Название: Le magasin d'antiquités. Tome I
Автор: Чарльз Диккенс
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
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– Oui, oui, c'est la vérité, s'écria-t-elle avec force. Et Kit aussi le sait bien.»
Kit, qui, en absorbant son pain et son boeuf, plongeait à chaque bouchée, avec le sang-froid d'un jongleur, son couteau dans sa bouche, s'arrêta tout court au milieu de ses opérations gastronomiques, en entendant cet appel à son témoignage, et hurla: «Personne ne serait assez fou pour dire qu'il ne vous aime pas.» Après quoi, il se rendit incapable de continuer la conversation en ingurgitant une énorme sandwich d'un seul coup.
«Elle est pauvre actuellement, dit le vieillard en donnant une petite tape amicale sur la joue de l'enfant; mais, je le répète, le temps approche où elle deviendra riche. Ce temps aura été long à venir, mais enfin il viendra. Il est bien venu pour tant d'autres qui ne font rien que se livrer à la dépense et aux excès. Oh! quand viendra-t-il pour moi?
– Je me trouve heureuse comme je suis, grand-père, dit l'enfant.
– Hum! hum! Tu ne sais pas maintenant… et comment pourrais-tu savoir?..»
Et il murmura de nouveau à demi-voix:
«Ce temps viendra, je suis certain qu'il viendra. Il n'en paraîtra que meilleur pour s'être fait attendre.»
Et alors il soupira et retomba dans son état de rêverie; il avait attiré l'enfant entre ses genoux, et paraissait insensible à tout le reste autour de lui. Cependant il s'en fallait de quelques minutes seulement que minuit sonnât. Je me levai pour partir: ce mouvement rappela le vieillard à la réalité.
«Un moment, monsieur, dit-il. Eh bien! Kit, bientôt minuit, mon garçon, et vous êtes encore ici! Retournez chez vous, retournez chez vous, et demain matin soyez exact, car il y a de l'ouvrage à faire. Bonne nuit! Souhaite-lui le bonsoir, Nelly, et qu'il s'en aille.
– Bonsoir, Kit, dit l'enfant, les yeux brillants de gaieté et d'amitié.
– Bonsoir, miss Nell, répondit le jeune garçon.
– Et remerciez ce gentleman, reprit le vieillard; sans ses bons soins, j'aurais pu perdre cette nuit ma petite-fille.
– Non, non, maître, s'écria Kit, pas possible, pas possible.
– Comment?
– Je l'aurais retrouvée, maître, je l'aurais retrouvée. Je parie que je l'aurais retrouvée et aussi vite que qui que ce soit, pourvu qu'elle fût encore sur la terre. Ha! ha! ha!»
Ouvrant de nouveau sa large bouche en même temps qu'il fermait les yeux et poussait un éclat de rire d'une voix de stentor, Kit gagna la porte à reculons en continuant de crier. Une fois hors de la chambre, il ne fut pas long à décamper.
Après son départ, et tandis que l'enfant était occupée à desservir, le vieillard dit:
«Monsieur, je n'ai pas paru suffisamment reconnaissant de ce que vous avez fait pour moi ce soir, mais je vous en remercie humblement et de tout coeur; Nelly en fait autant, et ses remercîments valent mieux que les miens. Je serais au regret si, en partant, vous emportiez l'idée que je ne suis pas assez pénétré de votre bonté ou que je n'ai pas souci de mon enfant… car certainement, cela n'est pas!
– Je n'en puis douter, dis-je, après ce que j'ai vu. Mais permettez-moi de vous adresser une question.
– Volontiers, monsieur; qu'est-ce?
– Cette charmante enfant, avec tant de beauté et d'intelligence, n'a-t-elle que vous au monde pour prendre soin d'elle? pas d'autre compagnie? d'autre guide?
– Non, non, dit-il, me regardant en face avec anxiété; non, et elle n'a pas besoin d'en avoir d'autre.
– Ne craignez-vous pas de vous méprendre sur les nécessités de son éducation et de son âge? Je suis certain de vos excellentes intentions; mais vous-même, êtes-vous bien certain de pouvoir remplir une mission comme celle-là? Je suis un vieillard ainsi que vous; vieillard, je m'intéresse à ce qui est jeune et plein d'avenir. Avouez-le, dans tout ce que j'ai vu cette nuit de vous et de cette petite créature, n'y a-t-il pas quelque chose qui peut mêler de l'inquiétude à cet intérêt?»
Mon hôte garda d'abord le silence, puis il répondit:
«Je n'ai pas le droit de m'offenser de vos paroles. Il est bien vrai qu'à certains égards nous sommes, moi l'enfant, et Nelly la grande personne, ainsi que vous avez pu le remarquer déjà. Mais que je sois éveillé ou endormi, la nuit comme le jour, malade ou en bonne santé, cette enfant est l'unique objet de ma sollicitude; et si vous saviez de quelle sollicitude, vous me regarderiez d'un oeil bien différent. Ah! c'est une vie pénible pour un vieillard, une vie pénible, bien pénible; mais j'ai devant moi un but élevé, et je ne le perds jamais de vue!»
En le voyant dans ce paroxysme d'exaltation fébrile, je me mis en devoir de reprendre un pardessus que j'avais déposé en entrant dans la chambre, résolu à ne rien dire de plus. Je vis avec étonnement la petite fille qui se tenait patiemment debout, avec un manteau sur le bras, et à la main un chapeau et une canne.
«Ceci n'est pas à moi, ma chère, lui dis-je.
– Non, répondit-elle tranquillement, c'est à mon grand-père.
– Mais il ne sort pas à minuit…
– Pardon, il va sortir, dit-elle en souriant.
– Mais vous? Qu'est-ce que vous devenez pendant ce temps-là, chère petite?
– Moi? Je reste ici naturellement. C'est comme cela tous les soirs.»
Je regardai le vieillard avec surprise: mais il était ou feignait d'être occupé du soin de s'arranger pour sortir. Mon regard se reporta de lui sur cette douce et frêle enfant. Toute seule! dans ce lieu sombre; seule, toute une longue et triste nuit!
Elle ne parut pas s'apercevoir de ma stupéfaction; mais elle aida gaiement le vieillard à mettre son manteau: lorsqu'il fut prêt, elle prit un flambeau pour nous éclairer. Voyant que nous ne la suivions pas assez vite, elle se retourna le sourire aux lèvres et nous attendit. La cause de mon hésitation n'avait pas échappé au vieillard; l'expression de sa physionomie le prouvait; mais il se borna à m'inviter, en inclinant la tête, à passer devant lui, et il garda le silence. Il ne me restait qu'à obéir.
Lorsque nous eûmes franchi la porte, l'enfant posa son flambeau à terre, me souhaita le bonsoir et leva vers moi son visage pour m'embrasser. Puis elle s'élança vers le vieillard, qui la serra dans ses bras et appela sur elle les bénédictions de Dieu.
«Dors bien, Nell, dit-il doucement, et que les anges gardiens veillent sur toi dans ton lit! N'oublie pas tes prières, ma mignonne.
– Non, certes, s'écria-t-elle avec ardeur; je suis si heureuse de prier!
– Oui, je le sais, cela te fait du bien et cela doit être. Mille bénédictions! Demain matin, de bonne heure, je serai ici.
– Vous n'aurez pas besoin de sonner deux fois. La sonnette m'éveille, même au beau milieu d'un rêve.»
Ce fut ainsi qu'ils se séparèrent. L'enfant ouvrit la porte, maintenant protégée par un volet que Kit y avait appliqué, en sortant, et avec un dernier adieu dont la douceur et СКАЧАТЬ