Название: Jim Harrison, boxeur
Автор: Артур Конан Дойл
Издательство: Public Domain
Жанр: Зарубежная классика
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– Oui, père, dis-je avec quelque confiance.
– Alors, combien y avait-il de vaisseaux de ligne à la bataille de Camperdown?
Il hocha la tête d'un air grave, en s'apercevant que j'étais hors d'état de lui répondre.
– Eh bien! il y a dans la flotte des hommes qui n'ont jamais mis les pieds à l'école et qui vous diront que nous avions sept vaisseaux de 74, sept de 64, et deux de 50 en action. Il y a sur le mur une gravure qui représente la poursuite du Ça ira. Quels sont les navires qui l'ont pris à l'abordage?
Je fus encore obligé de m'avouer battu.
– Eh bien! votre papa peut encore vous donner quelques leçons d'Histoire, s'écria-t-il en jetant un regard triomphant sur ma mère. Avez-vous appris la géographie?
– Oui, père, dis-je, avec moins d'assurance qu'auparavant.
– Eh bien, quelle distance y a-t-il de Port-Mahon à Algésiras?
Je ne pus que secouer la tête.
– Et si vous aviez Wissant à trois lieues à tribord, quel serait votre port d'Angleterre le plus rapproché?
Je dus encore m'avouer battu.
– Ah! je trouve que votre géographie ne vaut guère mieux que votre Histoire, dit-il. À ce compte-là, vous n'obtiendrez jamais votre certificat. Savez-vous faire une addition? Bon! Alors nous allons voir si vous êtes capable de faire le total de sa part de prise.
Tout en parlant, il jeta du côté de ma mère un regard malicieux.
Elle posa son tricot et jeta un coup d'oeil attentif sur lui.
– Vous ne m'avez jamais questionné à ce sujet, Mary? dit-il.
– La Méditerranée n'est point une station qui ait de limportance à ce point de vue, Anson. Je vous ai entendu dire que l'Atlantique est l'endroit où l'on gagne les parts de prise et la Méditerranée celle où l'on gagne de l'honneur.
– Dans ma dernière croisière, j'ai eu ma part de l'un et de l'autre, grâce à mon passage d'un navire de guerre sur une frégate. Eh bien! Rodney, il y a deux livres pour cent qui me reviennent, quand les tribunaux de prise auront rendu leur arrêt. Pendant que nous tenions Masséna bloqué dans Gênes, nous avons capturé environ soixante-dix schooners, bricks, tartanes, chargés de vin, de provisions, de poudre. Lord Keith fera de son mieux pour avoir part au gâteau, mais ce seront les tribunaux de prise qui régleront l'affaire. Mettons qu'il me revienne, en moyenne, environ quatre livres par unité. Que me rapporteront les soixante- dix prises?
– Deux cent quatre-vingt livres, répondis-je.
– Eh! mais, Anson, c'est une fortune, s'écria ma mère en battant des mains.
– Encore une épreuve, Roddy, dit-il en brandissant sa pipe de mon côté. Il y avait la frégate Xébec au large de Barcelone, ayant à bord vingt mille dollars d'Espagne, ce qui fait quatre mille deux cents livres. Sa carcasse pouvait valoir autant, que me revient-il de cela?
– Cent livres.
– Ah! le comptable lui-même n'aurait pas fait plus vite le calcul, s'écria-t-il, enchanté. Voici encore un calcul pour vous. Nous avons passé les détroits et navigué du côté des Açores où nous avons rencontré la Sabina revenant de Maurice avec du sucre et des épices. Douze cents livres pour moi, voilà ce qu'elle m'a valu, Mary, ma chérie. Aussi vous ne salirez plus vos jolis doigts et vous n'aurez plus à vivre de privations sur ma misérable solde.
Ma mère avait supporté, sans laisser échapper un soupir, ces longues années d'efforts, mais maintenant qu'elle en était délivrée, elle se jeta en sanglotant au cou de mon père. Il se passa assez longtemps avant qu'il pût songer à reprendre mon examen arithmétique.
– Tout cela est à vos pieds, Mary, dit-il en passant vivement la main sur ses yeux. Par Georges! ma fille, quand ma jambe sera bien remise, nous pourrons nous offrir un petit temps de séjour à Brighton, et si l'on voit sur la Steyne une toilette plus élégante que la vôtre, puissé-je ne jamais remettre les pieds sur un tillac. Mais, comment se fait-il, Rodney, que vous soyez aussi fort en calcul, alors que vous ne savez pas un mot d'Histoire ou de géographie?
Je m'évertuai à lui expliquer que l'addition se fait de même façon à terre et à bord, mais qu'il n'en est pas de même de l'Histoire ou de la géographie.
– Eh bien, me dit-il, il ne vous faut que des chiffres pour faire un calcul, et avec cela votre intelligence naturelle peut vous suffire pour apprendre le reste. Il n'y en a pas un de nous qui n'eut couru à l'eau salée comme une petite mouette. Lord Nelson m'a promis un emploi pour vous, et c'est un homme de parole.
Ce fut ainsi que mon père fit sa rentrée parmi nous; jamais garçon de mon âge n'en eut de plus tendre et de plus affectueux.
Bien que mes parents fussent mariés depuis fort longtemps, ils avaient, en réalité, passé très peu de temps ensemble et leur affection mutuelle était aussi ardente et aussi fraîche que celle de deux amants mariés d'hier.
J'ai appris depuis que l'homme de mer peut être grossier, répugnant, mais ce n'est point par mon père que je le sais, car bien qu'il eut passé par des épreuves aussi rudes qu'aucun deux, il était resté le même homme, patient, avec un bon sourire et une bonne plaisanterie pour tous les gens du village.
Il savait se mettre à l'unisson de toute société, car, d'une part, il ne se faisait pas prier pour trinquer avec le curé ou avec sir James Ovington, squire de la paroisse, et d'autre part, passait sans façon des heures entières avec mes humbles amis de la forge, le champion Harrison, petit Jim et les autres. Il leur contait sur Nelson et ses marins des histoires telles que j'ai vu le champion joindre ses grosses mains, pendant que les yeux du petit Jim pétillaient comme du feu sous la cendre, tandis qu'il prêtait l'oreille.
Mon père avait été mis à la demi-solde, comme la plupart des officiers qui avaient servi pendant la guerre, et il put passer ainsi près de deux ans avec nous.
Je ne me souviens pas qu'il y ait eu le moindre désaccord entre lui et ma mère, excepté une fois.
Le hasard voulut que j'en fusse la cause, et comme il en résulta des événements importants, il faut que je vous raconte comment cela arriva.
Ce fut en somme le point de départ d'une série de faits qui influèrent non seulement sur ma destinée, mais sur celle de personnes bien plus considérables.
Le printemps de 1803 fut fort précoce.
Dès le milieu d'avril, les châtaigniers étaient déjà couverts de feuilles.
Un soir, nous étions tous à prendre le thé, quand nous entendîmes un pas lourd à notre porte.
C'était le facteur qui apportait une lettre pour nous.
– Je crois que c'est pour moi, dit ma СКАЧАТЬ