp, à la jolie, soumise, timide et tendre Mme Quilp. Mais son nom me rappelle que je l'ai laissée toute seule; je me figure son inquiétude… Elle n'aura pas un moment de repos jusqu'à ce que je sois de retour. C'est toujours ainsi qu'elle est quand je suis dehors, bien qu'elle n'ose en dire un mot à moins СКАЧАТЬ